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Giuseppe VERDI (1813-1901)
AROLDO
« Melodramma » en quatre actes de Francesco Maria Piave
d’après son livret Stiffelio mis en musique par Verdi en 1850
Création le 16 août 1857,
pour l’inauguration du « Teatro Nuovo » de Rimini.
Aroldo : Gustavo Porta
Mina : Adriana Damato
Egberto : Franco Vassallo
Briano : Enrico Giuseppe Iori
Godvino : Valter Borin
Enrico : Antonio Feltracco
Elena : Miriam Artiaco
Coro del Teatro Municipale di Piacenza
M°. del Coro : Corrado Casati
Orchestra della Fondazione Arturo Toscanini
Maestro Concertatore e Direttore :
Pier Giorgio Morandi
Mise en scène, décors et costumes : Pier Luigi Pizzi
Enregistré le 13 octobre 2003 au « Teatro Municipale di Piacenza »
Sous-titres italiens, anglais, français et japonais
Texte de présentation en italien, anglais et français
R.A.I. / Bongiovanni AB 20003
(Durée 122mn.)
Aroldo, superbe de vitalité retrouvée
On sait que l’intransigeant Verdi déchirait les
premières moutures d’un opéra remanié par la
suite, on ne joua donc plus Stiffelio,
martyrisé à sa création par la censure qui coupa
rien moins que le Finale ! Notre époque ne connaissait donc
que Aroldo jusqu’à la miraculeuse découverte, en 1968, du mystérieux Guglielmo Wellingrode n’étant autre que la version autorisée par la censure de Stiffelio. Par recoupements entre « cet horrible Wellingrode »,
comme le surnommait Verdi avec mépris et amertume, et
d’autres précieux documents, l’exécution de Stiffelio
tel que l’avait conçu le Grand Homme de Parme devenait
ainsi possible et du coup, public et commentateurs découvraient
en cette version première un opéra plus original dans son
histoire, plus concis dans sa forme musicale, bref : plus
intéressant que Aroldo !
Tout ceci pour dire l’intérêt de ce DVD de
l’Opéra de Plaisance, en Emilie Romagne, redonnant
à Aroldo une belle vitalité que l’on croyait précaire…
Le mérite en revient à la qualité de
l’éxécution musicale mais également à
l’inventivité de la mise en scène… et, une
fois n’est pas coutume, commençons par cette
dernière, due à un grand Monsieur comme Pier Luigi Pizzi.
Une fois dépassée la contrariété de
découvrir à la place des costumes du XIIIe siècle
prévus par Piave, des habits de l’époque romantique
(1830), on se laisse prendre par cette « nouvelle
histoire » que le Maestro Pizzi nous raconte. Aroldo
n’est plus un chevalier saxon revenant des Croisades et porte
comme son beau-père Egberto et le séducteur Godvino un
uniforme à galons et hongroises, tandis que Lina et les autres
personnages évoluent dans leurs costumes 1830, plus sobres que
ceux Napoléon III contemporains de Verdi et de son Stiffelio.
Briano « pio solitario », comme dit le livret
(pieux ermite), porte quant à lui une bure foncée. Le
choix des couleurs se révèle important : Mina
revêt au premier acte une robe rouge vif marquant à la
fois sa faute, sa honte et son tourment, dans un contraste
évidemment saisissant par rapport aux autres personnages de la
réception du Finale I qui sont tous en noir. Il s’agit
d’un parti pris évident de P. L. Pizzi car à
l’époque, un tel noir complet
dans la mise, ne « faisait » pas
« soirée » comme de nos jours mais
signifiait le deuil. Mina troque heurueusement le rouge au
deuxième acte pour un superbe bleu nuit, en accord avec le tissu
de même nuance recouvrant les sièges très
Louis-Philippe de son père. A part le tourment de Lina un peu
trop ostentatoire au premier acte, la mise en scène règle
les gestes avec un bel équilibre, n’omettant pas les
gestes convenus comme les mains à l’épée, se
coordonnant si bien avec les cabalettes et les rythmes de ce
Verdi-là !
Un peu plus dur à « rentrer dans le
moule » de la mise en scène est le début de
l’acte IV devant se dérouler sur les rives du lac Loomond
car le bon Verdi s’est évertué à
recréer des sonorités très couleur locale
d’une Ecosse reculée, évidemment perdues par P. L.
Pizzi.
