Si l'on considère
qu'Oviedo est une ville moins grande et moins riche que Bilbao, sa consoeur
du nord de l'Espagne en matière de programmation lyrique, il faut
saluer son courage à maintenir une saison lyrique sur quelques mois
de l'année. L'association des amis de l'opéra d'Oviedo sait
proposer quelques raretés comme le récent Amico Fritz
ou
la Maria Stuarda qui nous occupe, dernier titre de la saison.
La production a des allures
bien provinciales, dans le mauvais sens du terme. Le choeur amateur ne
peut rivaliser avec celui de Bilbao. Les décors sont indigents :
deux tours de mauvais carton, une table pour signer l'arrêt ou quelques
arbres peints, rien de plus. Les costumes sont traditionnels et la mise
en scène se contente de faire entrer et sortir des chanteurs bien
statiques. Un chien tenu en laisse ou un épervier sur le poing (pour
la scène de chasse) ne peut masquer pareil ridicule.
Judith Borrás chante
Elisabetta avec un vibrato consternant, au point qu'on distingue mal les
traits de virtuosité ; lorsqu'elle tente un trille, on n'entend
aucune différence avec l'émission habituelle ! Elle appuie
néanmoins certains graves et inclut un contre-ré à
la fin de son air d'entrée. Timbre sans nulle comparaison avec le
précédent, le ténor Joseph Calleja nuance, joue sur
le diminuendo ; un vrai baume pour les oreilles. Malheureusement, les aigus
manquent de projection et le contre-ut à la fin de sa première
intervention s'entend à peine. Les voix d'Alberto Arrabal et David
Menéndez, respectivement Talbot et Cecil, n'attirent aucun reproche,
le second montre même un certain mordant dans son duo avec Elisabetta.
On attendait avec impatience
la Stuarda d'Ángeles Blancas, qui venait de remplacer Gruberova
pour le rôle à Zürich. L'actrice chante avec conviction,
et sa composition dramatique emporte l'adhésion. En revanche, sa
technique ne lui permet aucun son filé, aucune note tenue longtemps
; elle respire au milieu de la phrase dans la prière ou l'aria
final. Quant aux aigus, elle n'en émettra aucun, laissant à
Judith Borrás le contre-ré à la fin de líaffrontement.
Il faut donc oublier les souvenirs laissés par Caballé, Sills,
Gruberova ou Sutherland pour ne citer que ces quatre-là.
La direction de Tolomelli
est irrégulière et n'évite pas certains décalages
avec le choeur ou l'orchestre. Certains tempi sont trop lents (l'entrée
de Maria par exemple) et les passages dramatiques manquent de fougue. Il
vaut mieux oublier également les cors, couaquant à l'envi
leurs attaques dans l'introduction de la dernière scène.
Terminons par l'éternel problème des coupures chez Donizetti
: les reprises des cabalettes sont parfois coupées mais la strette
du premier final absolument intégrale. Pourquoi l'un et pas l'autre
?
Une soirée en demi-teinte,
entre la joie d'entendre une rareté programmée avec courage
et un résultat qui ne comble pas toutes les espérances.
Valéry Fleurquin