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PESARO
21/08/05
Alberto Zedda
© DR
Gioachino Rossini (1792 - 1868)

STABAT MATER

Direction : Alberto Zedda

Elisaveta Martirosyan Soprano
Marianna Pizzolato Mezzo
Francesco Meli Ténor
Ugo Guagliardo Basse

Choeur de Chambre de Prague
Orchestre du Théâtre communal de Bologne

PESARO Palafestival
21 août 2005

Rossinissimo

Après un Barbiere di Siviglia éblouissant de musicalité, de "vocalità", reverdi par une mise en scène humoristique, intrépide mais pertinente ; après le somptueux mélodrame Bianca e Falliero, monté avec le faste vénitien voulu par l'action ; après une reprise de La Gazetta dans la production ingénieuse et avenante de Dario Fo, on reste abasourdi d'avoir - en trois jours - dévoré des yeux et des oreilles tant de virtuosité.

À 22h, ce vingt et un août, le concert de clôture est sur le point de commencer. On se prépare à un bonheur de plus - rare chez Rossini : l'émotion pure. Dans le programme de ce glorieux Stabat Mater, Alberto Zedda le souligne, et l'explique ainsi : "Sous le signe de l'inspiration religieuse, Rossini abandonne la réserve et la pudeur qui l'avaient toujours freiné dans l'expression des sentiments pour se laisser enfin submerger par un chant d'une grande tension émotive, à caractère passionnel et humain. (...) La douleur de la Mère, le mystère resplendissant du Sacrifice doivent lui avoir semblé des événements suffisamment grands et lointains pour écarter tout risque de sentimentalisme. Il faut dire qu'avant ce Stabat et la Petite Messe, Rossini ne s'était jamais aventuré dans le vérisme des Romantiques, qu'il ne s'était jamais approché de si près d'un langage réfuté par lui : celui de ses contemporains qui l'avaient réduit au silence." (traduction personnelle).

Le Stabat Mater dont les six premiers numéros furent, on le sait, commandités par un prélat espagnol en 1831-1832, ne fut créé dans sa version complète qu'en 1842, à Paris, plus exactement au théâtre des Italiens. Le succès immédiat se perpétue depuis. Dense et rigoureuse, l'oeuvre se déploie dans un bel équilibre entre voix et instruments, élan dramatique et ferveur religieuse. À plusieurs reprises - en particulier dans les quatre dernières parties composées plus tardivement -, la force dramatique et l'émotion n'ont rien à envier au meilleur Verdi.

Sous la baguette experte et sensitive du Maestro Zedda - dirigeant bien sûr sans partition - l'excellent orchestre du Théâtre communal de Bologne et le remarquable Choeur de Chambre de Prague savent rendre toutes les nuances de ce chef-d'oeuvre rossinien. Les parties solistes sont bien tenues par quatre jeunes chanteurs qui gagneront encore à mûrir. Bénéficiant de la prédilection de Rossini pour la tessiture de contralto, dont elle est proche, Marianna Pizzolato trouve, surtout dans sa cavatine, quelques beaux accents expressifs qui font remarquer ses qualités.

Après la puissante introduction "Stabat Mater dolorosa", se succèdent, sans jamais que l'inspiration ne faiblisse, airs, duos, choeurs, jusqu'à "In sempiterna saecula. Amen", déchirante fugue précédée d'un long morceau a capella, saisissant de fluidité dans les passages de voix d'un registre à l'autre. Il devient difficile de retenir ses larmes. Mais quand le Maestro Zedda, totalement habité par cette musique, dans un large mouvement de tout son corps agile, impose un silence qui se prolonge : le public explose de joie. Il fait tant et si bien qu'il sera gratifié d'une seconde exécution de l'extraordinaire final.
 
 

Brigitte CORMIER
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