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PARIS
25/04/03

Jukka-Pekka Saraste © Michael Mitchell
Le Roi Roger

Opéra de Karol Szymanowski 

Roger, roi de Sicile : Wojtek Drabowicz
Roxana : Tatiana Maria Pozarska
Edrisi : Stefan Margita
Le Berger : Ryszard Minkiewicz
L'archevêque : Rafal Siwek
Une abbesse : Jadwiga Rappé

Orchestre philharmonique de Radio-France
Choeur de Radio-France, maîtrise de Radio-France

Direction Jukka-Pekka Saraste

Théâtre du Châtelet, 25 avril 2003


Le Roi Roger de Karol Szymanowski est une oeuvre assez rarement donnée, qui véhicule (faussement) une réputation d'oeuvre difficile, peut-être à cause d'un livret très allégorique, voire un peu nébuleux. La musique en est pourtant fort belle, et même parfois somptueuse.

À cause de cette réputation, il fallait une vedette internationale de l'envergure de Thomas Hampson pour appâter un public suffisamment nombreux. Hélas, après l'annulation de Torsten Kerl en berger, le baryton américain déclarait à son tour forfait pour le rôle-titre !

Cette défection a permis à l'assistance d'apprécier la prestation de Wojtek Drabowicz, qui n'est pas tout à fait un inconnu pour les habitués du Châtelet, car il y a déjà interprété Verchinine dans Les Trois Soeurs de Peter Eotvos.

Il est beaucoup plus difficile de se faire une opinion d'un chanteur dans une oeuvre de ce type que dans un opéra du répertoire courant. Néanmoins, la voix de Wojtek Drabowicz semble réellement belle, timbrée, nuancée et puissante ; à aucun moment la comparaison avec Thomas Hampson ne lui a été défavorable.

Tel n'était hélas pas le cas du berger remplaçant, Ryszard Minkiewicz, qui faisait pourtant partie de la distribution du disque EMI, mais qu'on sentait bien peu à l'aise dans ce rôle, même s'il en assurait toutes les notes. Il faut avouer que la tessiture est redoutable, avec un ambitus énorme et des intervalles difficiles. Mais surtout l'interprète doit avoir un charisme, une luminosité, qui font totalement défaut à Ryszard Minkiewicz, dont la voix sonnait bien grisâtre. Ce berger, en fait Dionysos, doit transporter les foules, même en version de concert. Ce ne fut pas vraiment le cas.

La reine Roxana de Tatiana Maria Pozarska était très bien en situation, avec un joli timbre, de belles nuances, des mélismes lors du deuxième acte particulièrement raffinés, le seul défaut qu'on pourrait éventuellement lui reprocher est sa façon bizarre d'attaquer les phrases. Sa voix est également puissante, car tous les interprètes doivent surmonter par moments une orchestration très nourrie, par moments seulement, car on sent que le compositeur connaissait et aimait la voix humaine, les paroxysmes sont fort bien menés et l'écriture orchestrale s'allège pour toute phrase délicate ou importante d'un chanteur.

Mais les grands triomphateurs de cette soirée ont été l'orchestre et le choeur pour lesquels le compositeur avait réservé sa meilleure inspiration, écrivant des pages riches et colorées, et les exécutants sous la direction de Jukka-Pekka Saraste, n'ont pas déçu : pâte somptueuse, sonorité de velours, chatoiements raffinés, un véritable régal.
 
 

Catherine Scholler
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