« Amor ti
vieta, di non amar… »
(L’amour t’interdit de
ne pas aimer…)
A. Colautti, FEDORA, Acte II
Oui, Siberia a cent ans ! Qu’est-ce
donc là ? pensera l’amateur moyen, prêt à dédaigner ou mieux : à apprendre. Il
est vrai que de la trilogie des œuvres les plus populaires du Maestro, seules
Andrea Chénier et Fedora sont jouées aujourd’hui. On aura à présent
deviné qu’il s’agit d’un opéra d’Umberto Giordano… mais peut-être est-il besoin
pour le lecteur francophone de découvrir l’auteur avant son œuvre ?
Umberto
Giordano - Les débuts
Contemporain de Ruggero Leoncavallo (1857),
Giacomo Puccini (1858), Pietro Mascagni (1863) et Francesco Cilea (1866),
Umberto Giordano est né en 1867 dans la ville de Foggia, située dans la région
des Pouilles, au sud de l’Italie. « La Puglia », en italien, avait déjà vu
naître Tommaso Traetta, Niccolò Piccinni à Bari, la capitale, et Giovanni
Paisiello à Tarente. Aujourd’hui encore, cette région reculée au talon de
l’illustre Botte possède toujours pour les amateurs d’opéras une aura de
prestige car le Festival della Valle d’Itria, basé à Martina Franca explore tout
un répertoire plus ou moins endormi…
Ludovico
Giordano était pharmacien et souhaitait faire d’Umberto un médecin, il se montra
donc contraire à l’attirance du jeune garçon pour la musique au point de lui
interdire de fréquenter le théâtre de la ville. La destinée devait en décider
autrement et pour commencer, Umberto se lia d’amitié avec l’accessoiriste, ce
qui lui permit d’entrer dans la salle avant le début des représentations.
Constatant son échec, Ludovico Giordano finit en 1880 par inscrire son fils au
Conservatoire San Pietro a Majella de Naples, où son compagnon d’études était
Francesco Cilea. Ses premières compositions, pour orchestre, furent accueillies
avec succès lors des examens de fin d’année.
En 1888,
l’éditeur milanais Sonzogno lança la seconde édition de son concours d’opéra en
un acte, dont la première (en 1883) avait vu la participation de Puccini avec
Le Villi, son premier opéra. Umberto décida de concourir et lors des
sélections commencées en 1890, il fut convoqué à l’Accademia di Santa Cecilia de
Rome et dut exécuter entièrement son opéra Marina au piano, devant la
commission du jury. Celui-ci se montra favorable, percevant l’éclair d’un génie
nouveau et l’opéra fut classé sixième… mais seuls les trois premiers étaient
destinés à être montés au Teatro Costanzi (aujourd’hui Teatro dell’Opera) de
Rome. Précisons tout de même quelle concurrence devait connaître la première
œuvre de Giordano, rien moins que la fulgurante Cavalleria rusticana de
Pietro Mascagni, véritable bombe jetée dans la mare où s’enlisait un opéra
italien essoufflé.
Les deux
autres compositeurs primés furent Nicola Spinelli (1865-1905), élève du
compositeur de renom Luigi Mancinelli et Vincenzo Ferroni (1858-1934), lui-même
élève de Massenet avant de devenir l’enseignant du compositeur Italo Montemezzi
et du grand chef d’orchestre Gianandrea Gavazzeni. Précisons enfin, que le
nombre total de participants s’élevait à soixante-treize candidats.
Ce classement
ne fut pas un échec pour Umberto et l’éditeur Sonzogno se révéla fortement
impressionné par Marina, au point de lui faire signer un contrat pour une
autre œuvre, qui sera Mala Vita, jetant Giordano dans cette carrière que
Donizetti commentait ainsi : « le métier du pauvre
compositeur d’opéras, je l’ai compris depuis le début comme étant très
malheureux ». Le seul point d’ombre demeurant aujourd’hui est que la pauvre
Marina attend toujours sa création !… En revanche, le Teatro Giordano de
Foggia a fait récemment revivre Mala Vita et l’enregistrement vient
d’être publié en octobre dernier par l’indispensable Casa Bongiovanni de
Bologne.
A sa création, l’œuvre remporta un
franc succès mais le sujet eut du mal à passer… et à un point tel qu’il
déclencha une émeute à Naples où il fut donné après la création romaine. En
effet, l’action se passe dans cette ville, mettant en scène des bas quartiers
avec une maison close et donne le rôle principal à une pauvre prostituée, ce qui
choqua les Napolitains ne pouvant supporter, même du vérisme, un tel…
réalisme !
L’opéra
suivant, Regina Diaz, s’inspire de l’un des chefs-d’œuvre de Donizetti,
Maria di Rohan, sujet romantique au possible ne devant plus
choquer personne…mais l’on est curieux de connaître comment le génie inventif de
Giordano s’est adapté à ce revirement !…
Umberto Giordano -
La problématique « Giovane Scuola »
Il est vrai
qu’il faut manipuler cette étiquette de « vérisme » avec précaution ou ne
l’utiliser, en fait, que comme mot collectif permettant de regrouper fort
commodément plusieurs compositeurs contemporains et adoptant les mêmes
principes : abandon des fioritures vocales, plus grande projection demandée à la
voix et importance accrue donnée à l’orchestre. L’expression des sentiments par
le chant est donc simplifiée, plus spontanée, et aidée par l’orchestre au
pouvoir suggestif évident. En ce sens on peut dire que la musique se rapproche
un peu de la réalité, en prenant bien garde de penser à
l’affirmation de G. Roncaglia : « On a beaucoup parlé d’école vériste, mais
c’est une pure sottise parce que la musique, de par sa nature, n’est jamais
“vériste” ».
Mais,
objectera-t-on, peut-on au moins dire que le sujet est vériste ? Là
également la prudence est de rigueur ! Si l’on déclare « vériste » une
Fedora parce son action est contemporaine à Giordano, et qu’on y entend le
timbre d’une sonnette électrique de porte, que dire de La Traviata
(1853), de Stiffelio (1850) de Verdi, ou de bon nombre d’opéras bouffes
de Donizetti dont l’action est contemporaine aux auteurs ?
…Et que faire
des opéras « véristes » en costumes : Manon Lescaut, Andrea Chénier, La
Bohème, Tosca, Adriana Lecouvreur ?…Seront-ils véristes par la
musique ?… qui ne peut l’être ! …Et l’utilisation de la couleur locale ?
Iris de Mascagni et Madama Butterfly de Puccini pour le Japon, mais
également Fedora et Siberia de Giordano pour la Russie, Andrea
Chénier et Madame Sans-Gêne du même compositeur, pour la France, où
sont habilement employées trois chansons populaires de la Révolution ?… et les
espagnolades d’une Carmen (1875), remontant bien avant la floraison du
prétendu « Vérisme » ? et Donizetti qui utilise le jodler pour la couleur locale
de sa charmante Betly (1836) ?…
Et si
Giordano a surpris en incluant tarentelle et chanson typique dans sa Mala
Vita (1892), qu’a-t-on pensé lorsqu'en 1852 Luigi Ricci composa pour son
opéra-bouffe La Festa di Piedigrotta, (du nom d’un quartier bien connu de
Naples) une tarentelle devenue tellement célèbre et emblématique de Naples qu’on
ne sait plus d’où elle vient !
Le problème
s’intensifie lorsque l’on observe les styles des compositeurs appartenant à
la Jeune École, car on découvre alors un courant de musiciens refusant les élans
immédiatement évidents pour l’oreille de la nouvelle écriture, mais conservant
la caractéristique d’un orchestre-personnage omniprésent, mais à l’expression
fluide, continue, sans sauts violents, sans les contrastes de montées de
passion.
