Andreas Scholl est l'un de ces artistes
capables de faire changer d'avis le mélomane le plus endurci, quant
à l'utilisation de contraltos en travesti ou de falsettistes dans
les emplois baroques (cette phrase sent l'expérience !).
On ne sait qu'admirer le plus : la
douceur de la voix alliée à la vigueur de l'interprétation,
la virtuosité et la sûreté sans faille des vocalises,
la suavité des passages élégiaques, ou tout simplement
la musicalité de l'interprète. Le timbre est charnu et remplit
sans effort le théâtre du Châtelet, aigu vaillant, diction
impeccable.
Accompagné du clavecin de Markus
Märkl et parfois du violoncelle de Christophe Coin et du hautbois
de Katharina Spreckelsen, il avait choisi de nous interpréter pour
ce récital des cantates italiennes de Haendel, qui conviennent bien
à sa voix. Et plus que les interpréter, il raconte une histoire,
et c'est un miracle de voir et d'entendre cet immense gaillard, qui a l'air
si souvent empêtré de son grand corps, vivre son texte par
sa gestique, ses mimiques, mais surtout par les mille couleurs et nuances
dont il pare son chant. Et cette histoire, même sans avoir de livret
ouvert sous les yeux, devient compréhensible !
Alors, pour paraphraser ma collègue
Mathilde Bouhon, je n'aurai qu'un mot : ANDREAAAAAS ! ! ! ! (la légende
veut qu'à ceci, le grand type à lunette et chapeau qui lui
tenait la porte du Palais de Beaux-Arts de Bruxelles lui ait répondu
- avec l'accent - ach, foui, z'est moi.)