La production de cette Lucia revient
aussi à Graham Vick, produite par le Maggio Fiorentino avec le Grand
Théâtre de Genève.
Au premier plan des murs coulissent;
à l'arrière plan, la lande écossaise. Quelques éléments
symboliques viendront s'ajouter, comme un arbre ou une grosse lune ronde
sur la toile de fond. Par moments les murs se ferment, parfois ils s'ouvrent
comme une échappée sur la nature extérieure.
Les costumes sont ceux de l'Écosse
du XVIIe.
Friedrich Haider dirige sans génie
mais de manière honnête, toujours attentif aux chanteurs et
à ses deux Lucia.
Anthony Michaels-Moore dessine un Enrico
brutal dans les gestes et convenable sur le plan musical.
Raimondo est un Alastair Miles scrupuleux.
Edgardo est un partenaire assez fréquent de Gruberova: Jose Bros.
Le timbre est nasal, sans charme particulier, mais la projection est suffisante
et le phrasé musical.
Le centre d'attention de la soirée
est la Lucia d'Edita Gruberova. Si on n'est pas allergique à ses
intonations et à un certain maniérisme, la soirée
devient une leçon hallucinante de bel canto et de conservation de
moyens.
Après 34 ans de carrière,
le timbre paraît intact, le souffle n'est pas écourté,
les piani et crescendi faciles, le trille battu à volonté,
le suraigu impressionnant. L'interprète convainc et provoque un
authentique délire du public.
Maria Jose Moreno, qui alterne dans
le rôle, est loin d'être indigne et sa jeunesse touche, mais
elle pâlit en comparaison avec Gruberova et elle trouve ses limites
dans la Folie au lieu de la transcender comme Gruberova.
Valéry FLEURQUIN