les concerts de Forum Opera
Otello
14/10/01 |
Mise en scène: Guy Joosten Décors: Roni Toren Costumes: Jorge Jara Eclairages: Davy Cunningham Chef des choeurs: Peter Burian Otello: Mikhail
Dawidoff
|
Cette critique d'Otello à l'Opéra des Flandres, vous avez failli ne pas la lire. Arrivé vers 19h30 au guichet presse de l'opéra d'Anvers on m'apprend ainsi qu'à quelques autres personnes qu'il n'y a pas de place pour nous ! On nous prie gentiment de nous mettre sur le côté et trois minutes avant le spectacle on me tend un laissez-passer (un seul, alors que j'étais accompagné, comme convenu.) Nous gravissons - haletants, comme il se doit - les quelques marches de l'escalier principal, déjouons malicieusement le contrôle des places (et pour cause, nous n'en avons qu'une) et arrivés dans la salle, un ouvreur nous installe sur le côté en nous prévenant que si les propriétaires des places arrivent on a intérêt à en trouver d'autres. Tout cela n'a pas grand intérêt, musicalement parlant, mais explique parfaitement mon état de nerfs en début de représentation. La mise en scène de Guy Joosten situe l'action d'Otello en plein port militaire américain des années quarante ; les marins sont en bras de chemise, les femmes en robes à frous-frous, on danse le mambo (sur des accords de contrebasse) et Otello - qui n'est plus noir mais basané - adopte une coiffure latino et des allures de Tony dans West Side Story. La Flandre et son intellectualisme germanique a depuis longtemps laissé tomber les convenances au profit d'images fortes et provocatrices ; on ne s'étonnera donc pas de voir Jago agripper Otello par les couilles et de voir Desdemona se trémousser frénétiquement entre une pognée d'hommes nus (et ravissants.) Le bon public Anversois n'a pas l'air de s'en émouvoir et c'est tant mieux car la vision de Guy Joosten est en fin de compte extrêmement cohérente. Vocalement le plateau est extrêmement homogène, même si le Jago du baryton américain Stephen Kechulius se démarque par son absence totale de défauts : la voix est grande, l'intonation très juste et le jeu d'acteur, vraiment convaincant. On n'en dira pas autant de l'Otello de Mikhaïl Dawidoff dont l'émission est pataude et l'italien très approximatif ; il faut cependant reconnaître que cet homme a dans la gorge une véritable pétoire et que rarement on aura entendu un Otello aussi sonore. La Desdemona de Cheryl Barker - dont le timbre est vraiment ravissant - a eu un peu de mal à chauffer son médium et son haut-médium, la voix dans le quatuor paraît donc un peu petite ; plus tard, aux troisième et quatrième actes, ce sont des difficultés dans l'aigu - alors que le médium est devenu impeccable - qui viennent gâcher sa performance. L'air de saule perd donc de sa magie même si l'actrice compense par un très bel investissement dramatique. Pour le reste, David Miller est un Cassio en culottes courtes dont le chant paraît encore un peu vert malgré les promesses qu'il annonce, Vincent Karche (Rodrigo) et Susannah Self (Emilia) assument parfaitement leur rôle. Reste Dario Süss dont le Ludovico au timbre extrêmement laid fait un peu pâle figure dans l'ensemble concertant qui ponctue le troisième acte. Balazs Kocsar, à la tête de l'orchestre de l'opéra des Flandres réalise un très beau travail, extrêmement lyrique et raffiné, dommage que les vents éprouvent quelques difficultés au début du premier acte. Toujours pas de surtitres en français
à l'opéra des Flandres alors qu'à l'Ppéra Royal
de Wallonie on surtitre en néerlandais depuis belle lurette. Dommage,
cette obstination un peu incompréhensible pour l'observateur extérieur
que je suis pourrait être un barrière à la fréquentation
de l'Opéra des Flandres par une population diversifiée.
Camille De Rijck
|