Fondée en 1925, la firme Electrola a enregistré de nombreux témoignages de la vie musicale allemande pendant tout l’après deuxième guerre mondiale. EMI, avec laquelle Electrola a fusionné en 2002, entreprend d’en diffuser une partie, dont un coffret de sept CD présenté comme un hommage à l’immense Fritz Wunderlich. On y trouve du Puccini, du Mozart, de l’opéra français et russe, des quasi raretés… le tout, auf Deutsch, comme c’était l’usage au millénaire précédent. En réalité, il s’agit davantage d’extraits d’intégrales, au sein desquelles le ténor s’est illustré et qui, sauf erreur, n’existent pas ou plus au catalogue en CD. De Fritz Wunderlich, la plupart des airs ont été diffusés dans différentes compilations. Mais la démarche consistant à le présenter entouré de ses partenaires habituels éveille l’intérêt. De fait, les choix effectués ne sont pas particulièrement calibrés pour que la plus grande partie de ses rôles figure sur ces enregistrements. Ainsi, dans le Don Giovanni, ne figure que le « Nur ihrem Frieden weih’ich mein Leben » (« Dalla sua pace ») et pas le « Il mio tesoro ». Pas de doute sinon, on est à bien à Berlin, à l’Ouest, à Zehlendorf ou dans l’Eglise de Grunewald. Les enregistrements vont de 1957 à 1961 (le titre du coffret est inexact) et Fritz Wunderlich, pour parler de lui, est au sommet. Le timbre est immédiatement séducteur, l’expression convaincante, même dans des rôles où on l’attend moins, comme Pinkerton. Les distributions extrêmement homogènes sentent l’esprit de troupe. Gottlob Frick, inénarable en Van Bett de Zar und Zimmermann, Pilar Lorengar, l’ami Hermann Prey, mais encore Annelises Rothenberger en Mimi, Pilar Lorengar (Butterfly et Migno) ou la grande Elisabeth Grümmer attirent l’attention autant que Wunderlich. Une fois franchi l’obstacle de la langue, la cohérence de l’ensemble ressort nettement et ces 7 CD se dégustent comme un vieux schnapps de la meilleure qualité. [JphT]
Fritz Wunderlich : Les « extraits Electrola » (1960 – 63) – 7 CD EMI Classics – 6 78836 2
A lire aussi l’article consacré par Nicolas Derny à Fritz Wunderlich dans notre encyclopédie subjective du ténor : Fritz Wunderlich ou l’absence de soleil