Cecilia
BARTOLI : a portrait
Documentaire sur
Cecilia Bartoli (1992)
Concert au Savoy
hotel (Londres 1991) :
1/ "Se tu m'ami"
(attrib. Pergolesi)
2/ "Sposa son disprezzata"
(Vivaldi)
3/ "In uomini,
in soldati" (Mozart : Cosi' fan tutte)
4/ "Deh per questi
istante" (Mozart : La Clemenza di Tito)
5/ "La Regata veneziana"
(Trois mélodies de Rossini)
6/ "Belta' Crudele"
(Rossini)
7/ "La Pastorella"
(Rossini)
8/ "Ariette à
l'ancienne" (Rossini)
9/ "Canzonetta
spagnuola" (Rossini)
10/ "Tanti affetti"
(Rossini : La donna del lago)
11/ "Voi che sapete"
(Mozart : Le Nozze di Figaro)
12/ "Una voce poco
fa" (Rossini : Il Barbiere di Siviglia)
Au piano : György
Fischer
Decca propose aujourd'hui en DVD ce portrait de Cecilia Bartoli, réalisé
voici quelques douze ans. Bien connue des mélomanes et des admirateurs
de la cantatrice romaine, cette bande, parue naguère en VHS, s'organise
en deux parties : un récital accompagné au piano, que précède
un documentaire réalisé alors que la mezzo-soprano gravait
à Venise un CD d'airs d'opéras de Rossini destiné
à commémorer le bicentenaire de la naissance du compositeur
(1992).
Ce documentaire s'ouvre sur un panoramique de la Cité des Doges
nimbée dans la brume, au son des premières mesures du "Bel
raggio lunsinghier" (extrait de Semiramide, créée,
comme on sait, in loco). Nous voyons ensuite une gondole qui emmène
la chanteuse jusqu'à La Fenice et l'on est tout ému de revoir
ce théâtre tel qu'il était avant l'incendie qui l'a
détruit. C'est là que se déroulent les sessions d'enregistrement
qui ponctuent tout le film et alternent avec des séquences réalisées
en divers endroit de la péninsule : Venise bien sûr, Rome
où Cecilia a vu le jour et la côte toscane où elle
avait choisi de résider. On y découvre une jeune femme spontanée
et chaleureuse : qu'elle prépare un plat de pâtes ou choisisse
ses légumes sur un marché, qu'elle savoure avec gourmandise
un verre de vin rouge, conduise sa Fiat 500 dans les rues de Rome ou esquisse
un pas de flamenco, c'est la joie de vivre et tout le soleil de la Méditerranée
qui éclatent ici. Des interviews de l'interprète, de sa mère,
du producteur de l'enregistrement chez Decca, retracent la biographie de
la chanteuse, la naissance de sa vocation, ses études musicales
et ses interrogations à propos d'une carrière qui prenait
alors son envol. Il est intéressant de mesurer le chemin parcouru
depuis et surtout de constater à quel point tout l'art de "La" Bartoli
est déjà bien présent. On reste pantois devant la
séquence où, tranquillement assise sur un rocher au bord
de la mer, Cecilia explique les différences qui existent entre la
façon dont on doit exécuter une vocalise chez Mozart et chez
Rossini et de se lancer tout de go pour illustrer son propos dans les roulades
de l'air de Sextus "Parto, parto" suivies de celles non moins périlleuses
du "bel raggio ", le tout avec une aisance déconcertante.
De fait, Mozart et Rossini constituaient alors le répertoire
d'élection de Bartoli comme en témoigne, en seconde partie,
le récital filmé à Londres l'année précédente.
Accompagnée au piano par György Fischer, elle propose une Despina
mutine à souhait, un Sextus attendrissant et un Chérubin
d'une troublante sensualité. Alternent quelques mélodies
de Rossini, notamment la célèbre Regata veneziana,
dont elle livre ici rien moins qu'une version de référence,
et la savoureuse Canzonetta Spagnuola, popularisée par Marilyn
Horne, qu'elle interprète d'une manière toute personnelle.
Le rondo final de La Donna del lago, d'une virtuosité et
d'une précision ébouriffantes, concluent un programme qui
avait débuté par deux arie antiche dont on retiendra
surtout l'émouvant "Sposa, son disprezzata" tiré de l'opéra
Bajazet,
qui semble annoncer le fameux CD consacré à Vivaldi qui allait
faire d'elle une star mondialement connue. En bis, c'est une Rosine passionnée
et volontaire qui semble réinventer l'incontournable "Una voce poco
fa" et qui nous donne à espérer que la chanteuse reviendra
un jour vers ce répertoire dans lequel elle a encore assurément
beaucoup à dire.
En résumé, ce portrait radieux et nostalgique à
la fois constitue un témoignage précieux sur l'art et la
personnalité attachante d'une grande dame du chant à l'orée
d'une carrière que l'on devine déjà prestigieuse.
Christian PETER
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