Avec Puccini
Sylvain FORT
Presses Universitaires
de France,
Paris, 2002, 214
p.
Voici un livre curieux, s'ouvrant et se clôturant par de sévères
critiques. Quoiqu'il se situe, selon ses propres termes, parmi ses bienveillants
partisans, Sylvain Fort se révèle parfois étrangement
négatif envers un musicien auquel il consacre une monographie. Que
ce soit ponctuellement (
La Fanciulla del west, le final de
Suor
Angelica) ou plus généralement, lorsqu'il traite la musique
de "kitsch", sinon carrément de superficielle. L'on croirait ce
livre écrit dans ces années 1960-70, lorsque les opéras
de Puccini étaient méprisés par les élites
intellectuelles. Désolé, mais le temps où ces oeuvres
étaient "détestées par les spécialistes et
adorées par le grand public" est révolu. Elles sont solidement
ancrées au répertoire, analysées par les plus grands
auteurs, et les jugements de valeur ne sont plus de mise depuis longtemps.
Tout comme cette bizarre estimation des genres que l'écrivain semble
affectionner : le quatuor à cordes serait-il plus "profond" que
l'opéra ?
Cela dit, l'ouvrage se révèle souvent intéressant.
Négligeant l'approche biographique, il s'articule autour de l'analyse,
essentiellement dramatique, des douze opéras. Analyse remarquable
par la pertinence (La Rondine, Il Tabarro) ou même l'écriture
(passionnante petite étude sur le tout début de Tosca).
Il s'efforce de démontrer l'art de Puccini en cernant l'adéquation
de la musique à l'intrigue. Il souligne également ce qu'il
appelle le "talent mimétique" du compositeur, grand créateur
d'atmosphère : deuxième acte de La Bohème,
prélude du troisième acte de Tosca, Turandot), tout
en déplorant un certain aspect superficiel, trop ëcomposé',
d'où ce terme de "kitsch" souvent asséné au lecteur.
Jolies pages sur la lumière dans l'oeuvre puccinienne (du soleil
mortel de Manon Lescaut à la glace de Turandot fondant
devant l'amour de Calaf), sur les relations de Puccini envers le vérisme,
sur la profonde unité des trois volets du Trittico. Côté
anecdotes, on lira avec intérêt quelques lignes sur les livrets
que Puccini, quoi qu'intéressé, n'a jamais mis en musique
(Pelléas et Mélisande, L'Oiseau bleu, La Faute de l'Abbé
Mouret, La Femme et le Pantin), sur la manière pas très
reluisante dont il "chipa" le projet de Tosca à son collègue
Franchetti, sur ses relations avec les femmes ou... le fascisme.
Livre intéressant donc, mais pour amateurs avertis plutôt
que pour néophytes. Dommage pour ce qui se voulait un vade-mecum.
Bibliographie et discographie plus que succinctes.
Bruno Peeters
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