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BRUXELLES
19/09/01
Boulez - Bartok
Le visage nuptial
Le château de Barbe-Bleue
Françoise Pollet,
soprano
Laszlo Polgar, baryton basse
Pierre Boulez DIRECTION
BBC orchestra and chorus
Bruxelles - Palais des Beaux
Arts
(19/09/2001)
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20h12 Madame Pollet entre
en scène, la mine boudeuse mais l'oeil décidé, elle
adresse à Boulez un large sourire et s'en va retrouver son pupitre
qu'elle adapte (et malmène) à sa généreuse
corpulence. Petit silence, la diva tousse, ça y est, tout le monde
à compris : elle est malade, ça va être moche. Bon,
évidemment, résumer Le visage nuptial à la seule prestation
de la soprano alors qu'il y a tout de même un orchestre, un choeur,
un chef et un alto pour compenser, c'est vachement réducteur, mais
tout de même... quel dommage que Miss Pollet ait chopé un
refroidissement ! Car enfin - merde ! - les poèmes pour Mi de Messiaen
par Pollet, c'est du pur génie, idem pour les Ruckert-lieder de
Boesmans... faut se dire aussi que c'est pas parce que madame se confond
dans des récitals belcantistes vendus au rabais chez Carrefour (et
encore) qu'elle n'a pas les moyens d'être phénoménale
(et là je ne parle pas que de son physique), en matière de
musique contemporaine Françoise Pollet est probablement la soprano
la plus talentueuse qu'il m'ait été donné d'entendre.
D'où ma relative déception à l'entendre disputer le
beau son à deux glaires bien gras. Passons, car il y a d'autres
choses à dire et notamment des choses très intéressantes.
Avez-vous remarqué à quel point certaines chanteuses s'habillent
mal ? Peu importe, d'accord, mais quand on est face à une veste
vert-pâle en polyester dont les deux pans se referment grâce
à deux feuilles d'érables finement brodées et que
cette veste s'adapte aux mensurations de mme Pollet (encore elle !) nous
ne parlons plus chiffon, mais bel et bien d'art !Ý
Musicalement (parlons en
un tout petit peu) Le visage nuptial est une oeuvre qui se
réfère directement à Schoenberg, l'orchestre a cette
sonorité massive et destructrice - presque de fin du monde - qui
rappelle le plus dégarni des compositeurs de l'école des
fans, heu, de Vienne, veux-je dire ! (haha) L'écriture vocale a
pour particularité le fait d'être - par sa structure - complètement
incompréhensible. Les phrases se superposent et s'entrechoquent,
on n'y entend goûte... peut-être est-ce alors une hérésie
d'avoir un programme sur les genoux ? Qu'en pense Boulez ? Demandons-lui
à l'occasion. Bref, pas grand chose à dire de cette oeuvre
phare de la musique contemporaine tant elle a déjà fait ses
preuves (notamment en contribuant à la notoriété de
Bouboule) en d'autres occasions.
Pour le Château
de Barbe-Bleue, dont Boulez est sans doute avec Sawallich le plus
convaincant défenseur (nb : ce que j'écris est parfaitement
con ! Voilà bien une musique qui par définition n'a pas besoin
d'être défendue...) pour le Château de Barbe-Bleue,
donc, on nous a remplacé la volumineuse (et pulpeuse) Michelle DeYoung
- probablement coincée chez elle pour des raisons qu'on n'a aucun
mal à imaginer - par la maladive (zut où est passé
mon programme ?) par une jeune femme bien pâle à la voix grave
remarquablement agile (pour son nom, par contre, je me sens un peu idiote).
La basse, inoubliable, elle, dotée d'une des plus belles voix de
basses encore en activité m'a littéralement subjugué.
Laszlo Polgar est très certainement le tenancier idéal du
rôle, d'ailleurs il chante sans partition.
Dans l'ensemble, une belle
soirée même s'il manque à ce Château une
bonne mise en scène. Incontestablement, avoir un orchestre de pingouins,
une dame dans une vilaine robe et deux types en costume devant son nez,
édulcore quelque peu le côté mystérieux de l'oeuvre.
Restent la musique et l'interprétation qui toutes deux héritent
du même qualificatif : oh putaing.
Hélène Mante
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