C O N C E R T S
 
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PARIS
Opéra Garnier
30/11/2001
 
Hommage à Boris Kochno

Portrait de Boris Kochno
Film de Pierre Philippe (2001)
 

Mavra
Opéra bouffe en 1 acte d'Igor Stravinski (1922)
Livret de Boris Kochno d'après Alexandre Pouchkine

Mise en scène et lumières : Humbert Camerlo
Décors et costumes : Carlos Cytrynowsi

Parasha : Olga Gouraikova
La voisine : Sofia Aksenova
La mère : Irina Tchistiakova
Le Hussard : Alexei Kosarev

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Le fils prodigue
Ballet en trois tableaux
Livret de Boris Kochno
Musique : Serguei Prokoviev
Chorégraphie : George Balanchine
Décors et Costumes : Georges Rouault

Le fils : Jérémie Bélingard
La courtisane : Agnès Letestu

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Les 7 péchés capitaux
Ballet avec chant sur une idée de Boris Kochno
Texte : Bertlolt Brecht
Musique : Kurt Weil (1933)

Chorégraphie : Laura Scozzi
Mise en scène et costumes : Laurent Pelly
Décors : Chantal Thomas
Lumières : Joël Adam

Anna I : Anne Sofie von Otter
Anna II : Elisabeth Maurin et Caroline Bance
Der Vater : Ian Caley
Der älteste Sohn : Stefan Margita
Der jünger Sohn : Nigel Smith
Die Mutter : Nicolas Cavalier

Ballet de l'Opéra National de Paris
Orchestre de l'Opéra National de Paris
Direction musicale : Alexandre Polianichko

 


TRADITION ET MODERNITÉ
 

Qui était Boris Kochno ? Peu de spectateurs présents ce soir-là à Garnier devaient le savoir. Un film très didactique de 9 minutes leur a permis de faire connaissance avec cette figure du Paris artistique du siècle dernier. Né en 1904 à Moscou, Boris Kochno arrive à Paris en 1920 et devient, à 17 ans, le secrétaire-homme à tout faire de Diaghilev. Suite à cette rencontre, Boris Kochno consacrera sa vie à monter des projets artistiques (opéras et ballets) en collaboration avec des musiciens comme Stravinski, Prokoviev, Auric, Poulenc, Milhaud, Weil, de grands chorégraphes comme Ballanchine ou Massine, et en collaboration avec des grands peintres (Picasso, Max Ernst, Miro...) et écrivains (Cocteau, Brecht...) Sa carrière a croisé celle de nombreux danseurs comme Lifar, Petit, Babillée. Il meurt en 1990. 11 ans après, l'Opéra National de Paris lui rend hommage. Bel hommage grâce à un programme hybride, tout à fait en harmonie avec le caractère touche-à-tout de Kochno dont la biographie bien documentée figure dans le très beau et très intéressant (une fois n'est pas coutume) programme de l'Opéra de Paris.

Après le film, la soirée commence avec "Mavra", un opéra bouffe de Stravinski sur un livret de Kochno. L'intrigue d'après Pouchkine est légère comme du papier à cigarette : un jeune fille profite de la mort de la vieille cuisinière de sa mère pour faire rentrer son galant, un hussard, qui se fait passer pour la nouvelle cuisinière en prenant le nom de Mavra. La mère découvre le pot au rose et le hussard s'enfuit. La musique de Stravinski est très dynamique, ne laissant à l'auditeur et aux chanteurs aucun moment de répit. Les 30 minutes de musique passent vite, trop vite peut-être pour apprécier et juger l'intérêt musical de cette oeuvre. Celle-ci est bien servie par une mise en scène alerte avec un très beau décor qui défile comme dans un dessin animé. Les interprètes ne sont pas tous à la hauteur des exigences de la partition : si Olga Gouraikova, qui avait enchanté Bastille dans Guerre et Paix et sa très sensible Natacha, remplit son contrat (malgré un vibrato un peu encombrant), ce n'est pas le cas d'Alexei Kosarev dont la voix très acide est à la limite du désagréable. Dommage.

Le Ballet "Le fils prodigue", tiré de l'évangile par Kochno, est typique des oeuvres du répertoire reproduit à l'identique par le Ballet de l'Opéra National de Paris. C'est tout simplement impeccable, d'autant plus que la musique de Prokoviev, au lyrisme très proche de son Roméo et Juliette, et la chorégraphie inventive tout en restant très classique de Ballanchine (ne cherchez pas où Béjart s'inspire !) sont à l'unisson. Jérémie Bélingard, premier danseur du corps de ballet très athlétique et racé, est totalement investi et Agnès Letestu, danseuse étoile, profite de son physique longiligne pour interpréter une courtisane froide et prête à tout. Les applaudissements, dignes de saluts d'opéra, étaient tout à fait mérités.

Mais le meilleur était pour la fin. À la demande de Kochno, Bertolt Brecht et Kurt Weil ont écrit "Les 7 péchés capitaux", histoire de deux soeurs (Anna I et Anna II) parties faire fortune pour permettre à leur famille de se construire une maison confortable en Louisiane. Durant 7 années, Anna II (la danseuse) succombera aux 7 péchés capitaux. Mais Anna I (la chanteuse) veille.

La chorégraphie de la création était de Georges Ballanchine. L'excellente idée de l'Opéra de Paris a été de confier une nouvelle version au tandem de choc Laurent Pelly-Laura Scozzi, l'équipe de Platée et de la Belle Hélène. Le résultat : un spectacle sans temps mort, plein d'inventions, servi par des danseurs et chanteurs qui ont visiblement travaillé dans une ambiance de troupe. Anne Sofie von Otter dévoile un talent dramatique peu utilisé jusqu'à présent (il faut la voir entouré d'une pléiade de danseurs plus ou moins déshabillés pendant la luxure !). Souhaitons qu'elle rencontre de nouveau Laurent Pelly. Le résultat devrait être intéressant !

En résumé, une soirée hommage sans emphase mais méritée pour un homme de coulisses très influent. Et qui a permis de démontrer qu'associer répertoire et modernité était possible. À bon entendeur...
 
 
 
 

Bertrand Bouffartigue
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