Parmi ces
compositeurs, rappelons Antonio Smareglia (1854-1929) dont l’opéra le plus connu
est Nozze istriane (1895) mais nous ayant légué cette curieuse Oceàna
créée au Teatro alla Scala le 22 janvier 1903 et qui fête également son
centenaire ! On en connaît l’ouverture (de proportions wagnériennes :
13’45’’ !) incluse par l’irremplaçable éditeur Bongiovanni dans son disque de
musiques de Smareglia, ainsi que la Suite tirée de l’opéra et que le même
éditeur a placé en complément de sa première intégrale des Nozze istriane.
Cette
« curieuse » Oceana, disons-nous, car le sujet autant que la musique –du
moins ce que l’on en connaît- sont particuliers. L’opéra italien ne nous a pas
habitués à ces génies de la mer, dieu des eaux, ondines et sirènes, conjurant
contre de pauvres personnages humains, mais la musique, très chaleureuse, est
d’une surprenante fluidité et délicatement changeante, comme si elle tentait
d’exprimer des couleurs tout en nuances, des états d’âme variant selon le gré
mystérieux de l’esprit humain ! Une douceur sans le « sucre » de la musique
vériste, une chaleur sans la passion débordante, un sourire sans rire, une ombre
sans obscurité, une inquiétude légère sans désespoir…pour tenter d’évoquer quels
sentiments, quelles images nous laisse l’audition de cette ouverture un peu
vaste comme l’évoque le titre de l’opéra…
Oceana
va d’ailleurs pouvoir surgir des flots de l’oubli et déferler à nouveau, grâce à
la série de représentations (commençant le 13 novembre 2003) que l’Opéra
National Croate de Zagreb offre en hommage aux compositeur istrien.
Alberto
Franchetti (1860-1942), pourtant ami et contemporain d’Umberto Giordano diffère
en son écriture, certainement à cause de sa sensibilité propre, mais également
grâce à sa formation en ces années de séjour à Munich et à Dresde. Comme l’a
fort bien résumé F. Ermini Polacci dans sa présentation du Cd que la casa
Bongiovanni lui a consacré, « Le problème de Franchetti fut, à la limite, celui
de ne pas avoir toujours réussi à amalgamer la dense vigueur du style allemand
avec le réalisme brutal de l’opéra vériste, et cela le conduisit le plus souvent
à travailler dans la réalisation consciente des idéaux wagnériens et de rester
ainsi un peu plus isolé de ses collègues de la “Jeune École”. ».
Germania (1802) est considéré
comme son chef-d’oeuvre mais on connaît également son Cristoforo Colombo,
commandé sur une suggestion de Verdi, pour fêter le 400ème anniversaire de la
découverte de l’Amérique…et tiré de son sommeil pour le 500ème !
Sa noblesse
d’âme vient jusqu’à nous à propos d’œuvres dont il avait pourtant acquis les
droits d’en faire un opéra et qu’il céda généreusement à deux collègues,
permettant ainsi deux chefs-d’œuvre : Andrea Chénier et Tosca !
Les chefs-d’œuvre se profilent
à l’horizon
Andrea
Chénier, précisément, sembla ne
choquer personne… il est vrai que l’œuvre appartient au « vérisme en perruques »
comme Manon Lescaut ou Adriana Lecouvreur. En revanche, Fedora
revient aux costumes contemporains à l’époque de sa création, petite pilule
que public et critique devaient avaler, au préalable… mais évite misère
humaine et sordide, quant à la qualité de la musique, on possède avec ces deux
dernières œuvres les opéras les plus charmeurs de Giordano.
Chénier
est un tableau coloré aussi vivement que le drapeau qu’on voit flotter le long
de ses quatre actes, au son de La Carmagnole, du « Ah ! ça ira, ça
ira ! » et de La Marseillaise. La passion s’y déploie mais
l’orchestration fouillée et subtile dessine aussi bien la délicatement ironique
gavotte du premier acte, que l’atmosphère de la Terreur ou que la poésie
(enflammée) des adieux à la vie de Chénier, au quatrième acte.
Malgré ces
nuances, ces contrastes, l’opéra, du début à la fin, est habité d’une même
ferveur, chaleureuse au possible, sincère : ce qui en fait tout le charme.
Fedora
est le seul « opera-giallo », comme disent les Italiens : le seul opéra-roman
policier du répertoire, en ce sens qu’il faut attendre le troisième acte pour
découvrir l’âme des personnages et leur motivation profonde… que pourtant la
musique, si tendre et passionnée, laisse entrevoir plus d’une fois. Comment en
effet concevoir de la méfiance envers un ténor à l’accent si sublime dans la
Romance « Amor ti vieta », irrésistible de charme, de chaleur, d’émotion !
Siberia,
dont il va être question bientôt, devait constituer avec les deux opéras
précédents la trilogie des opéras de Giordano les plus populaires.
Avec
Marcella, Giordano aurait, pour la première fois, tenté de se démarquer du
Vérisme enflammant la trilogie Andrea Chénier-Fedora-Siberia pour essayer
une voie nouvelle, toute d’élégance et de nuances, au lieu des riches couleurs
du Vérisme flamboyant. Hélas, Marcella fait aujourd’hui défaut dans les
reprises et enregistrements et nous manque pour évaluer ce changement dans la
courbe évolutive de composition d’Umberto Giordano. Tout au plus, les brefs
extraits gravés par les grands ténors Tito Schipa et Beniamino Gigli nous
laissent-t-ils un goût de Giordano-nouvelle-manière. L’ampleur des
phrases orchestrales traduisant la passion existe toujours mais l’écriture
vocale apparaît plus contenue, plus intime, dans ces deux extraits.
Impression
quelque peu confirmée par Mese Mariano,
délicat et lumineux Mois de Marie offrant une fort belle peinture
musicale des sentiments. Giordano trouve même le moyen d’inclure un bel
Intermezzo (accompagnant le coucher de soleil) dans un opéra durant 35
minutes !
Madame Sans-Gêne
se révèle certainement influencée par cette recherche de Giordano même s’il
s’agit d’une comédie. L’orchestration est une merveille d’expressivité,
doublant,
en quelque sorte, les personnages : la flûte souligne la malice de l’audacieuse
blanchisseuse, la clarinette ou les cordes parsèment discrètement leurs touches
de mélancolie remplaçant chant et paroles ! L’orchestre tisse une toile de fond
à la fois réaliste mais bonhomme, croisant ou superposant trois chants
révolutionnaires bien connus. Lorsque la passion prend le dessus, l’orchestre
demeure pondéré et laisse tout le lyrisme au chant.
Madame Sans-Gêne
nous permet
d’apprécier la versatilité de l’auteur, nous révélant une veine comique
peut-être insoupçonnée.
On a dit de
La Cena delle beffe
qu’elle révélait une volonté de retour à la conception vériste (on notera que
l’action se déroule au
XVe
siècle !), cela se comprend lorsque l’on entend les superbes phrases extrêmement
lyriques et chaleureuses que Giordano demande aux cordes vocales des interprètes
de ses personnages. Grandes phrases lyriques plutôt qu’airs proprement dits,
mais requérant une « vocalità impervia », selon les commentateurs de la RAI
retransmettant une éclatante reprise du Teatro Comunale de Bologne, c’est-à-dire
une vocalité impraticable, inaccessible, que l’on pourrait rendre par
l’expression française « impossible à chanter » ! Il est vrai que cette tension
de la ligne vocale, expressive, vibrante (mais pas bruyante) doit découler
naturellement d’un chant qu’il ne faut surtout pas forcer, cette tension,
disais-je, se conçoit bien dans cet opéra aussi resserré, concis, sans temps
mort et durant seulement 1h30mn.
