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Anvers
20/09/2003

Carl Tanner et Askar Abdrazakov (de dos)

Luisa Miller

Giuseppe Verdi
1813 - 1901

"Melodramma tragico" en trois actes


Libretto de Salvatore Cammarano d'après "Kabale und Liebe" de Friedrich Schiller.

 

Direction musicale
Ivan Törzs

Mise en scène
Guy Joosten

Décors
Johannes Leiacker

Costumes
Klaus Bruns

Lumières
Davy Cunningham

Chef des choeurs
Kurt Bikkembergs

 

 

 

Luisa
Fiorella Burato

Rodolfo
Carl Tanner

Miller
Bruno Caproni

Il Conte di Walter
Askar Abdrazakov

Wurm
Urban Malmberg

Federica
Graciela Araya

Laura
Anja Van Engeland

Un contadino
Eric Raes


Belgique : petit état d’Europe comptant à peu près dix millions d’habitants. Réputé pour la saveur de ses frites et la fraîcheur de ses moules, la Belgique est une monarchie parlementaire. Son roi se prénomme Albert et a une tête des plus sympathiques.

Verdi : compositeur d’opéras italien et barbu, sa musique est fort courue des publicitaires qui lui font vendre du jambon d’Aoste, de Parme ainsi qu’une marque de désodorisants pour cabinets !

Quel rapport entre le fier royaume de Belgique et le plus connu des compositeurs italiens ? A priori, pas grand-chose… sauf qu'en examinant les saisons des maisons d’opéra belges, on se rend compte que Verdi y trouve une place de choix. Evidemment, faisons abstraction des Traviata, Macbeth, Falstaff, Otello, Nabucco, Trovatore et Rigoletto, dont la présence au sein du répertoire est désormais inaliénable. Non, je vous parle du Verdi moins connu, celui qu’on n’a pas l’occasion de découvrir – justement – en savourant du jambon d’Aoste (bien que le jambon d’Aoste soit très bon, là n’est pas réellement la question). Heureux Belge qui en trois ans aura eu l’occasion de découvrir, à Liège, un Ernani de facture honorable, à Bruxelles, un Due Foscari, fort critiqué, certes, mais agréable à suivre et, dans quelques mois, I Masnadieri, avec le plus beau, le plus grand et le plus fort des chanteurs du royaume : José van Dam ! (prise de rôle). Enfin, à Anvers on proposait ce soir Luisa Miller, un opéra méconnu qui flirte avec le Verdi de la grande époque (nous sommes à un opéra de Rigoletto).

Pour présenter cette œuvre, la maison flamande a mis les petits plats dans les grands : son metteur en scène vedette (Guy Joosten), quasiment béatifié depuis que le Met a fait appel à ses services ; Ivan Törzs, le chef maison et un casting relativement alléchant. Le moins que l’on puisse dire, au regard du résultat final, c’est que le petit plat – tout « mis dans les grands » qu’il soit – n’est pas vraiment ragoûtant.

Soulignons d’abord le travail de mise en scène de Guy Joosten. Celui-ci, fort occupé à se construire des bustes et à orner ses statues de fleurs et d’onguents, a dû se pencher sur l’œuvre de Verdi à la dernière minute… genre, pendant le générique de fin de Derrick en terminant une lasagna verde tiède. Ce contexte créatif très « naturaliste » se ressent fort bien sur la scène : mouvements de chœurs à l’ancienne (on ne parle pas d’individus, mais d’une masse chantante remuant uniformément sur une scénographie d’un goût relatif). Le décor, quant à lui, se compose d’un plateau tournant qui… tourne au fur et à mesure que l’intrigue avance (ils ont le même au Met !) Abandonnés à leur conception, résolument basique, de l’art dramatique, les chanteurs font ce qu’ils peuvent.

Au point de vue vocal, il faut reconnaître que l’Opéra des Flandres a réuni – sur le papier – un très beau plateau. Le problème, c’est que la concrétisation d’une belle idée de casting n’est pas toujours heureuse. Fiorella Burato est une Luisa techniquement solide, mais on lui reprochera son peu d'engagement dramatique. Son amant, le beau Rodolfo, chanté par le moins beau Carl Tanner, est le clou du spectacle : voix rayonnante (peut-être un peu trop « spinto » pour ce rôle qui requiert une certaine minutie dans l’ornementation), aigu facile, belle projection. Malheureusement le chanteur s’essouffle complètement après son air du troisième acte, brillamment interprété, et passera le reste de la soirée à sprinter derrière ses collègues avec un gros point de côté. Abdrazakov, solide rossinien, est ici comme vocalement absent. Van Engeland et Malmberg font un travail honorable quant à Bruno Caproni, il campe un père désabusé qui offre un bel étalage de décibels et de style. Choeur et orchestre agréables.

En conclusion : sus à Guy Joosten !
 

Hélène Mante
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