FAVART CÉLÈBRE UN
ANNIVERSAIRE OUBLIÉ...
En cette année du bicentenaire
de Berlioz, on ne peut qu'être reconnaissant à la Salle Favart
et en l'occurrence à son directeur, Jérôme Savary,
d'avoir fêté cet autre compositeur, moins imposant, certes,
mais qui se retrouvait ce soir-là dans sa vraie maison, celle où
furent créées la plupart de ses oeuvres lyriques.
Quand on lève la tête
pour admirer le plafond de l'Opéra-Comique, on peut remarquer qu'Adam
y figure en bonne place, au même titre que Mozart et précisément
Berlioz. Certains de ses opéras, comme Le Chalet, le Postillon
de Longjumeau ou Si j'étais roi, y furent donnés
avec beaucoup de succès au XIXème siècle, mais, de
nos jours, c'est surtout grâce à son ballet, Giselle, et à
son très célèbre chant de Noël, "Minuit, Chrétiens",
qu'il n'a pas sombré dans l'oubli.
C'est pourquoi entendre ce Toréador
le 8 décembre dernier à Favart était intéressant
à plus d'un titre, l'oeuvre étant rarement donnée,
même si un très bel enregistrement paru en 1996 chez Decca
avec Sumi Jo, John Aler et Michel Trempont, sous la direction de Richard
Bonynge, a contribué à mieux le faire connaître.
Il s'agit d'un vaudeville à
résonance hispanique mettant en scène l'éternel trio
du mari, de la femme et de l'amant de celle-ci. Curieusement, après
bien des tribulations, l'oeuvre se conclut sur une sorte de statu quo
vantant les mérites du ménage à trois, le sous-titre
"ou l'Accord parfait" ayant d'ailleurs, à l'époque, été
supprimé par la censure.
Musicalement, l'inspiration en est
plutôt riche, digne héritière de Grétry et de
Boieldieu, elle annonce aussi un peu Offenbach par sa verdeur et sa truculence.
Les airs en sont brillants, en particulier ceux de Coraline, véritables
feux d'artifice pour soprano colorature, et on retiendra le célèbre
trio "Ah vous dirai-je maman", passé, lui, à la postérité,
ainsi qu'un hilarant "Hymne à la bouteille".
Le public venu fort nombreux n'eut
pas à le regretter, car les protagonistes de cette soirée
lui offrirent un véritable petit bijou !
En tête de distribution, le charme
et l'abattage de Magali Léger font merveille. Piquante, séduisante,
mutine, sans une once de vulgarité, habillée de manière
ravissante par Marc Chaoul, l'artiste a une présence scénique
captivante et finalement irrésistible. La voix est légère,
certes, mais précise, musicale, bien timbrée et la diction
est irréprochable.
Marc Barrard, inénarrable Raimbaud
du Comte Ory dans ce même théâtre en février
et mars 2003, campe un toréador retraité haut en couleurs,
sa voix riche en harmoniques donne une belle autorité à ce
personnage pourtant un peu ridicule mais qui, grâce à lui,
trouve une certaine dignité.
Simon Edwards est un Tricolin de belle
allure et de grand style, même si la voix semble parfois un peu trop
frêle pour ce rôle d'amant non négligeable et non négligé
d'ailleurs.
On peut saluer chez ces deux artistes
la même qualité de diction que chez leur partenaire.
Quant à l'orchestre Ostinato,
associé pour cette saison à l'Opéra -Comique et composé
de jeunes musiciens encore en formation, il fut tout à fait à
la hauteur de sa tâche, rondement mené par Jean-Luc Tingaud,
qui contribua largement à soutenir la verve des chanteurs.
On aimerait pouvoir assister aussi
souvent que possible à ce genre de soirée délicieuse
où la bonne humeur rivalise avec le plaisir partagé de faire
de la musique. Le public ne ménagea d'ailleurs pas son enthousiasme
et se vit offrir en bis une reprise du fameux "Ah vous dirai-je maman".
Alors, merci, Monsieur Adam, et bon
anniversaire...
En savoir plus .... lire notre
dossier consacré à
l'Opéra Comique