Il Re
surprend, évidemment… car si dans Madame Sans-Gêne l’espièglerie se
manifestait par de délicates touches orchestrales, ici, l’ironie est dissonance
orchestrale ! Une fois revenu du choc que cette écriture produit, on ne peut
que louer le Maestro Giordano pour l’évolution de son style tenant compte du
fait qu’il composait l’œuvre en 1929… Une hardiesse parmi d’autres trouvailles
(plus plaisantes que séduisantes) : les paroles « Pom-pom-pom » du choeur
masculin rythmant les trois temps de la valse-chanson des enfants.
Les passages
lyriques existent toujours mais avec une orchestration plus « transparente » et
comme détachée du chant, alors que le vérisme privilégie les grandes phrases le
soulignant. Cette écriture moderne donne une belle fraîcheur aux airs qui ne
manquent pas d’ampleur, à défaut de séduction immédiate.
On doit à
Umberto Giordano un nouveau système de notation musicale permettant de résoudre
le problème des « instruments transpositeurs » (clarinettes, cors anglais,
trompettes) reproduisant d’autres notes que celles écrites sur les partitions.
Outre
diverses décorations nationales et étrangères, Umberto Giordano reçut la
nomination de Directeur artistique de la première firme discographique offrant
un catalogue exclusivement consacré à la mudique classique, la Società Italiana
di Fonotipia, fondée à Milan en 1904 et il contribua, par ses choix éclairés, au
prestique de la firme.
En 1939 il
écrivit la musique de scène pour le drame Cesare de Giovacchino Forzano
et le reste de ses compositions seront des mélodies pour soliste et piano, des
sérénades populaires pour chant et orchestre, quelques pièces sacrées ou de
circonstances. En 1946, il dirigea au Teatro Lirico de Milan son chef-d’œuvre
Andrea Chénier, dont on fêtait le cinquantième anniversaire !
Le jeune
homme aux imposantes moustaches alors à la mode devint un homme mûr à la
prestance qui en impose encore aujourd’hui, comme le témoignent les portraits.
Humain, courtois maître de lui-même, le Maestro correspond bien au terme de G.
Confalonieri de « gentleman européen ».
Il s’éteignit
le 12 novembre 1948 et deux jours plus tard, une foule immense l’accompagne au
célèbre Duomo, alors que l’orchestre du Teatro alla Scala fait entendre
le poignant Intermezzo de Fedora, reprenant l’irrésistible air du ténor
Loris Ipanov : « Amor ti vieta ».
La ville de
Foggia conserve le souvenir de son illustre enfant par le conservatoire qui
porte son nom, par le Teatro Giordano où Mala Vita a été réssuscité en
2001, et par une jolie place avec la statue du Maestro, entourée de celles
représentant ses opéras. Milanais d’élection, Umberto Giordano devait acquérir
ce qu’il nommera la Villa Fedora à Baveno, dominant la rive piémontaise
du fameux Lac Majeur, immense et sauvage de romantisme échevelé, autant que le
Lac de Côme, séjour de Bellini et Donizetti (chacun sur une rive !) est amène de
romantisme charmant.
Tous les
étés, les jardins de la Villa où le Maestro alternait, selon sa méthode,
composition et carambolages de boules de billard (!), devient le théâtre du
Festival Umberto Giordano e il suo tempo.
S
i b e r i a
C’est Luigi
Illica, l’un des librettistes les plus importants de la Giovane Scuola, qui
suggéra à Giordano de mettre en musique La Donna, l’amante, l’eroina,
comme s’intitulait alors Siberia. Le contrat fut signé avec l’éditeur
milanais Sonzogno en mars 1900 et la composition s’acheva dans la seconde moitié
de l’année 1903. La création eut lieu le 19 décembre, le Teatro alla Scala
s’étant assuré la collaboration du trio de prestige de l’époque : Rosina
Storchio, le ténor Giovanni Zenatello et le baryton Giuseppe De Luca. D’abord
réservé, l’accueil du public devint de plus en plus chaleureux au cours des
représentations successives. Plutôt que de passer en revue les louanges des
critiques, signalons l’avis d’un compositeur non italien et celui d’un
compositeur italien et ami de Giordano. Gabriel Fauré écrivait : « Je ne crois
pas exagérer en disant que le deuxième acte de Siberia prendra
certainement place parmi les pages les plus singulières et les plus captivantes
que la musique dramatique moderne puisse offrir. »
L’ami
Franchetti sera aussi enthousiaste, comme il l’écrivait dans une lettre à Luigi
Illica : « Comme beauté musicale, Siberia est le plus beau travail de ces
dernières années, et je dis ceci avec la même sincérité avec laquelle j’ai
déclaré ne pas aimer l’Andrea Chénier [!] (…) Giordano est
indubitablement le maestro de la “Jeune École” qui donne le plus
d’espérance pour l’avenir ».
Au cours de son glorieux tour du
monde, Siberia aborda pour la première fois en France, à Paris (Théâtre
Sarah-Bernhardt), le 4 mai 1905 au cours d’une prestigieuse saison organisée par
l’éditeur Sonzogno et comprenant : Andrea Chénier, Fedora et Siberia ;
Adriana Lecouvreur de Cilea, L’Amico Fritz de Mascagni, Zazà
de Leoncavallo, Chopin de Giacomo Orefice et -perdu entre tous ces
véristes ! - Il Barbiere di Siviglia.
Traduit en français, Siberia
franchit les portes de l’hermétique Opéra de Paris le 9 juin 1911… portes qui ne
s’ouvraient plus à un compositeur italien depuis Giuseppe Verdi !
Les classements aux frontières
poreuses sont fort commodes, on l’a vu à propos de l’étiquette « Vérisme »…
De même, on inclut Siberia en une sorte de trilogie que l’opéra formerait
avec deux compositions immédiatement précédentes : Andrea Chénier et
Fedora. Il est vrai qu’il s’agit des trois opéras de Giordano les plus
populaires et les plus interprétés… (à une certaine époque, du moins). Une
différence sépare pourtant Siberia des deux autres, différence de temps
(voir la liste des opéras de Giordano, plus bas), tout d’abord, mais aussi une
différence de style. On trouve en effet dans Siberia les premières
dissonances à l’orchestre, utilisées pour exprimer une dégradation de
l’atmosphère, un paroxysme négatif comme celui de l’excès de désespoir, pour
ainsi dire. Il y a aussi cette curieuse impression que parfois l’interprète
semble chanter faux, tant se fait sentir la dissidence entre la ligne de chant
et la partie d’orchestre. On peut appeler cela le modernisme de Giordano
qui évolue avec son époque, comme le feront Mascagni et Cilea, par exemple,
capables de s’éloigner de ces mélodies si chaleureuses (pour le premier), voire
sirupeuses (et délicieuses), pour le second.
Siberia
diffère donc en cela de Chénier et de Fedora qui charment pour
ainsi dire continuellement nos oreilles ! Il faut dire aussi que le
sujet est particulier dans le genre sombre et négatif, insistant sur la
souffrance constante que les condamnés à la Sibérie pouvaient connaître. A cet
égard, la célèbre phrase que Dante Alighieri a placée à l’entrée de l’Enfer
qu’il imagine visiter en compagnie du poète Virgile revient à l’esprit :
« O voi ch’entrate lasciate ogni
speranza »
(ô vous qui entrez, abandonnez tout espoir).
