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PARIS
29/01/04
Master Class José Van Dam

Studio de l'Opéra de Paris - Bastille
29 Janvier 2004



La leçon du "Maître de musique"
 

Intégré à l'Opéra National de Paris, le C.F.L. (Centre de Formation Lyrique) offre à de jeunes chanteurs en début de carrière un enseignement professionnel. Le recrutement a lieu au cours d'une audition annuelle - en février 2004 pour la saison 2004-2005 - devant un jury désigné par le directeur de l'Opéra avec des éliminatoires et une finale non publique. Les stagiaires (âgés de 18 à 30 ans) reçoivent une rémunération mensuelle avec obligation de service à l'Opéra de Paris pendant la formation qui dure entre un et trois ans.

La direction du Centre Lyrique est assurée par Anna Ringart. La directrice des études musicales n'est autre que Janine Reiss, dont les conseils sont très appréciés par les plus grands. Les élèves bénéficient régulièrement de l'enseignement et des conseils d'artistes invités pour des master classes. Pour clore la saison 2003-2004, le maître d'oeuvre était le baryton belge José VAN DAM.

Devant le public du Studio, l'artiste écoute d'abord l'air présenté par le chanteur dans son intégralité puis reprend avec lui les passages qui nécessitent des corrections, livre quelques commentaires, parfois en plaisantant pour gommer la tension inhérente à l'exercice, et n'hésite jamais à chanter lui-même certaines phrases pour illustrer son propos.

La première stagiaire, Edel O'Brien, mezzo-soprano, présente d'abord La Prison de Gabriel Fauré. José Van Dam insiste sur le placement des consonnes et des voyelles qui donnent la couleur de la mélodie, sur la différenciation des mots et leur indispensable liaison, ainsi que sur l'articulation qui rend le chant piano plus audible. Dans Mandoline (Fauré toujours), il met l'accent sur la signification du texte qu'il sous-titre lui-même "commérages" et réclame plus de mollesse, de sous-entendus et beaucoup de legato.
La soprano Kareen Durand propose une mélodie d'Albert Roussel : Adieu . Le baryton reprend le texte, très difficile à mettre en valeur et dont l'intelligibilité exige plus de diction que de chant : plus la phrase est murmurée, plus elle doit être comprise, indique Van Dam.

Plutôt baryton-basse, à l'instar du maître, David Bizic entame un air de Sancho (Don Quichotte de Massenet) avec une voix puissante et un beau phrasé. On surprend Van Dam en train de vivre ce rôle malgré lui, de bouger les lèvres, retenant son souffle et martelant le sol imperceptiblement, avant d'offrir une brillante démonstration : de toute évidence, le mépris doit être exprimé plus intensément ! L'élève se lance ensuite dans la redoutable Romance à l'Etoile (Tannhäuser - Wagner). Tout semble présent : la morbidezza, le timbre coloré sans excès. Il n'est repris que sur la prononciation de l'allemand.

Au programme de la soprano Mary Elisabeth Williams : deux Rückert Lieder (Mahler bien sûr). Dans le premier, sa voix est assurée, mais un peu trop métallique. José Van Dam lui explique que le chanteur ne doit pas accentuer cette mélodie, déjà très décousue, mais veiller à son tempo. Avec la complicité du célèbre baryton, elle évite de forcer et signe une interprétation nettement plus aboutie de Ich bin der welt abhanden gekommen, un lied très flatteur pour la voix.

Enfin, Guillaume Antoine, basse, aborde quant à lui le cinquième des Kindertotenlieder de Mahler, In diesen wetter ("On les a pris, je n'ai rien pu dire"), avec une voix un peu monolithique et quelques problèmes de souffle . José Van Dam lui confie : "Quand je travaille une mélodie, je lis et récite d'abord le texte avant d'aborder le chant". Il l'aide ensuite à faire ressortir le côté dramatique de la pièce par une juste accentuation.

La session s'achève avec le duo "Me marier ..." du Don Quichotte (Massenet), réunissant la mezzo-soprano Cornelia Oncioiu et Guillaume Antoine.

José Van Dam confessera qu'il ne donne habituellement pas de master class, mais qu'il a fait une exception par fidélité à l'Opéra de Paris. Ce choix nous semble regrettable pour bon nombre de chanteurs, débutants ou confirmés... Qui mieux que lui, à l'heure actuelle, peut démontrer l'importance de l'intelligence des textes, de l'articulation expressive, des demi-teintes, du legato ? On se souvient, parmi tant d'autres exemples, d'une interprétation unanimement saluée de Philippe II dans la version française de Don Carlos au Châtelet. A soixante-quatre ans, il continue de se produire sur scène : cette saison, il sera Don Pasquale au Teatro Real en mars, Massimiliano de I' Masnadieri  à La Monnaie en avril et endossera les quatre rôles des Contes d'Hoffmann (mis en scène de Jérôme Savary) à Paris-Bercy en mai.
 

E.G. SOUQUET
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