Le ténor Gustavo Porta
dans le rôle-titre offre une belle pâte de voix à la
chaleur et à l’éclat indéniables : il
est d’autant plus dommage que les aigus s’étranglent
parfois car son chant est marqué par
l’élégance et la sensibilité. On s’en
rend d’autant plus compte que l’excellence l’entoure,
à commencer par Adriana Damato,
Mina à la fois éclatante, dramatique et dolente. A peine
l’entend-on que l’on est frappé par son timbre de
velours flamboyant, ample rond et chaleureusement souple, avec des
graves consistants et impressionnants. Le baryton Franco Vassallo est très père noble,
dans la mise comme dans la prestance naturelle et le chant,
marqué à la fois par l’autorité et la
finesse. La jeune basse Enrico Giuseppe Iori
prête son timbre impressionnant de graves à
l’ermite, lui conférant une importance supérieure
à celle que le personnage possède. Valter Borin
est un Godvino efficace car ce rôle de séducteur, pourtant
ténor secondaire, doit être convaincant non seulement
dramatiquement mais également musicalement car il chante
suffisamment en soliste pour attirer l’attention sur lui. La
même efficacité concernait les rôles encore plus en
retrait des cousins de Mina : Elena, le mezzo-soprano Miriam Artiaco et Enrico, le ténor Antonio Feltracco. Les chœurs sont joliment préparés par Corrado Casati même si la musique ineffable que Verdi écrit pour les chœurs ne peut que les porter, toujours !
L’ « Orchestra Toscanini », comme on
l’appelle en raccourci, était celui du Maestro Gavazzeni,
c’est dire s’il était rompu aux belles
sonorités et à l’élasticité
d’une direction sachant être dramatique mais laissant
« respirer » la musique. Telle est fort
heureusement la direction que Pier Giorgio Morandi
imprime à cette belle formation et, pour ainsi dire, on peut
être rassuré dès la belle et longue ouverture (pour
laquelle le Signor Pizzi nous fait, Dieu soit loué, grâce
de la sempiternelle pantomime occupant la vision) car le Maestro prend
bien posément la « cantilène
donizettienne », selon le sympathique surnom bien
trouvé par un commentateur pour définir l’important
solo de trompette. Le Maestro Morandi s‘avère un
« concertatore » de premier ordre, donnant la
juste pulsation à l’œuvre. Unique petit point noir,
dont il n’est peut-être pas le seul responsable,
c’est la coupure du da capo
de l’impressionnante cabalette de Mina dont les écarts
redoutables ont de quoi effrayer son interprète. Réparons
à ce propos l’erreur appuyée du musicologue Marco
Beghelli dans le commentaire de la plaquette. Il parle en effet de
« l’ajout » d’une cabalette à
l’air ouvrant l’acte II et l’on croit tout
d’abord qu’une fois encore « ajout »
est employé pour « substitution » mais il
insiste encore en précisant entre parenthèses que
l’air était privé de cabalette dans Stiffelio.
Il n’en est rien, après la partie lente, Lina se lance en
effet dans l’entraînante cabalette « Dunque
perdere volete / Questa misera tradita !… »,
morceau électrisant au possible et que Verdi pourtant
n’aimait pas et voulut changer pour Aroldo… Tandis que
l’amateur, lui, est bien embarrassé de choisir entre la
cabalette de Lina (Stiffelio), électrisante au possible, et celle de Mina (Aroldo), plus inventive dans la forme et différemment impressionnante.
La région de l’Emilie Romagne comporte une enfilade de
cinq magnifiques théâtres principaux, placés dans
des villes éloignées seulement d’une trentaine de
kilomètres. On commence par celui de Piacenza (Plaisance)
où l’on a eu la bonne idée de produire et
d'enregistrer cet Aroldo,
puis l’on va d’émerveillement en ravissement en
découvrant ensuite les joyaux de Parme, Reggio
nell’Emilia, Modène et enfin Bologne. C’est dire
à quel point la valeureuse Casa Bongiovanni, implantée
dans la région, ne manque pas de pain sur la planche…
ou plutôt de « planches » tout court,
pouvant soutenir d’autres aussi belles réalisations.
Grâce au mérite de la maison d’édition
bolognaise, Aroldo figure en effet désormais non seulement dignement en DVD aux côtés de Stiffelio, mais retrouve une vitalité à laquelle on ne croyait plus.
Yonel BULDRINI
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ou sur le Site Bongiovanni
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