Il fallait personnifier une région
aussi impropre à la vie humaine, Giordano l’a fait, sur les traces du
poète-librettiste Luigi Illica qui déjà littérairement parlant a peint une
description qui donne le frisson (air du ténor Vassili, acte II). Giordano a
trouvé un thème musical puissant, évocateur, glacial, qui, joué piano ou
forte, sonne toujours implacable ! Il apparaît dans le prélude du
deuxième acte et parcourt le reste de l’opéra, à chaque occasion où l’on
risquerait de repousser, même à peine, la phrase de Dante.
La conduite de l’écriture diffère
aussi en ce que l’on a plus de mal à cerner les « morceaux fermés » (airs,
duos…) et d’ailleurs le compositeur ne semble pas chercher à en faire. Comme il
ne cède pas non plus à la tentation de faire durer l’éventuelle reprise par
l’orchestre de beaux thèmes, technique pourtant chère à l’opéra « vériste » !
Ici, les épanchements sont contrôlés, vite réfrénés et l’on passe au sentiment
ou à l’action suivante. C’est d’ailleurs sans temps mort que se déroule l’opéra,
loin d’atteindre les deux heures moyennes de durée d’exécution.
L’écriture vocale est intéressante
car elle conjugue les grands élans affectionnés par la fin du XIXe siècle, aux
écarts vertigineux, véritables « sauts » inattendus dans la gamme, mais jouant
évidemment un rôle dramatique.
Les chanteurs doivent également
« passer » un orchestre prépondérant et fouillé, un orchestre-personnage… qui ne
doit pas non plus les noyer !
On attend, à ce titre, le nouvel
enregistrement de l’opéra, qui devrait rendre justice à l’orchestre, trop en
arrière dans l’exécution concertante de la RAI, la seule disponible
actuellement. La fusion pratiquement magique du chant et de l’orchestre
appartient évidemment au théâtre...
En somme, chanteurs et orchestre
ont ensemble la lourde tâche de devoir tenter d’exprimer l’immédiateté de
la musique qui cherche à traduire le plus rapidement et le plus fidèlement
possible le sentiment exprimé par le texte… Du reste, c’est peut-être là une
définition du vérisme ?…
L’intrigue et la musique de SIBERIA
[Les durées indiquées
sont celles de l’exécution de la R.A.I. en 1974]
ATTO PRIMO
- LA
DONNA
[26’20]
A Saint-Pétersbourg, dans la première
moitié du XIXe siècle.
C’est le mois d’août, à l’aube du jour de
la fête de Saint-Alexandre.
(La rotonde de l’élégant hôtel particulier
offert par la prince Alexis Frouwor à Stephana , la « Belle Orientale »).
Pas une
ombre de prélude, pas d’orchestre du tout !… Hors scène, un chœur de moujiks
commence d’emblée l’opéra, de manière mystérieuse, insolite. D’abord recueilli,
le chœur s’intensifie sur les paroles relativisant l’orgueil humain. L’orchestre
attaque alors une vive musique soulignant l’anxiété de la bonne Nikona (mezzo-s.)
qui ne voit pas revenir sa maîtresse. Un motif plus sinueux accompagne l’entrée
du Signor Glèby (bar.) au « sourire énigmatique, note Illica, entre l’ironie et
le débonnaire. » Il veut parler à Stephana et malgré l’opposition de Nikona,
finit par découvrir son absence. Il se fait menaçant, et la musique également…
Il pense qu’elle a un amant de cœur, mais voici Ivan le majordome (tén.) qui
annonce le prince… Il entre, accompagné d’officiers, de nobles ou d’élégants
personnages haut placés dans la finance. Glèby, plus ambigu que jamais, décide
de sauver la situation. Il suggère une aubade qui sera accompagnée par « le plus
noble instrument, / le plus antique et le plus moderne… », c’est-à-dire
l’épée !
Il entonne
donc la Mattinata « O bella mia », jolie mélodie caressante
reprise par tous les autres, tandis que l’orchestre souligne de petites
sonorités espiègles, l’ironie de la courtoisie exagérée de ses paroles. Il a
réussi à faire ainsi patienter le prince et propose même une partir de cartes !
(Ils sortent).
Stephana,
« La Belle Orientale », entre enfin, sur un souffle de harpe !
Elle
rassure la pauvre Nikona et pense plutôt à son bien-aimé : qu’il n’apprenne
jamais qui est sa Stephana ! Elle se laisse aller à l’évocation de son bonheur,
de cet amour qui la fait renaître. Une Aria au beau motif dont la
simplicité reflète la sincérité de ses sentiments.
Glèby entre
et commence à parler d’une certaine affaire… mais Stephana l’interrompt : cette
vile chasse à l’or lui donne la nausée – l’orchestre souligne gravement ses
paroles. Mais l’inébranlable Glèby lâche un cynique « Tutto qui ? » (c’est
tout ?) et l’orchestre répète et décline avec ironie les trois notes
accompagnant ces paroles méprisantes. Dans une tirade ironique, il explique
qu’un tel orgueil ne sied pas à des gens comme eux, venus du fond de l’abîme !
Que demandent-ils, en fait ? une vie relativement aisée et confortable… Cette
définition misérable désespère Stephana mais Glèby se fait menaçant, disant
qu’il l’a découverte et qu’il la tient dans son poing. Il déclare savoir qu’elle
aime… ou plutôt qu’elle croit aimer ! et conclut, odieux : « Cet amant ?… Il est
comme moi, / s’il est pauvre ; s’il est riche, il est comme Alexis !…/ Il attend
l’heure !… ». L’orchestre est dissonant d’ironie.
L’entrée
d’Alexis adoucit l’atmosphère musicale, le thème très tendre décrivant son amour
pour sa « Stephy » évoque fortement un motif de la très sentimentale Giuditta
de Franz Lehar ! Il lui offe un somptueux bracelet et ils sortent ensemble.
Ivan
introduit un jeune officier qui ouvre les bras à Nikona. C’est son filleul
Vassili (tén.). La musique qui lui donne Giordano souligne à merveille sa
franchise, sa spontanéité, sa candeur même, lorsqu’il parle de sa mère à Nikona
ou de sa touchante certitude de n’être jamais tué par l’ennemi turc ! Elle
devine qu’il a le cœur occupé… il fait alors le portrait de celle qu’il aime,
« pauvre et honnête ». Il lui dit de regarder par le balcon si son régiment
passe dans la rue (petite marche-illustration à l’orchestre !).
Stephana
entre et reconnaît Vassili… pensant aux infâmes paroles de Glèby, elle accuse
l’honnête Vassili de savoir et d’avoir attendu son heure !
Vassili
proteste en une belle tirade définissant son sentiment. Stephana l’écoute,
troublée, éperdue… Elle tente de l’éloigner, en l’encourageant à suivre le
chemin de la gloire. En vain, elle lui demande de l’oublier : l’amour qu’il
éprouve pour elle irradie tout autour de lui ! L’orchestre se passionne comme
son chant qui culmine sur une belle phrase bientôt reprise à l’unisson, montrant
que Stephana ne lutte plus !…
Le prince
Alexis les surprend et demande à « Stephy » qui est « celui-là » ; elle répond
avec exaltation, précise Illica : « Il mio amante ! ».
Il insulte
Stephania mais Vassili s’interpose en le traitant de « Vigliacco ! », ce qui en
italien signifie bien plus que sa traduction de « lâche », mais aussi : vil,
abject.
