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AVIGNON
29/05/05

© Opéra d'Avignon
I PURITANI
(Les Puritains)

Opéra en trois actes 

Livret de Carlo Pepoli
d'après la pièce "Tête Rondes et Cavaliers"
de François Ancelot et Xavier-Boniface Saintine (1833)
Créé au Théâtre Italien de Paris, le 25 janvier 1835

Musique de Vincenzo BELLINI
en langue d'origine
(Editions musicales Salabert-Ricordi)

Direction musicale : Marco Balderi
Mise en scène : Charles Roubaud
Assistant : Bernard Monforte
Décors : Isabelle Partiot
Costumes : Katia Duflot
Lumières : Pierre Dupouey
Etudes musicales : Marie-Charlotte Le Roux

Elvira : Inva Mula
Enrichetta : Nora Javakhidzé
Lord Arturo Talbot : Marc Laho
Sir Riccardo Forth : Dario Solari
Sir Giorgio Walton : Daniel Borowski
Lord Gualtiero Walton : Jean Teitgen
Sir Benno Robertson : Christian Jean

Dimanche 29 mai - 14h30 *
Mardi 31 mai - 20h30

Opéra d'Avignon

Dernière oeuvre au programme de la saison 2004/2005 à l'Opéra d'Avignon, I Puritani est proposée dans la version coproduite avec les opéras de Marseille, Liège et Washington, et qui avait déjà été présentée en terres avignonnaises en 1999. Au plaisir de revoir une réalisation très soignée, s'ajoute celui de découvrir une distribution qui, hormis Marc Laho, est entièrement nouvelle et ne comporte que des prises de rôle.

On a donc retrouvé l'élégant décor unique composé de rampes obliques formant les gradins d'accès à la forteresse de Plymouth, forteresse aux soubassements de briques disposées en chevrons et soulignées de parements de marbre, avec en fond l'immense grille de ferronnerie aux motifs végétaux. Protagonistes et choristes ont revêtu les élégants costumes d'époque, les Puritains de cette version ayant peut-être renoncé aux ornements mais pas à la qualité des velours et satins. Des éclairages zénithaux placent les protagonistes dans une lumière qui semble être celle du Dieu témoin de l'histoire des hommes auquel les partisans de Cromwwell proclament leur soumission.
 
Revue par Charles Roubaud lui-même, la mise en scène semble avoir gagné en vigueur dans les mouvements d'ensemble et veille toujours à laisser les solistes délivrer leur chant en fonction de la situation dramatique, sans les mettre en difficulté par des exigences gratuites.


© Opéra d'Avignon

Grande attente, donc, autour des chanteurs, à commencer pour l'enfant chérie du public avignonnais, Inva Mula, dans le rôle d'Elvira. A en juger par les acclamations qui l'ont saluée au moment des saluts, il ne lui a pas tenu rigueur des tenues de note abrégées au premier acte et des suraigus éludés au troisième, mais a su apprécié la composition d'un personnage crédible et émouvant, ce qui ne constitue pas une surprise de la part de cette grande professionnelle au magnétisme reconnu. La prestation vocale reste très satisfaisante pour ce qui est de la clarté de l'émission, de l'homogénéité, de la ductilité et des sons filés. Les prudences constatées relèvent-elles d'une fatigue passagère - on parlait de bronchite à peine surmontée - ou sont-elles le prix à payer pour avoir abordé un répertoire plus tardif où le poids de l'orchestre sollicite la voix jusque dans ses limites ?

Nona Javakhidze, cantatrice d'origine géorgienne et déjà entendue dans Otello à Orange, est Enrichetta. Maintien noble à souhait, belle projection, mais quelques sons poitrinés sans nécessité. Le prétendant évincé d'Elvira, Riccardo, est incarné par Dario Solari, baryton d'origine uruguayenne. Grand, imposant, il manque un peu d'élégance ; à tout prendre, c'est aussi bien, c'est peut-être pour cela que ce guerrier un peu pataud n'a pas séduit Elvira. Mais cela se ressent dans le chant, qui tend à s'engorger dans les passages de force. Dans le duo avec Giorgio, l'oncle d'Elvira, la recherche de l'équilibre estompe ce défaut.

Giorgio a les traits juvéniles de Mirco Palazzi, vieillis par un maquillage adéquat. Doté d'une voix de basse sans lourdeur et sans recherche d'effets, avec une extension notable dans l'aigu, il confère du relief au personnage, digne et compréhensif.

Jean Teitgen, dans le rôle du père d'Elvira, et Christian Jean, dans celui du confident de Riccardo, donnent efficacement la réplique à leurs partenaires.

Arturo, le partisan des Stuarts, qui a conquis le coeur d'Elvira, est un des rôles de ténor les plus ardus, sollicitant volontiers l'extrême aigu. Après un premier acte où l'émission hésite entre la voix de poitrine et le fausset et où l'agilité laisse à désirer, Marc Laho se reprend au troisième acte, assumant alors sa partie.

Les choeurs, considérablement étoffés, surmontent le handicap engendré par la distance qui, souvent, les sépare de la fosse et participent à l'action avec la vigueur, l'expressivité et l'homogénéité souhaitables.

Et l'orchestre ? Admirable surprise que la direction de Marco Balderi, remplaçant Giuliano Carella initialement annoncé. L'orchestre d'Avignon n'a probablement jamais chanté de cette façon ; car c'est bien la merveille de cette représentation : l'orchestre n'est pas un faire-valoir des chanteurs, un tapis à fouler ou un adversaire à affronter, mais un partenaire à part entière, soliste lui aussi et contribuant de ses divers pupitres à la création de ces cantilènes enivrantes qui font l'envoûtement bellinien. Il ne fut sans doute pas évident pour les musiciens de se plier aux exigences du chef, mais le résultat est là, une fosse mélodieuse du début à la fin, sans le moindre dévergondage, un véritable délice et une justice enfin rendue à cette belle partition. Pour cela aussi - et peut-être surtout - ces Puritani resteront un grand souvenir.
 
 

Maurice SALLES
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