C O N C E R T S 
 
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NICE
14/11/03
(Annick Massis @Opéra de Nice)
Gaetano DONIZETTI

LUCIA DI LAMMERMOOR

Version concertante 
Livret de Salvatore Cammarano d'après le roman de Walter Scott
Nouvelle production

Direction musicale : Marco ZAMBELLI
Mise en scène et scénographie : Paul-Émile FOURNY
Costumes : Véronique BELLONE
Éclairages : Jacques CHATELET

Enrico : Marc BARRARD
Lucia / sa soeur : Annick MASSIS
Edgardo / son soupirant : Giorgio CASCIARRI
Arturo / futur époux de Lucia : Alain GABRIEL
Raimondo / chapelain de Lammermoor : Elia TODISCO
Alisa / compagne de Lucia : Anne PAREUIL
Normanno / suivant d'Enrico : Florain LACONI

ORCHESTRE PHILHARMONIQUE DE NICE
CHOEUR DE L'OPÉRA DE NICE

Opéra de Nice
Les 14*, 16, 19 et 21 novembre 2003


Le non-drame de Lucia di Lammermoor
 

Sans les Maria Callas, les Renata Scotto, les Joan Sutherland d'autrefois, présenter Lucia di Lammermoor sur la seule valeur du chant est une entreprise illusoire. Aujourd'hui, on se doit d'éclairer la théâtralité de cette oeuvre au-delà de la vocalité. Les metteurs en scène français Patrice Caurier et Moshe Leiser l'avaient bien compris quand, dans leur récente production lyonnaise du célèbre opéra de Donizetti, ils avaient montré le drame de Lucia même s'ils pouvaient compter sur la voix de Natalie Dessay.

Pour cette nouvelle production à l'Opéra de Nice, le directeur et metteur en scène Paul-Émile Fourny a érigé son spectacle principalement sur la superbe de la musique et du chant de Donizetti. Au tomber du rideau, les applaudissements nourris semblaient lui donner raison. Pour autant, cela n'aura pas suffi à satisfaire les exigences artistiques d'un tel opéra. Même avec la voix d'Annick Massis. Si la soprano française est la reine du plateau, son personnage reste sans grande étoffe. Malgré un manque de puissance flagrant, son soprano possède toute l'étendue de la tessiture requise. Malheureusement, elle n'en utilise que la joliesse, sans chercher à la colorer de la dramaticité qu'exige le rôle. Dès lors, le rêve d'amour de Lucia manque de passion, sa détresse à l'idée d'envisager son avenir, brisé par un mariage imposé, est sans apparente amertume et son crime sans folie.

A sa décharge, il faut constater que le spectacle niçois n'est pas dynamisant. A commencer par un décor sans unité. Une grande salle sous un plafond de croisillons de bois d'où surgissent d'incompréhensibles lueurs bleutées. Sur le fond, une porte monumentale accrochée à un mur de pierres de taille en ruine côtoie un escalier interrompu de marbre blanc, flanqué d'une paroi noire de bitume. Sur l'avant côté de la scène, une fontaine ( ?) comme une immense bouteille dont le coulage de bougies centenaires auraient finalement sculpté la forme. Un environnement inconstant où les bruns et les gris des costumes d'époque manquent d'éclat malgré leur richesse.


(Annick Massis @Opéra de Nice)

Dans sa mise en scène, Paul-Émile Fourny n'exploite pas le drame donizettien. Ne favorisant pas la caractérisation des personnages, ses scènes se succèdent telles des mises en place sans que les enjeux de la perte de pouvoir d'Enrico Ashton paraissent aussi importants que le livret l'affirme. Lucia est alors plus interloquée qu'anéantie par la décision de son frère de la marier à un homme qu'elle n'a pas choisi. Dommage, parce qu'au milieu de cette mise en scène sans profondeur, l'entrée saisissante de Lord Arturo Bucklaw (impressionnant Alain Gabriel), loque humaine soutenue par deux sbires est d'une grande intensité dramatique. Ce moment de théâtre parfait reste malheureusement sans suite, l'action se poursuivant dans un conformisme sans surprise.

Du côté des chanteurs, à noter la générosité du ténor florentin Giorgio Casciarri (Edgardo), qui tente de réveiller un plateau apparemment plus concerné par ce qu'il chante que par ce qu'il doit dire. Remplaçant le ténor Carlo Ventre, sa connaissance du rôle, sa bonne prononciation, sa vocalité intéressante et son italianité en font un bon protagoniste. Malheureusement, ses qualités vocales n'effaceront pas l'image du couple grotesque qu'il expose en raison d'une notable différence de stature avec Annick Massis. Un détail qui ne fait que renforcer l'impression d'inachèvement laissée par cette mise en scène. Hormis ces deux interprètes, des accessits vocaux vont au baryton Marc Barrard (Enrico), souvent monochrome, et à la basse italienne Elia Todisco (Raimondo), dont la profondeur de voix correspond à la partie qui lui est dévolue.

Artisan consentant de ce non-drame de Lucia, la direction musicale du chef italien Marco Zambelli n'aura pas su révéler ni à l'Orchestre Philharmonique de Nice, ni au choeur de l'Opéra, la luminosité de la musique de Donizetti.
 
 

Jacques SCHMITT
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