Ils se
battent : tumulte dans les cordes, bientôt poussé au paroxysme (le prince est
blessé et les amis affrontent Vassili, le premier à être surpris par la rapidité
de la scène). Un bref silence, puis éclate à l’orchestre
le thème de leur amour (la phrase culminante) mais plus grave et comme désespéré
face à l’irréparable…
De fait,
Vassili jette au loin son épée, puis résigné, s’exclame avec un aigu final
interminable : « O gloria, addio. »
L’orchestre prolonge à peine sa note superbe de bonheur et de désespoir !
Le rideau tombe.
ATTO
SECONDO - L’AMANTE [28’09]
Preludio.
Lugubre début… la
clarinette basse dessine une atmosphère vide d’espérance : c’est le thème de « Siberia »,
la Sibérie, pays sans espoir et sans vie qui s’étend là, à partir de la
frontière… L’orchestre fait entendre le thème d’un célèbre air russe, Les
Bateliers de la Volga, puis reprend celui de Siberia… On croit entendre
siffler le blizzard…
Les deux
thèmes précédents continuent de se croiser, parfois avec un peu plus de ferveur…
La frontière entre la Sibérie et la Russie.
La « Poloo-tappa », l’étape [“Poloo”?] de
Omsk à Kolyvan.
(A droite,
marquant le sentier sur la neige, paraissent quelques paysans, des marchands
ambulants, des mercières et des babas [femmes de paysans russes –avec souvent
nuance de mépris : bavardes, commères] étrangement couverts de « shube »
bizarres manteaux de peaux de chèvre, et avec des « kottee » [grosses chaussures
d’osier tressé] aux pieds).
Un chœur
plutôt enjoué de paysans et de revendeurs attend le passage de la colonne des
forçats. Giordano émaille ce chœur de touches de couleur locale discrètement
russe.
L’atmosphère
musicale s’attendrit : une jeune fille, « La fanciulla » (sop.), survient et
demande si la colonne de forçats est déjà passée. Elle raconte comme elle vient
de faire un long chemin avec son jeune frère pour revoir une dernière fois son
père qui doit passer avec la colonne se rendant aux mines.
On entend un
chœur lointain : la triste chanson russe (LesBateliers de la Volga). Le
fait que le chœur chante a cappella (sans accompagnement orchestral) fait
évidemment plus « vrai » (vérisme oblige !), en tout cas plus saisissant.
Les paroles annoncent les souffrances et l’absence d’espoir que seule la mort
tronquera !
Le choeur se
rapproche… l’orchestre reprend forte le thème russe.
Le médecin et
le forgeron (pour les chaînes) exécutent en même temps leur visite… sur une
musique indifférente comme le fonctionnaire aux lunettes d’or qui entre. Il tend
au capitaine les lettres adressés aux condamnés qu’il va appeler, par leur
numéro. On voit les malheureux s’animer à cette attente. Un jeune homme
s’avance… et se trouve être le premier appelé, mais terrible fausse joie, on lui
annonce qu’à cause d’un « mot obscur », on ne peut lui donner la lettre de sa
mère ! il s’effondre et reste immobile, le visage caché dans son manteau…
Les cordes
suggèrent un mouvement serré puis on entend tinter les grelots d’une troïka :
elle porte une femme recouverte de fourrures : c’est Stephana. Elle demande le
« condannato 107 » et présente une lettre au capitaine. Elle cherche Vassili…
ils s’appellent, éperdus : « Stephania ?!… Vassili ! ».
Soutenue par
les violons aussi passionnés et chaleureux que son chant, Stephana explique
qu’elle a donné son nid doré aux pauvres, « plus de joies viles ni de honte »,
elle est ici « seulement pour l’amour, pour la douleur ».
Réponse
quasi incrédule de Vassili croyant recevoir ainsi la Pitié sainte et divine, la
clémence des anges, le résultat des prières que sa mère décédée fait pour lui !…
Aria
Vassili. Il se ressaisit, lui déclarant qu’elle ne connaît pas la vie qui
l’attend et face à la réponse déterminée de Stephana, il lance son grand air, le
passage le plus connu de l’opéra, reprenant le thème de la « Sibérie », sur les
violoncelles aigres : « Orride steppe ».
Des steppes
torrides l’été, avec « d’âpres sentiers d’épines et de cailloux ! », devenant
marécages (l’orchestre imite le pas englué dont il parle) à la saison des pluies
(figurée par les notes aiguës des violons). Un été maudit, auquel succède un
hiver dont le vent ne cesse jamais !… « Embusquée dans les sommets, la mort
guette, torve, livide et implacable ! », ici-bas dans les vallées, les
hurlements des loups répondent aux pleurs humains.
Il conclut
alors, terrible – alors qu’éclate à l’orchestre le thème menaçant et glacé
d’absence d’espoir :
« Questa è la
SIBERIA !
Torva è la miseria !
Bara mesta
di tetri scheletri
maledetta dal ciel ! »
(C’est cela, la Sibérie ! / Farouche est la
misère ! / Triste bière / d’obscurs squelettes / maudite du ciel ! »
L’orchestre, gravissime, reprend le thème
« Siberia » forte…
Le paysage
musical s’éclaircit pourtant grâce à l’amour Stephana, certaine qu’aucune
bassesse ni souffrance ne viendront la jeter à terre. Vassili s’écrie « A
présent tout le ciel vient à moi et divin, rayonne en toi. ». Au moment où leur
voix s’unissent, éclate une inattendue reprise chorale du thème russe (Bateliers
de la Volga), créant un brusque contraste : Stephana et Vassili ne feront
plus que ponctuer, taisant leur bonheur par pudeur… le choeur poursuit, a
cappella puis s’éloigne en chantant toujours le même motif désolé.
L’orchestre,
apaisé, reprend le motif du duo… le choeur chante encore une fois le thème russe
que l’orchestre reprend piano tandis que le rideau tombe, sur un accord
sobre et délicat.
ATTO TERZO - L’EROINA [41’54]
A l’intérieur de la « Casa di forza » [Camp
de travaux forcés] dans les mines de Transbaïkalie.
(C’est le Samedi-Saint ; un soleil de
printemps tiédit un peu l’air. L’Inspecteur de Section se promène, les mains
derrière le dos. Un invalide, boîteux et âgé, regarde l’Inspecteur et la maison
N°. 107).
Les cors introduisent un thème
joyeux bientôt repris par un charmant chœur de femmes invoquant le Samedi-Saint.
« L’invalido » s’approche des femmes, sur une musique grotesque et bon enfant à
la Fra Melitone de La Forza del destino ! Il demande des chiffons pour
faire le drapeau national. Elles lui désignent alors le numéro 107, « (avec
intention) », précise Illica, en disant « demandez, là ! Là, il y a de
tout ! » ; il s’y rend en disant : « Oh langues crachent-le-mal ! ». Stephana
est sur le pas de la porte, il lui parle et elle rentre puis sort avec des
chiffons. Les femmes se réjouissent d’avance du spectacle théâtral de la soirée
et d’ailleurs on voit des forçats affairés aux préparatifs.
L’Invalido révèle à Stephana que
le drapeau est un prétexte, en fait, un certain condamné numéro
quatre-vingt-dix-huit souhaite lui parler. Elle refuse et donne une pièce au
pauvre homme. Les femmes repassent et répètent : « Là, demandez ! Là, on trouve
tout ».
Stephana les salue avant de
rentrer mais cela n’empêche pas leurs commentaires négatifs sur la prétendue
superbe de Stephana. Elles se dispersent puis finissent par sortir. Giordano
s’amuse à souligner leur jalousie par des sonorités espiègles au possible.
