C  R  I  T  I  Q  U  E  S
 
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Gérard Lesne

Arias & Cantatas

1. Johann Michael Bach (1648-1694), 
Ach wie sehnlich wart'ich der Zeit
2. Johann Christoph Bach (1642-1703), 
Ach, daß ich Wassers gnug hätte
3. Johann Sebastian Bach (1685-1750),
Widerstehe doch der Sünde (BWV 54) :
a) aria : Widerstehe doch der Sünde
4. b) recitativo : Die Art verruchter Sünde
5. c) aria : Wer Sünde tut ...
6. Johann Michael Bach,
Es ist ein großer Gewinn
7. Georg Melchior Hoffmann (1685-1715),
Schlage doch, gewünschte Stunde
8. Johann Christoph Bach,
Wie du bist du denn, O Gott : a) Wie du bist du denn...
9. b) Ach Gott ...
 10. c) Ich dacht' du würdest mich ...
 11. d) Begehrst du Herzensangst ...
12. Johann Michael Bach, Auf, laßt uns den Herren loben
 

Gérard Lesne, alto
Il Seminario Musicale

Enregistré en novembre 2001
à la Chapelle Sainte Geneviève de Versailles

2002 - DDD - Notice en anglais et en français
Naïve E 8873



En souvenir de mon ami et inspirateur, Henri Ledroit

Gérard Lesne


 
 
 
 

Humble et sobre hommage à un mentor prématurément disparu, cette dédicace revêt une autre portée : Henri Ledroit a marqué d'une empreinte indélébile ce répertoire et Gérard Lesne sait qu'en reprenant - à deux titres près (Es ist ein großer Gewinn et Wie du bist du denn, O Gott) - le même programme, il s'expose à la comparaison. Disons-le d'emblée : le contre-ténor s'en tire avec les honneurs et dément la vilaine rumeur qui le disait sur le déclin, sinon fini. L'usure du timbre est flagrante, les aigus sont de plus en plus difficiles et certains changements de registre disgracieux, mais le musicien parvient à transcender ces faiblesses et renoue même, à certains moments, avec la ferveur piétiste ou la théâtralité brûlante qui caractérisaient ses interprétations du baroque italien. Ne vous contentez pas d'écouter la première plage pour vous faire une idée, car le disque commence plutôt mal. Dans l'aria Ach wie sehnlich wart'ich der Zeit, la voix est trop tendue, nous distraie de la musique et souffre cruellement du rapprochement, inévitable (calendrier des sorties oblige), avec la plénitude et les aigus lumineux de Carlos Mena (De Aeternitate, chez Mirare). Par contre, le sublime lamento de Johann Christoph Bach, Ach, daß ich Wassers gnug hätte, avec sa houle lancinante et ses appels martelés et déchirants dévoile la maturité de l'artiste, moins hédoniste ("maniéré" rétorqueront ses détracteurs), plus concentré et engagé. Une lecture plus nerveuse que d'ordinaire de la célèbre cantate Widerstehe doch der Sünde (BWV 54) ne manquera pas de séduire les mélomanes agacés par l'angélisme placide d'Andreas Scholl ou de James Bowman. La voce mezzana tout en clair-obscur de Gérard Lesne épouse idéalement l'âpreté et la noirceur de Wie du bist du denn, O Gott (à l'origine écrit pour une basse), chef-d'oeuvre de la déréliction, véritable "cri du désespoir" (Gilles Cantagrel), mais elle se pare aussi d'accents qui vous glacent le sang ou qui vous rassérènent par leur douceur. Il Seminario Musicale ne se contente pas d'accompagner, il innerve le discours d'une prodigieuse vitalité rythmique (cantate BWV 54), galvanise les récits fiévreux du soliste (Wie du bist du denn, O Gott) ou installe en quelques notes une atmosphère propitiatoire (sinfonia introductive d' Auf, laßt uns den Herren loben). A ce niveau d'inspiration et d'excellence, si le langage poignant et moins abstrait des prédécesseurs de Bach vous émeut, il faut bourse délier !
  


Bernard Schreuders



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