C O N C E R T S 
 
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NICE
16/01/04

Hasmik Papian
Giuseppe VERDI

SIMON BOCCANEGRA

Direction musicale : Marco Guidarini
Mise en scène et scénographie : Patrika Ionesco
Costumes : Louis Désiré
Coproduction Festival International de Santander / Opéra de Wallonie

Simon Boccanegra : Vittorio Vitelli
Amelia/Maria : Hasmik Papian
Jacopo Fiesco : Roberto Scandiuzzi
Gabriele Adorno : Walter Fraccaro
Paolo Albiani : Alessandro Paliaga
Pietro : Luigi Roni
Un capitaine : You-Hyoung Geun
Une servante d'Amelia : Valérie Deleau
 

Opéra de Nice
Représentation du 16 janvier 2004



Qui a dit que pour réussir Simon Boccanegra il fallait conjuguer intimement au rythme de la mer Méditerranée des voix et un orchestre porteur du drame ? Qui a dit aussi qu'après la production scaligère de Strehler on ne pourrait, avant trente ans, remonter cet ouvrage, tant les luxueuses images du génial Giorgio étaient fortes et pour toujours... une absolue et définitive référence pour une oeuvre jugée maudite ? Metteur en scène et scénographe du spectacle niçois présenté en ce début d'année - en coproduction avec Santander et l'Opéra Royal de Wallonie - Petrika Ionesco aurait dû se poser ces deux questions et relever autrement le défi avec un spectacle choc, à la démesure du livret.

Car de tous les grands Verdi, Simon est celui qui s'accommode le plus difficilement d'une 
"honnête moyenne". Jugez un peu : une histoire étalée sur vingt-cinq ans, des rapports de force nus, secs, amers, des ombres, des âmes, le goût et la lassitude du pouvoir... Ses décors sont jolis, fonctionnels, on frise parfois l'anachronisme, les costumes de Louis Désiré n'apportant, eux rien, de nouveau sous le soleil génois.

On cherche aussi en vain la présence palpable et réelle de la mer, l'iode et les embruns (raisons de vivre du héros) et surtout les enjeux politiques et sociaux d'un corsaire devenu Doge par accident ! On se bat souvent à l'épée, on roule des yeux comme au Grand-Guignol, lors de la scène de la reconnaissance Simon tourne trop souvent le dos à sa fille retrouvée... La mystique de la Justice et de la Mort sont ailleurs, la solitude des âmes, des rues, du pouvoir, des maisons aussi dans ce sympathique et animé livre d'images, superbement éclairé et enfumé...

Si le courant passe, on le doit alors avant tout aux chanteurs. En premier lieu au baryton/ténor (comme Robert Massard !) Vittorio Vitelli : voix faite pour les imprécations, les malédictions, large, puissante. Vitello chante avec goût, sans effets inutiles et sa sobriété dans la scène finale (sous la poupe d'un galion très Vaisseau Fantôme et là, Ionesco tape dans le mille, car Boccanegra est une sorte de Hollandais à l'envers, lui qui n'espère plus rien de la politique et du pouvoir mais ne désespère pas des hommes !) achève de nous convaincre. Roberto Scandiuzzi chante un Fiesco de belle envergure. Ces deux artistes font d'ailleurs des affrontements de voix masculines graves (Verdi les affectionnait tant !) les grands moments de la soirée.

Gabriele Adorno permet à Walter Fraccaro de mettre en valeur un timbre et un aigu exceptionnels. Alessando Paliaga (Paolo Albiani fielleux et retors à souhait) avec le vétéran Luigi Roni complètent un cast masculin de primo cartello.

Hasmik Papian en Amelia/Maria ? Les moments donizettiens du rôle lui échappent totalement. Elle, une Norma, une Tosca, une Aida ! Nous lui pardonnerons bien volontiers ses élans véristes tant sa sensibilité et son art du chant sont ceux d'une grande artiste.

Galvanisés, transcendés, Choeur et Orchestre Philarmonique de Nice, très vivants, nous ont donné le plus beau Verdi entendu depuis longtemps. Dieu sait si la musique impressionniste qui ouvre le premier acte peut paraître triviale. Sous la baguette du génois Marco Guidarini, il n'en est rien ! A ce degré de raffinement instrumental, on la suit avec un recueillement stupéfait. Réputée touffue, la partition respire, son clair-obscur s'aère d'une luminosité rare. Un bonheur de tous les instants. Le Directeur Musical de l'Opéra de Nice en totale symbiose avec sa phalange et son équipe, osons le mot, fait l'amour avec Verdi, la musique, l'opéra et le public. Exemplaire !
 

Christian COLOMBEAU
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