Vassili survient et lit un
déchirement dans les yeux de Stephana, il croit qu’elle pense à la liberté
rêvée ! Elle répète, sur le même ton : « La libertà !… » , puis explique
vivement que ce n’est pas pour elle mais pour lui qu’elle pense à cela ! Elle
rappelle quelle torture elle lit tous les jours dans ses yeux… Vassili la
rassure, son malheur finit lorsqu’il arrive dans ses bras ! Extatique, il
s’exclame alors :
« Dans tes yeux est la
fascination ;
ta bouche est le mois de mai !
Si tu me donnes un baiser j’embrasse l’odeur aiguë
de toutes les fleurs. »
C’est presque un Duetto,
sur une musique transfigurée, où ils laissent s’exprimer leur bonheur… Mais ils
sont bientôt rappelés au travail par l’inspecteur…
Froide, la clarinette basse énonce
le thème « Siberia ! », et l’orchestre frémit, probablement comme les amants,
rappelé à la réalité. Le thème « Siberia » se répand dans tout l’orchestre… Les
forçats se mettent en position et recréent les châines humaines qui vont
s’atteler à diverses tâches.
Un roulement de tambour et une
sonnerie de trompettes appellent au garde-à-vous les officiers et le personnel
de la « casa di forza » : le gouverneur paraît et commence son inspection… les
femmes se rassurent car leurs maisons sont en état… l’inspecteur déclare n’avoir
aucun rapport à communiquer au gouverneur qui s’éloigne.
Stephana sort de sa cabane avec
des seaux vides, à la vue d’un homme en costume de forçat, « elle pose les seaux
et se passe la main sur le front comme pour chasser l’horrible vision », note
Luigi Illica. C’est Glèby !
Glèby venu travailler ici dans le
seul but de la retrouver ! Il lui dit qu’il y a une possibilité de fuir… (le
thème « Siberia » passe rapidement à l’orchestre, comme pour le contredire !) un
secret légué par un condamné mourant…
Il lui désigne le puits vide, un
peu plus loin : le fond est sec et un passage conduit au-delà des enceintes,
hors de la portée des fusils !
Il ajoute : « Mais à quoi bon
sortir d’un abyme / pour me jeter dans un autre sans fond ? ». Il était sur le
point de fuir et le nom de Stephana parcourut son âme comme un frisson, il
recula… décidé à la revoir !
L’orchestre vivement animé durant
son récit s’illumine à l’exclamation de Glèby : « Stephana ! Stephana ! »… Il
rappelle à la malheureuse combien il s’est « jeté avec elle, naufragé, dans la
mer de volupté… », concluant avec ferveur :
« Si je fus vil, avec toi, pour
toi je le fus.
Le destin nous unit ! »
Elle le
repousse avec mépris, mais il se fait plus pressant… et cherche à l’attirer en
lui rappelant sa splendeur passée : « Tutto, tutto riavrai, se tu mi segui ! »,
(Tout, tu auras de nouveau tout, si tu me suis !). Il n’a pas fini sa tirade
passionnée que l’on entend au loin le thème « Siberia » par Vassili et le chœur
des condamnés, scellant l’échec de Glèby !
Stephana se
répète alors à elle-même : « Infinito dolore ! / Per infinito amore ! ».
Aria Stephana.
Elle répond à Glèby combien est chargé de honte ce souvenir de sa beauté et de
sa splendeur :
« Tu es damné, condamné
à ne jamais ressentir
la douceur des larmes et de la douleur.
L’extrême enchantement de ma vie
Resplendit là-bas… Ecoute !
Ces pleurs sont l’amour ! »
Oui, « quel pianto è amor ! »
s’exclame Stephana, dont l’extase culmine sur un bel aigu…
Luigi
Illica place ici une longue didascalie montrant Stephana ouvrant les bras vers
ce ciel triste, vers ce pâle soleil, le visage illuminé : « son visage encore
beau malgré les souffrances, son beau visage d’héroïne passionnée exprime tout
ce sentiment de gratitude féminine à ce lieu où elle a pu finalement aimer. ».
Stephana poursuit – Glèby est
complètement oublié ! - :
« A te portai l’anima mia, o
Siberia :
A toi j’ai apporté mon âme, ô Sibérie :
toi, comme une mère, tu m’as tendu les bras
et prodigue dans ta misère,
tu m’as donné le bien qui m’a appris à aimer !
C’est pourquoi ici je vis et sens le soleil et les fleurs,
tes couchers de soleil sont chaleureux comme les aurores
et dans cet air imprégné de douleurs,
je respire le triomphe de l’amour ! »
Le bonheur
de Stephana culmine sur cette expression : « il trionfo dell’amore ! »,
couronnée par un aigu resplendissant ; puis l’orchestre se lance dans la reprise
du thème rayonnant de son air mais s’interrompt bientôt. Glèby est toulours
là !
Nullement
impressionné par ce qu’il vient d’entendre, il l’interroge : « C’est ainsi que
tu crois me fuir ? Il finit par comprendre qu’elle ne le suivra pas mais se
fait tout de même préciser que c’est par amour pour Vassili… Il tente alors de
s’emparer d’elle mais elle va appeler au secours ; il s’éloigne avec « un geste
de menace cruelle », note Illica, que Giordano traduit en accords dissonants.
Le chœur des forçats au
loin répète le thème « Siberia ».
Le gouverneur fait cesser le
travail, la chaîne vivante revient et l’orchestre joue seul, acompagnant ce
retour sur un motif plutôt gai.
Glèby revient avec un groupe de
forçats et provoque le couple en tentant de se faire inviter au repas pascal !
- dégradation à l’orchestre – Vassili est glacial mais Stephania réussit à le
faire rentrer dans leur maison. L’échec de Glèby est accueilli par des moqueries
que le groupe va intensifier au point d’exciter l’odieux personnage qui fait une
autre tentative…
Une ballade ironique
retraçant la vie de Stephana : de la jeune fille qui sut conserver « un reste
d’innocence » (!), à la femme, splendide, mais passant de bras en bras !
En somme, reine d’un grand monde
de « Brève jouissance profonde et inféconde ». Mais voilà que « la farfalla
bella », le beau papillon se brûle les ailes, prise par un amant de cœur :
« le fruste officier / qui paya les pots cassés… ». Même la vague de passion
-quand il l’évoque- passant à l’orchestre sonne faux !
Vassili n’y
tient plus, Stephana, qui depuis l’intérieur de la baraque a entendu, tente de
le retenir mais il la repousse avec dégoût et lui révèle « sa torture
humaine ».
Arioso Vassili.
L’orgueil masculin, surgit une fois encore, naturel mais mesquin, à côté de la
noblesse de « l’Eroina », comme dit Illica, qui a su tout lui sacrifier.
Ses paroles
sont terribles, plus encore que celles de Glèby, pourtant viles.
« Je te regarde et vois, et écoute
tous les baisers que tu as donnés,
tous les baisers passés
sur ton visage !
Les yeux avec
lesquels tu me regardes racontent les baisers !
La volupté !… Les spasmes
que tu reçois et donnes !
Je vois mille bras
autour de toi ! Par miriades !…
Des forêts de tentacules !…
Sur la poitrine ! Dans les cheveux !…
Sur ton front,
je vois toutes les hontes
et ma lâcheté !
Un mot de Illica vient expliquer
cette inattendue bassesse de Vassili, la didascalie « (disperato) », oui,
Vassili est désespéré et Giordano traduit le passage de la colère méprisante (à
la musique menaçante), en un désespoir bien humain (à la musique plus
chaleureuse) :
« Je me croyais fort ! Non, je ne
le suis pas
parce que mensonge est l’oubli !
Eternelle est la honte !
Le passé revient par la volonté de Dieu
qui refuse son pardon !
A présent ceci est mon sort !
