C O N C E R T S 
 
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PARIS 
Opéra Comique

(Magdalena Kozena)

Pelléas et Mélisande

Claude DEBUSSY

Magdalena Kozena : Mélisande
Jean-Sébastien Bou : Pelléas
François Le Roux : Golaud
Jérôme Varnier : Arkel
Nathalie Stutzmann : Geneviève
Nicolas Testé : le berger, le médecin
Armelle Cardot : Yniold

Mahler Chamber Orchestra
Direction Marc Minkowski

Version de concert donnée à l'occasion du centenaire de la création
Opéra Comique, 30 avril 2002

 


C'est une immense émotion que d'assister à une représentation de Pelléas et Mélisande dans le lieu de sa création, cent ans jour pour jour après celle-ci. Emotion un peu tempérée par le fait qu'il s'agisse d'une version de concert, mais après tout, ne vaut-il mieux pas fermer les yeux et créer ses propres images qu'être déçu par ce que l'on voit ?

Le concert commence pour un bref discours de Marc Minkowski, rendant hommage à Jacques Jansen, récemment décédé, qui avait prévu d'assister au spectacle, et à Hugues Cuénod et Irène Aïtoff, bien vivants et présents dans la salle, Hugues Cuénod affichant vaillamment le même age que l'opéra célébré ce jour, c'est à dire un siècle !

Les interprètes ont été largement à la hauteur de leur tâche, et on peut raisonnablement penser que les chanteurs d'aujourd'hui n'ont rien à envier à ceux d'hier. Tous ceux présents ce soir là ont témoigné d'une diction parfaite, d'un goût et d'un style irréprochable et d'une connaissance intime de l'oeuvre. 

Magdalena Kozena est une Mélisande au timbre plein et pulpeux, et loin des petites filles éthérées, elle dresse un véritable portrait de femme, quelquefois têtue ("je reste ici"), quelquefois boudeuse ("pourquoi dis-tu toujours que tu t'en vas"), toujours présente et charnelle.

Le jeune Jean-Sébastien Bou, dont on parle de plus en plus après son Werther à Tours, est également un excellent Pelléas, à l'aise sur toute la tessiture, aux aigus faciles, y compris dans le terrifiant dernier acte. Le timbre est sombre, celui d'un vrai baryton, plus sombre que celui du Golaud de François Le Roux, ce qui donne certains effets inhabituels et intéressants dans les confrontations entre les deux frères.

François Le Roux dessine un Golaud d'un pathétisme saisissant. Plus à l'aise dans les scènes en demi-teinte, comme celle avec Yniold, que dans les scènes véritablement violentes (quand il traîne Mélisande par les cheveux), sa scène finale est proprement bouleversante. Un Golaud torturé, réellement "à faire pleurer les pierres".

Excellent Arkel, sonore, bien timbré, à la prononciation parfaite, du pourtant très jeune, du moins pour ce rôle, Jérôme Varnier. Nathalie Stutzmann est une Geneviève de grand luxe. Seul point faible de la distribution, Armelle Cardot, issue de la maîtrise de Radio France, en Yniold : la voix est trop mûre pour celle d'un enfant et trop enfantine pour celle d'une chanteuse, ce qui cumule les handicaps liés à la distribution de ce rôle.

La déception vient, hélas, de la direction musicale :  le Mahler Chamber Orchestra joue beaucoup trop fort et couvre les chanteurs, ce qui est un comble dans cette oeuvre. Les accents wagnériens de l'orchestre agacent très vite, puis deviennent proprement insupportable quand il est impossible d'entendre la déclaration d'amour de Pelléas sous ce déluge de décibels. Le problème vient probablement de ce qu'il est situé sur scène, et non pas dans une fosse. Il n'empêche qu'il revenait à Marc Minkowski de tempérer les ardeurs de ses musiciens, et d'imposer plus de subtilité et de transparence. Dommage.
 
 

Catherine Scholler
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