Entendu au Châtelet en Figaro du Barbier, puis dans Orlando Paladino, le baryton italien Bruno Taddia était de retour à Paris pour un récital de mélodies, en relation avec l’exposition Debussy organisée au musée de l’Orangerie. A l’Auditorium du Musée d’Orsay, il proposait un programme où Claude-Achille était entouré par ses prédécesseurs et ses contemporains : Bizet, Wagner, Nietzsche et Schönberg. On a beaucoup entendu ces derniers temps les tout premiers essais de Debussy dans le domaine de la mélodie, il était temps de prêter l’oreille aux œuvres de la maturité, et c’est bien l’après-Pelléas que l’on entendait dans ce récital : le deuxième recueil de Fêtes Galantes, où Debussy se montre certes aussi verlainien qu’à ses débuts, mais avec quel génie, et aussi Trois Chansons de France, sur des poèmes de Charles d’Orléans et Tristan L’Hermite, et Trois ballades de François Villon. En bis, la « Chanson de la Puce » de Beethoven fait écho au même texte de Goethe mis en musique par Wagner, interprété en première partie, et « Das Dolce Farniente » de Carl Loewe fait comprendre au public qu’il est temps d’aller se coucher. Chez Bruno Taddia on admire avant tout une belle sensibilité et des talents d’acteur déjà démontrés. Appuyé au piano, arc-bouté contre le couvercle, le chanteur se dandine moins que dans l’Orlando du Châtelet ; c’est à son accompagnateur, Andrea Corazziari, qu’est réservé le privilège de se tortiller allègrement sur son siège. La prononciation du français est mieux que satisfaisante, mais il faut bien reconnaître que la voix est limitée : l’ambitus est réduit, et l’artiste sort très vite de sa zone de confort. Toutes les notes graves sont détimbrées, parlées plus que chantées, certains aigus sont émis en falsetto, ou brutalement glapis. Bruno Taddia fait un beau début de carrière, il sera prochainement Dandini à Glyndebourne, mais fera-t-il l’effort de travailler le bas de sa tessiture pour donner à sa voix l’assise indispensable ? L’avenir le dira. [LB]
Récital Bruno Taddia, jeudi 12 avril, Auditorium du Musée d’Orsay