C O N C E R T S
 
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BRUXELLES
(Palais des Beaux-Arts - Société philharmonique)
30/11/01
 
Gabriel Fauré
Requiem, op. 48

César Franck
Symphonie en ré mineur

Orchestre des Champs-Élysées
La Chapelle royale
Collegium Vocale
Philippe Herreweghe, Direction
Johanette Zomer, Soprano
Stephan Genz, Baryton

 


Création originale au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles ce vendredi soir; création dont nous subissions les répétitions depuis près de trois mois : la grande symphonie concertante pour toux, pastilles pour la gorge déballées bruyamment et vieilles dames qui s'étranglent et tentent de sortir de la salle en se cognant contre les portes; appelée aussi "improvisations sur le thème du public le plus grossier d'Europe". Cette fois c'est vraiment grave, jamais de ma vie je n'ai eu autant envie de baffer deux mille personnes (c'est du travail !) De Paris à Milan, de Londres à Berlin, aucun public n'a aussi peu de considération pour le travail des artistes, pour leur concentration; profitant du moindre blanc pour faire valoir ces toux grasses et vulgaires, ces glaires bondissantes et joyeuses, leurs montres qui sonnent, leurs portables qui s'oublient, leurs lamentables commentaires chuchotés à voix assez haute pour que le voisinage puisse admirer la science. Il est temps aussi que les responsables de cette salle apprennent au public qu'à partir du moment où le premier violon donne le la, l'exercice commence pour les instrumentistes. Ce n'est pas pour faire joli, c'est pour s'accorder et s'accorder au milieu d'un marché aux légumes ce n'est pas ce qu'il y a de plus efficace.

Entre les improvisations diatoniques (dia-toux-niques) du public : la symphonie de Franck et le Requiem de Fauré, version grand orchestre. Lors de sa création, la symphonie en ré mineur a subi les foudres d'une critique particulièrement remontée; très clairement il lui fut tout de suite reproché son instrumentation massive, la grossièreté de ses thèmes et -plus anecdotique- la présence d'un cor anglais dans le contingent orchestral. On sait qu'entre-temps l'oeuvre a pris une belle revanche sur ses détracteurs en étant soignée par de grands chefs et assez souvent gravée. Est-ce de l'inculture ou de la surdité mais je ne puis que donner raison à mes méchants confrères de l'époque. S'il n'y avait pas ce très joli second mouvement, presque tout en pizzicati, cette symphonie m'aurait littéralement endormi. Inutile d'exposer mes arguments, ils sont à l'image de ceux cités plus haut, à une importante nuance près : ce solo de cor anglais est une véritable merveille, qui tire la partition de son aphasie. À cet égard, Raphaël Pallacios a fait montre d'une belle maîtrise de son cor anglais et, malgré un son légèrement couvert (pas uniquement par les toux), a séduit l'assemblée. Philippe Herreweghe montre une belle maîtrise du découpage des sons, par contre ses cordes sont vraiment brouillonnes ce qui ne fait que plomber encore un peu plus la symphonie du pauvre Franck.

Le Requiem de Fauré, par contre, met en évidence la maîtrise presque sublime que Philippe Herreweghe a obtenu de ses choeurs. Stephan Genz le beau baryton allemand est couvert par l'orchestre dans sa première intervention; peut-être n'est-il pas acoustiquement idéal de placer les deux solistes derrière les violoncelles et les altos. Dans sa deuxième intervention, sa voix prend de l'ampleur et tient tout à fait la mesure face aux choeurs. Reste la petite Johanette Zomer qui a un peu de mal à contenir son vibrato dans le forte et qui abuse du détimbrement pour amplifier la juvénilité de son Pie Jesu (prononciation étrange du latin au lieu de "Iésou", elle dit Gésu...)

Voilà donc une conclusion bien sentie : si Philippe Herreweghe était chef de choeurs, il serait le meilleur; en attendant on restera sceptique face à ses capacités de chef symphonique; si vous voulez devenir riche, investissez dans les pastilles Vicks (l'action va grimper en flèche après la publication de cet article.) Soirée démoralisante...
 
 
 
 

Hélène MANTE
qui remercie Benoît Jacquemin
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