Et mon unique espoir ?… La mort ! »
La malheureuse Stephania est
éperdue, mais au nom de « Dieu » invoqué par Vassili elle se ressaisit,
déclarant que si toute la boue de la terre avait passé sur son front, Dieu, en
cette heure, face à ses larmes présentes, aurait pardonné…
Vassili tombe à genoux devant
elle, « Dans la boue ! » précisément, s’écrie-t-il, et lui demande pardon avec
la flamme que la Jeune École savait mettre…
Mais, terrible réminiscence, on
entend la voix de Glèby chantant la « Mattinata » du premier acte ! Illica se
plaît à signaler qu’il n’y a plus « le tintement argentin » des épées d’élégants
officiers, mais l’accompagnement du « choc sinistre des chaînes des condamnés »
ameutés par le vil Glèby.
Au comble de l’exaspération,
Stephania surgit violemment et se lance sur eux, au cri de « Par la croix du
Christ !… », expression si forte que jamais la censure n’aurait laissé passer à
l’époque de Bellini ou de Verdi !
Arioso Stephana.
« Tu veux savoir ? lance-t-elle à Vassili, Qu’il en soit ainsi ! ». Avec une
force incroyable elle saisit Glèby et l’entraîne vers Vassili en le tenant
rudement par le col. Elle le présente alors comme :
« Mio primo amante !!!… »
Son premier amant ! et Illica
souligne de trois points d’exclamation. Son amant qui l’a vendue ! qui a vendu
ses baisers, ses caresses…
Elle désigne ensuite Vassili :
L’amour eut pitié de moi ! J’ai
aimé !…
A cet amour compatissant je me suis offerte !…
Et pourtant, le jour de mon saint martyre,
voici le vil destin de ma vie
revenir, ici, encore !… Passer sur mon âme !…
Mais non !… Il n’y a rien entre nous !
(en
secouant terriblement Glèby)
Je te regarde et te défie !
(et elle
se tourne, encore fière et énergique, vers les forçats)
Celui-ci, qui est-ce ?… Son nom ?…
(Elle
arrache le béret couvrant le front de Glèby et montre la marque du bourreau,
signe d’infamie)
Usure et faux !
(Elle
regarde Glèby un moment dans les yeux puis le repousse lojn d’elle avec horreur).
»
Un tortueux thème orchestral
accompagne l’amère confession-accusation de Stephana : l’orchestre se décompose,
ses sonorités sont froides, à la limite de la dissonance comme jamais elles ne
le furent dans l’opéra… Elles ne soulignent plus le chant mais le « doublent »,
tandis que la ligne de chant de Stephana atteint sans progression des aigus
vertigineux.
Les forçats, « surpris et
subjugués », note la didascalie, font une ovation à Stephana. Sous
l’humiliation, Glèby « hausse les épaules en souriant avec une grande
philosophie », écrit Illica, et rentre dans les baraquements.
Pasqua !
Quinze lignes de didascalie vont décrire la mutation qui s’opère
à partir de ce moment. Des sons plus ou moins distincts montent dans l’air,
annonçant la Résurrection, la nuit du Samedit-Saint. Le soleil se couche, les
tambours roulent au loin, on entend les cloches des villages voisins… Tout ceci
se précise en « un crescendo quasi surnaturel », écrit Illica. Tout à coup et
comme par enchantement, brillent toutes les lumières préparées par les
baraquements. Enfin, « Une profonde exaltation d’une indéfinissable consolation
transparaît en tous », comme si les crimes s’effaçaient autant que les peines.
Giordano dessine cette montée de
ferveur avec une sobriété évidente mais qui n’empêche pas la puissance
évocatrice.
Le gouverneur surgit et
s’exclame : « Cristo è risorto ! Le Christ est ressuscité ! », en embrassant le
condamné le plus proche de lui.
Tous répètent : « Cristo è risorto ! ».
Une grande sérénité est donnée par
le son des cloches qui jouent un air et derrière elles, l’orchestre ondoie,
apaisé… On note la savante et curieuse liquidité des violons, créant à
merveille l’atmosphère.
Un orchestre de balalaïkas attaque
un air russe qui va s’accélérant.
Stephana parle bas à Vassili puis
lui désigne le puits mais Glèby les épie derrière une fenêtre… Ils se décident…
on crie « Aux armes ! », les tambours roulent et l’orchestre traduit
littéralement, pour ainsi dire, les pas précipités de la fuite.
Les bois citent à peine,
effleurent le thème « Siberia », comme pour rappeler insidieusement la certitude
de l’impossible salut… Puis on entend des coups de feu, et cette fois retentit
clairement le thème « Siberia », maintes fois exécuté par les trompettes, mais
rapidement, comme par dérision pour souligner que l’on n’échappe pas à la « Siberia » !
Un gémissement et un cri déchirant
annoncent l’échec : on porte Stephana, la poitrine sanglante…
Le gouverneur s’écrie : « Ah !
malheureuse ! », elle lui répond en vacillant : « Ils ont des armes pour tuer /
tes soldats », puis elle s’effondre. Les soldats retiennent Vassili mais le
gouverneur leur ordonne de le laisser aller vers elle.
Une grande phrase orchestrale,
profondément chaleureuse, introduit la consolation de Stephania :
« Ne pleure pas !… Soulève-moi !…
Le mot sublime : « Liberté »,
germe dans mon cœur… à présent, mourante…
(d’une
voix toujours plus faible)
Et je meurs heureuse
de me sentir rachetée, parce que je t’offre amour et vie…
(et aidée
par Vassili, elle baise la terre)
Sibérie, terre sainte
De larmes, et d’amour !
Et à présent… sur ton cœur !
(elle pose
la tête sur la poitrine de Vassili. Puis elle ferme les yeux comme pour se
recueillir et mourir sur son cœur et dans la pensée de son amour…)
Avec toi ! Ici ! Toujours !…
(en
sentant les larmes et les baisers de Vassili sur la main qu’il tient serrée dans
la sienne)
Les violons rappellent son aria à ses
paroles « Siberia, terra santa / di lagrime, e d’amore ! »… Puis, sur une note
tenue, légérissime, les violons frémissent doucement tandis qu’on réentend, d’un
seul coup, le choeur entonnant Les Bateliers de la Volga, sans autre
accompagnement.
Vassili s’écrie : « Stephana !
Stephana ! » et Giordano a la bonne idée de faire continuer durant ses cris
désespérés, le chant de la Volga, comme pour dire que rien, même la
douleur extrême, n’interrompt leur damnation sur terre.
L’inspecteur, rigide par la
position de salut militaire mais aussi pour souligner la terrible continuation
des choses, annonce au gouverneur l’arrivée des nouveaux condamnés… (alors que
le drame des précédents n’est même pas achevé !…). Le gouverneur se secoue et
fait signe à l’inspecteur de le suivre vers la nouvelle colonne. Sur un signe du
caporal de service, les soldats arrachent Vassili au corps de Stephana et
l’obligent à rentrer dans sa baraque. On dépose la grise couverture mortuaire
sur Stephana. Le caporal en retranscrit le numéro 107…
A tutta forza,
éclate alors à l’orchestre le thème terrible, implacable de « SIBERIA »
Triomphe de l’amour sur la
perpétuité et l’éternel désespoir ? …ou de la terre damnée où s’épuise la
douleur humaine ?
Les enregistrements de SIBERIA
Aucun
enregistrement officiel ne fut réalisé pour l’œuvre et seules les firmes privées
se préoccupèrent de mettre à leur catalogue celui de la RAI (1974).
L’infatigable maison M.R.F. avec,
comme toujours, un riche commentaire accompagnant le livret, proposa ses LP peu
après la reprise de la RAI (M.R.F.118).
