C O N C E R T S 
 
...
[ Sommaire de la rubrique ] [ Index par genre ]
 
......
POISSY
04/12/02
Anne-Sofie von Otter
chante son pays natal

Mélodies populaires et chants de Noël
avec le "Merry Swedish Gentlemen"

Anne-Sofie von Otter, mezzo-soprano
Bengt Forsberg, piano et orgue
Anders Jacobson, violon
Pär Näsbom, alto
Torbjörn Näsbom, violon nyckelharpe
Svante Henryson, violoncelle
Bengan Janson, accordéon
Jan Bengston, flûte
Anders Astrand, percussion

Théâtre de Poissy, 4 décembre 2002



UN NOEL SUEDOIS A POISSY...
 

Décidément, c'est une histoire d'amour sans fin que celle d'Anne-Sofie von Otter avec le Théâtre de Poissy dont elle est désormais l'enfant chérie, surtout depuis ce mémorable Ariodante en janvier 1997, qui eut les suites que l'on sait...

C'est ce que rappela, entre autres, Christian Chorier, lorsqu'il prit la parole en début de soirée, précisant que cette artiste qui effectuait toute une tournée en Europe avec ce concert n'avait choisi que deux villes en France : Toulouse, le 2 décembre, et Poissy... et que tout le programme avait été concocté par elle..(1)

Ce dernier, dont le détail ne fut donné au public qu'au fur et à mesure, est d'ailleurs un étrange mélange, assez hétéroclite, de chants traditionnels suédois, américains, anglais, allemands, de mélodies classiques, de chansons pop-folk à la limite parfois du sirupeux - comme par exemple "The Eyes of a Child" - et de "tubes" issus de la tradition de la comédie musicale américaine...

On ne dira jamais assez à quel point la personnalité de cette chanteuse est exceptionnelle, tant il semble, en effet, qu'aucun genre musical n'échappe à sa sagacité et à son appétit et que, telle l'inoubliable Cathy Berberian, elle soit parfaitement capable de passer de Monteverdi aux Beatles, ce qu'elle a d'ailleurs récemment démontré, comme en témoigne son disque pop-rock avec Elvis Costello intitulé "For the Stars".

Là, d'emblée, elle ose : tout d'abord le micro, puis la robe noire où scintillent ici et là quelques fleurs pailletées, très "gitane folk bohème" et puis, surtout, le "boysband", telle une meneuse de revue. Elle n'hésite pas non plus à se mettre en scène, à esquisser quelques pas de danse, à présenter son programme et ses musiciens avec une voix glamour, tout comme une vedette de variétés. Les éclairages savants, la "sono" très au point, les entrées, les sorties, tout dénote aussi un très grand professionnalisme. Nul doute que cette ravissante diva, toujours diaboliquement juvénile, pourra, quand elle le souhaitera, s'orienter vers la comédie musicale, le cabaret, le théâtre, voire le cinéma ou toute autre forme scénique susceptible de lui convenir. L'incroyable souplesse de sa voix lui permet pratiquement tout et il est clair que rien ne peut résister à son charme et à son autorité...

Le contenu du programme a été largement puisé dans le disque "Home for Christmas" paru il y a deux ans chez DG ( CD n° 459 685 - DG - 1998/1999) : Koppängen, Tomorrow will be my dancing day, I wonder as I wander, Noël de Fauré, "arrangé" de manière assez discutable avec cloches et violons... On lui pardonnera ce péché véniel pour d'autres très beaux moments, comme celui où elle arriva du fond de la salle, vêtue d'une longue robe blanche ceinturée de rouge, tenant une bougie et chantant a capella Sankta Lucia, chant très populaire en Suède pour la Sainte-Lucie, Reine de la Lumière... et d'autres, comme Betlehems Stjärna, toujours a capella... Pas de micro, cette fois, et le fait d'entendre cette voix si pure emplir soudain le théâtre dans toute sa simplicité et sa ferveur, fut vraiment un très grand moment d'émotion.

Elle chanta aussi La Nöel Passée, chant traditionnel français harmonisé par Benjamin Britten, avec la phénoménale diction française qu'on lui connaît, accompagnée cette fois au piano par son fidèle Bengt Forsberg - ce morceau figure dans le disque "Folksongs" ( 463 479 - 2 - DG 2000). Puis, en ayant revêtu à nouveau la tenue un peu hippie du début, elle entonna des airs de danse suédois, comme Staffansvisa & för redliga män , n'hésitant pas à se déhancher, à taper du pied, des mains et à se coiffer soudain d'une guirlande de Noël qui, auparavant, ornait un des pupitres...

Il convient de saluer tous ses musiciens, absolument formidables, dotés d'une bonne dose d'humour, et capables de joindre parfois leurs voix à celle de leur "muse"... Une mention spéciale à l'accordéoniste, Bengan Janson, à Bengt Forsberg, bien sûr, qui ouvrit la deuxième partie avec Bach - mais oui -, un air extrait d'une cantate de chasse... et fit aussi un petit discours touchant en "franglais", mais aussi au superbe violoncelliste (jouant également de la guitare et de la contrebasse) Svante Henryson, ainsi qu'à l'extraordinaire joueur de "nyckelharpe", Torbjörn Näsbom, instrument traditionnel suédois, très ancien (plus de 600 ans)... Petite précision : Bengt Forsberg, Bengan Janson et Svante Henryson, font partie de la distribution du disque "Home for Christmas"...

Terminant ce concert par le très célèbre Stille Nacht, d'origine allemande, cette fois, elle gratifia le public, chaleureux et enthousiaste, du Théâtre de Poissy de deux bis : un ahurissant Santa baby, chanson de Tony Springer, Phil Spring et Johan Jawitz créée par... Eartha Kitt, qu'elle chanta avec une voix de petite fille sexy très proche de celle de Marylin Monroe, et un plus traditionnel Have yourself a merry little Christmas...

Ce fut donc un joli moment que nous firent partager ces artistes, avec une bonne dose d'émotion, de poésie, de nostalgie et d'amour pour leur pays où Noël est une tradition très intense.

Donc, "Tack och God Jul ! " ("merci et joyeux Noël" en suédois).
 
 
 

Juliette Buch



(1) Après Toulouse et Poissy, ce concert fut donné en décembre, à Londres, Naples, Amsterdam, Stockholm, Bruxelles, Cologne et Eindhoven (Pays-Bas).
[ Sommaire de la Revue ] [ haut de page ]