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Gaetano DONIZETTI (1797-1848)
DON PASQUALE
Don Pasquale, Simone Alaimo
Dr. Malatesta, Marzio Giossi
Ernesto, Norman Shankle
Norina, Patrizia Ciofi
Notaro, Romaric Braun
Chœur du Grand Théâtre de Genève
Orchestre de la Suisse Romande
Evelino Pido
Mise en scène, Daniel Slater
Décors et costumes, Francis O’Connor
Lumières, David Poet
1 DVD Bel Air Classiques, BAC033
Entrée côté cour ; sortie côté jardin
Ah ! Qu’on les aime, les vieux schémas ! Il y a
une part de méchanceté en nous qui fait qu’on court
au buffa ; que l’on se repaît de ces histoires de
vieux barbons joués ; de jeunes femmes retorses. Un peu
comme lorsque l’on peine à contenir son hilarité
devant une vieille dame qui tombe dans la rue – et ne me dites
pas que cela ne vous est jamais arrivé !
Et il faut bien, reconnaissons-le, tout notre
« a-humanisme » pour revenir à ces canevas
qui se ressemblent tous plus que de raison ! Un vieil homme, un
comparse qui tire les ficelles, une jeune hétaïre, un amant
mollasson et geignard, et – c’est bien logique – un
notaire pour consommer les nouvelles règles de ce mondo alla roversa !
Le livret de Don Pasquale
n’est pas mieux écrit que les autres ; mais il donne,
au moins, la possibilité aux metteurs en scène de laisser
libre cours à leur imagination. Ici, cette dernière nous
transporte dans une espèce de Montparnasse des années 30.
Pourquoi pas. Avec loufiats, terrasse de café, intérieur
crypto-modernistes qui sentent l’art déco, Lanvin et
Mondrian etc… Pourquoi pas encore.
Mais pourquoi ne pas le dire, on aurait aimé plus de
méchanceté ! Quelque chose de balzacien ;
de plus franchement critique. On aurait aimé, un Pasquale
vieillard cauteleux, bouffi d’orgueil pour mieux jubiler de la
vilaine farce qui lui est faite. On aurait aimé un Malatesta
plus pervers ; Machiavel sur le retour, la lippe mauvaise et
l’œil frisant. On aurait apprécié une Norina
plus diabolique ; bella siccome un angelo me direz-vous –
mais Satan, aussi, était un ange !
Mais enfin, ce côté « Au Théâtre
ce soir » se défend ; il a ses adeptes et ne
dépare pas ici, à défaut de soulever franchement
l’enthousiasme. Les masses chorales sont bien
animées ; les solistes bien inspirés – enfin
presque ; les costumes soignés ; le tout franchement
bien, très bien filmé. Ce n’est déjà
pas si mal !
La fosse rugit ; sans grande finesse ; avec un peu
d’effets, un peu d’esbroufe ; avec rapidité
surtout ; l’orchestre court la poste et c’est bien
normal : Pido est aux
manettes. Mais, là encore, cela dérange moins que dans
les grandes fresques dramatiques du maître de Bergame. Disons que
l’orchestre roule, bien dans ses rails. C’est quelque chose
dont toutes les maisons ne peuvent pas se vanter !
Glissons sur Ernesto qui joue comme une planche et chante sans vraie
grâce ; incarnation au niveau 0 et présence à
l’avenant. Glissons aussi sur Malatesta. Lui, tricote de la belle
ouvrage, bien campé en scène, raisonnablement
timbré mais un peu bousculé par la prosodie. Pasquale
n’a plus grand-chose à prouver ; plus, non plus,
à montrer. La voix a foutu le camp ; plus guère de
grave et l’autre extrémité est à peu
près du même tonneau. Mais la présence est
énorme et le champ syllabique juteux à souhait. Cela ne
fait pas complètement un Pasquale, mais ça y
contribue !
Quant à Norina. Ah… Ciofi
faisait ses débuts à Genève dans un rôle qui
n’est pas, non plus, le plus franchement périlleux du
répertoire, tous maîtres confondus. Il n’y a pas de
tour de force à réaliser une bonne Norina ; au moins
vocalement. De ce point de vue-là, pas de déception. Le
timbre est ce qu’il est ; avec ses tensions, ses
âpretés ; cette espèce de strain dans
l’aigu qui fait, aussi, que l’on se demande
confusément si ce n’est pas le dernier que la dame pourra
fournir. Mais, miracle, elle y arrive à chaque fois. Il y en a
qui aime – comme moi – et d’autres qui
détestent. Donc vocalement, c’est un accessit. Et
scéniquement, Ciofi ne se défend pas plus mal ; dans
les limites qui lui sont fixées. Sa petite femme est sanguine,
rouée juste ce qu’il faut ; pimpante, piquante. Et
quels yeux ! Qui réactivent des souvenirs moites de
mélos façon Bette Davis ! Bref, des lignes et de la
ligne – vocalement, s’entend.
On a vu franchement pire !
Benoît BERGER
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