C O N C E R T S 
 
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TURIN
(Théâtre REGIO)
 
La Forza del destino

Giuseppe VERDI
 

Andrea Gruber : Leonora
Salvatore Licitra : Alvaro
Stefano Antonucci : Don Carlos
Luigi Roni : Beau-papa
Anna Maris Chiuri : Preziosilla
Carlo Colombara : Padre Guardanio
Bruno de Simone : Fra Melitone
Tiziana Tramonti : La bonniche
Antonio Feltracco : Trabuco
Ignazio de Simone : le chirurgien

Orchestre et choeurs du Teatro Regio de Turin
Direction : Massimo de Bernart

Parme, 28/2/2002.



MONSTERS & CO

La Forza del Destino est une oeuvre aujourdíhui trop rarement jouée, qui ruisselle de musique exceptionnelle. La faute en incombe, non pas tant au livret (on en connaît de plus absurde) quíà la difficulté de réunir des chanteurs capables de triompher des difficultés de la partition.

Dans la pénurie actuelle, le Teatro Regio de Turin réussit à moitié le pari, et cíest déjà beaucoup.

Salvatore Licitra est un ténor que les oreilles délicates qualifieront sans doute de ì hurleur î (cíest assez vrai quíil est devenu rare díentendre un tel déferlement de décibels) : il síagit en fait díun authentique ì spinto î, comme on en fait plus, au timbre riche et ensoleillé. Physiquement, cíest un cauchemar : díun autre côté, on nía pas payé pour le peep-show.

Face à lui, Andrea Gruber est une imposante Leonora, dans la tradition des Milanov : elle síenfile sans efforts airs et ensembles, avec une musicalité parfaite. Líactrice est sémaphorique, mais ce níest guère gênant dans le contexte díun spectacle basé sur la richesse des voix.

Stefano Antonucci est en revanche très décevant : timbre rêche, aigus limités et volume insuffisant.

Dans ces conditions le duo ì Solenne in questíora î se transforme en solo pour ténor et civière.

Carlo Colombara est un superbe padre guardanio, au grave somptueux : pour une fois, nous níavons pas une vieille barbe sur le retour (ce qui nous fait un excellent enchaînement avec Luigi Roni, qui níest plus que líombre de lui-même, cíest-à-dire líombre de rien).

Anna Maris Chiuri est, hélas classiquement, une Preziosilla trop lègére, qui, tout aussi classiquement, rate ses suraigus et savonne ses vocalises.

Enfin, Bruno de Simone est un épatant Fra Melitone, une basse au timbre de ténor.

Reste la mise en scène qui frise le grandiose. La production mélange les toiles peintes dans le style de Rouault et des éléments de décors sortis du village des Schtroumpfs. Ca culmine au dernier acte : la caverne de Leonora est juchée dans des arbres reliés par des ponts de lianes (la gestuelle de Gruber rappelle celle du premier King Kong), quant au duel Alvaro-Don Carlo, on dirait un remake de Tarzan contre Einstein !

Les costumes sont díune laideur à tomber à la renverse, et aussi dépareillés que les choristes (deux nains, trois obèses, un géant, vocalement efficaces au demeurant).

La direction de Massimo de Bernart est classique mais sans faille (si seulement il pouvait arrêter de chanter ! ! !) et líoeuvre est donnée sans coupure (le mérite des interprètes níen est que plus grand).

Au final, et si on met en perspective les défauts du spectacle, un excellente soirée néanmoins.
 
 

Placido Carrerotti
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