C O N C E R T S 
 
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LYON
13/03/05
Susan Anthony
© www.susan-anthony.com
Concert WAGNER / BRAHMS

Richard WAGNER
Prélude et Enchantement du Vendredi Saint (Parsifal)
Wesendonck Lieder

Johannes BRAHMS
Symphonie n°4 en mi mineur, op. 98

Susan Anthony, soprano
Orchestre de l'Opéra national de Lyon
Emmanuel Krivine

Lyon, le 13 mars 2005

Wagner versus Brahms, c'est un peu le mythique combat des chefs que l'on rejoue sur la scène lyonnaise. Passons sur le second maître, "seulement" symphonique ici et qui n'aura donc pas les honneurs de ces colonnes lyriques.

Lyrique, Wagner l'est lui doublement au fil de ce programme, opératique évidemment, plus strictement mélodiste même. C'est que Krivine a trouvé face à l'orchestre de l'opéra la "clé des chants", ouvrant la boîte de Pandore et révélant à son auditoire le maître de Bayreuth comme on l'entend rarement. Car quel prélude de Parsifal ma foi ! Innervé de murmures de cordes, parcouru de poudroiements de vents, soulevé (malgré quelques accrochages) de tempêtes de cuivres, le morceau est passé comme un rêve, fluide, humain plus que profondément mystique, fouillé pourtant dans ses moindres recoins harmoniques, intensément vécu, à l'échelle de l'orchestre (ça s'entend) comme du public (ça se sent). Même pâte dégraissée, même équilibre, même talent de pastelliste, même cohésion enfin sous la baguette économe de Krivine pour un "Enchantement du Vendredi Saint" fervent, à la fois naïf et biblique, animé d'un mouvement continu, véritable lame de fonds sonore, populaire et sans le pathos parfois encombrant, redondant des grands Kapellmeister d'antan (les fans des messes alla Knappertsbusch ont dû être déçus).

On en arrive aux Wesendonck Lieder, dans l'orchestration de Mottl (Wagner n'a orchestré que "Träume", le lied final) qui respecte la main et la pensée du maître. Pour ces poèmes magnifiques, inspirés à Mathilde Wesendonck par l'amour, suant la passion que lui vouait Wagner, esquisses de Tristan par l'esprit comme par le son, Krivine enfonce un peu plus le clou de son symphonisme chambriste, concertant. Le chef suscite parmi ses pupitres des sonorités tendres, un érotisme des combinaisons de timbres, des prodiges dynamiques sur toute l'étendue du spectre qui parent les mots d'amour, de mort, de renoncement, d'abandon avec des couleurs inédites, scintillantes ("Der Engel", "Träume"), oppressantes ("Im Treibhaus") et, en fin de compte, simplement évidentes.

Que le chef est bien mal secondé par son soprano, pourtant! On garde de Susan Anthony en Senta, en Leonore, en Salome des souvenirs autrement "percutants" que ce que l'on entend ici. La voix n'emplit simplement pas le vaisseau de la salle, étouffée par les moirures de l'orchestre dans les forte de "Stehe still" et "Schmerzen". L'émission est généralement précautionneuse, le grave étouffé, serré, le médium à peine confortable et accusant des stridences inattendues, l'aigu peinant à se chauffer, s'exhalant dans la douleur. L'intonation elle-même reste plutôt douteuse, dans les passages à découvert de "Im Treibhaus" par exemple. La voix fait en général, le temps de ces quelques lieder, un acrobatique grand écart entre la tentation d'un format dramatique à la manière de la jeune Flagstad (dont Susan Anthony a les moyens) et le lyrisme fiévreux, éperdu des "juste" lyriques (Varady) même génialement à la limite de leurs moyens naturels (on garde le souvenir trouble et troublant d'une interprétation d'exception de Mireille Delunsch à Montreux en 2000). L'artiste par ailleurs est bien consciente de l'enjeu que représente ce cycle monumental et personne ne pourra lui reprocher de ne pas mettre beaucoup d'investissement, de conviction, de souffrance dans son interprétation.

Concluons donc à une fatigue passagère de Susan Anthony et passons notre chemin... C'est tout de même bien dommage pour les sortilèges de Krivine...
 
 

Benoît BERGER
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