Oui, Marco Vinco est bien parent avec la basse Ivo Vinco, malicieusement surnommé Monsieur Cossotto par les passionnés entendant ainsi suggérer le fait que sa célèbre épouse Fiorenza Cossotto imposait son mari à qui voulait l’engager elle-même. Cela dit, les dons et talents de l’oncle-basse existaient bien, mais ceux du neveu-baryton-basse provoquent l’étonnement et forcent l’admiration.
On est d’emblée frappé par l’unité de timbre, également sombre, pour ainsi dire, des graves sonores et impressionnants, une grande délicatesse de phrasé et, dans le fait d’aborder les notes, une couleur, une noblesse d’accent rappelant rien moins que Cesare Siepi !
Le programme est dédié pour moitié à des mélodies italiennes de Beethoven : « La Speranza », « L’Amante impaziente » (en deux versions), « In questa tomba oscura »), et de Liszt, les Tre Sonetti di Petrarca. Précisément, tiré de ce recueil, le sonnet « Benedetto sia il giorno » met en lumière à la fois les graves profonds et des aigus tenus impressionnants. Toujours, la chaleur du timbre, l’élégance du phrasé demeurent exemplaires.
La « partie française », pour ainsi dire, comporte le recueil de trois chansons Don Quichotte à Dulcinée de Maurice Ravel, les quatre Chansons de Don Quichotte de Jacques Ibert, avec la saisissante « Chanson de la mort » qui clôt la série, et enfin trois mélodies de Fauré : « Tristesse », « Après un rêve », « Toujours ».
Le chant y est toujours splendide — les graves somptueux de la Chanson épique de Ravel — mais si la prononciation est à l’évidence soignée, la diction n’est plus aussi claire… Lorsque l’on comprend par exemple, dans l’attaque de la « Chanson à boire » : « Prêt du bateau… », il fallait entendre : « Foin du bâtard » (!). De même, on entend — avec stupeur sous la plume de Théophile Gautier — : « Ah ! déshabille-toi… », on se précipite alors sur le texte pour vérifier et lire plutôt : « En déshabillé blanc ».
Cela ne gâte pas notre plaisir et ajoute plutôt une note de couleur locale venant notamment s’ajouter à celle, discrètement hispanisante, voulue par Ibert. Il était du reste judicieux de proposer ces mélodies concurremment composées par Ravel et Ibert pour le film de Pabst, qui retint les airs du second.
Tout au long de ce récital, l’art de Marco Vinco trouve une réponse ou un écho dans le sensible accompagnement de Edelmiro Arnaltes, sur son instrument au son clair de pianoforte, donnant plus de légèreté aux mélodies.
Yonel Buldrini