En complément, la firme proposait
l’enregistrement de la reprise moderne de Il Re, captée au Teatro
Giordano de Foggia.
Une autre firme « privée » :
Unique Opera Records, dont le pressage n’était pas le fort, diffusa également
cet enregistrement (U.O.R.C.198).
Opera D’Oro OPD 1375 (2Cd)
Opera D’Oro propose
aujourd’hui sur Cd l’enregistrement de la R.A.I. de 1974.
Les interprètes principaux sont :
Luisa Maragliano (Stephania)
Amedeo Zambon (Vassili)
Walter Monachesi (Glèby)
Mario Guggia (Ivan)
Plinio Clabassi (Il Governatore)
Guido Mazzini (L’Invalido)
Orchestra Sinfonica e Coro di
Milano, della Radiotelevisione Italiana
Maestro Concertatore e Direttore :
DANILO BELARDINELLI.
Milano, R.A.I., 5 febbraio 1974.
**
*
1999 -
Volontè, Zelenskaia CDNO1052
Sous ces
références succintes se cache un écho de la reprise du Festival de Wexford en
1999, probablement diffusée par la Radio irlandaise et vraisemblalbement incluse
sans vergogne dans le catalogue de cette mystérieuse firme CDNO (qui le
commercialise sur Internet !).
Voici la
distribution (presque complète) indiquée par le site du festival :
Stephana :
Elena Zelenskaia
Vassili : Dario Volontè
Glèby : Walter Donati
Il Principe Alexis / Il Cosacco : Massimo Giordano
Walinoff / Il Governatore : Eldar Aliev
Il Capitano / L’Ispettore : Frantisek Zahradnicek
Ivan / Il Sergente : Darren Abrahams
Il Banchiere Miskinsky / L’Invalido : Zbiginew Macias
Nikona ?
La Fanciulla ?
Wexford
Festival Opera Chorus
National
Symphony Orchestra of Ireland
Conductor :
DANIELE CALLEGARI
Wexford,
Royal Theater, 31[?] October [?]1999
(Mise en
scène, Fabio Sparvoli ; décors, Giorgio Ricchelli ; costumes, Alessandra Torella)
**
*
Un autre enregistrement privé existe dans
les archives de la RAI qui diffusa une représentation de la reprise du
« Festival della Valle d’Itria » à Martina Franca en 2003. Comme c’est souvent
le cas pour ce festival spécialisé dans les reprises d’œuvres rares voire
oubliées, des firmes discographiques officielles placent légalement leurs
micros dans la cour du « Palazzo Ducale » de Martina Franca et diffusent ensuite
leurs Cd, pour la plus grande joie des amateurs passionnés !
SIBERIA
va connaître ce bonheur, grâce à la firme gênoise Dynamic.
Dynamic :
CDS 444/1-2 (Parution
annoncée pour janvier-février 2004)
Les
interprètes principaux à Martina Franca étaient les suivants :
Stephana :
Francesca Scaini
Vassili :
Jeong-Won Lee
Glèby :
Vittorio Vitelli
L’Invalido : Giulio Mastrototaro
Orchestra
Internazionale d’Italia
Coro da
Camera di Bratislava
Maestro Concertatore e Direttore :
MANLIO BENZI
Festival
della Valle d’Itria
Martina
Franca,
Cortile di
Palazzo Ducale,
8, 10 agosto
2003
On trouvera
des photos de scène de cette production du Festival della Valle d’Itria
en ce
site
Les opéras d'Umberto Giordano
Le désir de replacer la
ténébreuse SIBERIA parmi ses sœurs, mais également le nombre restreint des
opéras du Maestro Giordano nous ont donné l’idée d’en proposer une liste
exhaustive.
Marina
opéra en un acte, livret d’Enrico Golisciani, composé
en 1888.
Non créé
Mala Vita
(Mauvaise Vie) opéra en trois actes, livret de
Nicola Daspuro, d’après la nouvelle Il Voto et le drame ‘O Voto de
Salvatore Di Giacomo.
Création le 21 février1892, Rome,
Teatro Argentina.
Il Voto
(Le Vœu), nouvelle version de Mala Vita créée le10
novembre1897 au Teatro Lirico de Milan.
Regina Diaz
opéra en deux actes, livret de Giovanni
Targioni-Tozzetti et Guido Menasci, d’après le drame de Lockroy et Badon Un
duel sous le cardinal de Richelieu ayant retenu l’attention de Bellini puis
inspiré les opéras suivants : Il Conte di Chalais de Giuseppe Lillo,
Un Duello sotto Richelieu de Federico Ricci (tous deux de 1839) et Maria
di Rohan de Donizetti (1843).
Création le 5 mars1894, Naples,
Teatro Mercadante.
Andrea Chénier
« dramma di ambiente storico » en
quatre actes, livret de Luigi Illica.
Création le 28 mars1896, Milan,
Teatro alla Scala.
Fedora
opéra en trois actes, livret de Arturo Colautti, d’après la pièce de théâtre
homonyme de Victorien Sardou.
Création le 17 novembre1898 Milan,
Teatro Lirico.
Siberia
(La Sibérie) opéra en trois actes, livret de Luigi Illica.
Création le 19 décembre1903,
Milan, Teatro alla Scala.
Version révisée, Milan, 4 décembre
1927.
Marcella
« idillio moderno » en trois actes livret de Henry
Cain, Edouard Adenis et Lorenzo Stecchetti.
Création le 9 novembre 1907,
Milan, Teatro Lirico.
Mese Mariano
(Le Mois de Marie) « bozzetto lirico » en un acte, livret de Salvatore Di
Giacomo, d’après sa nouvelle Senza vederlo et son drame ‘O Mese
Mariano.
Création le 17 mars 1910 Palerme,
Teatro Massimo.
Madame Sans-Gêne
« commedia » en trois actes, livret de Renato Simoni, d’après la comédie
homonyme de Victorien Sardou et Emile Moreau.
Création le 25 janvier 1915, New
York, Metropolitan Opera House.
Giove a Pompei
(Jupiter à Pompéi) « commedia
musicale » en trois actes, livret de Luigi Illica et de Ettore Romagnoli.
Composé en collaboration avec Alberto Franchetti.
Création le 5 [6?] juillet 1921,
Rome, Teatro La Pariola.
La Cena delle beffe
(Le Dîner des moqueries) « poema drammatico » en quatre actes, livret de
Sem Benelli, d’après son drame homonyme.
Création le 20 décembre 1924
Milan, Teatro alla Scala.
Il Rè
(Le Roi) « novella » (comédie) en un
acte, livret de Giovacchino Forzano.
Création le 12 janvier 1929,
Milan,
Teatro alla Scala.
Sauf erreur, Marina, Regina
Diaz, Marcella et Giove a Pompei attendent encore
une reprise moderne (ou même la création, pour Marina !)… et un
enregistrement, officiel ou non.
Umberto Giordano « en ligne »
Le site du
Festival Umberto Giordano se déroulant dans la Villa Fedora sur le Lac
Majeur est :
www.festivalgiordano.it/
Le site du Conservatoire Giordano
de sa ville de Foggia est actuellement en construction :
Conservatorio Umberto Giordano di
Foggia :
http://www.conservatoriofoggia.it/
On est en revanche accueilli de
manière fort émouvante sur celui de la succursale du même conservatoire à Rodi
Gargano, par la si belle romance du ténor dans FEDORA : « Amor ti vieta… » ,
ici curieusement exécutée par un piano mélancolique :
Conservatorio Umberto Giordano di
Foggia Sede staccata di Rodi Garganico :
http://www.conservatoriorodi.it/
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