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Giacomo CARISSIMI (1605-1674)

Vanitas Vanitatum
Serenata sciolto havean dall’alte sponde (i naviganti)
Missa sciolto havean dall’alte sponde

ténor : Hans-Jörg Mamel 
Choeur de Chambre de Namur
La Fenice
Jean Tubéry : Cornetto & direction

CYPRES 1644, durée totale : 67’03
enregistré en juillet 2005 à l’Église de Bolland (Liège – Belgique)


« Omnia vanitas et umbra sunt » (Tout est vanité et jeu d’ombres)


L’enregistrement que nous offre Jean Tubery est à l’image de ce sobre digipack, où figure un mélancolique clair-obscur de Georges de la Tour. D’un côté, Madeleine, de profil, contemple tristement la lueur vacillante d’une bougie. De l’autre, Jean Tubéry interprète un motet-oratorio rare, une cantate profane et l’unique messe attribuée avec certitude à Carissimi avec la même attention, la même ferveur et le même talent.

Tout d’abord, saluons la présence de la cantate amoureuse I naviganti, qui nous change des éternels et magnifiques oratorios dont le Romain s’est rendu le maître, et qui influencèrent tant Charpentier. Cependant, il faut bien avouer que Carissimi semble plus inspiré par la musique religieuse, ou alors que sa musique profane reste toute empreinte de l’onction et de la ferveur du sacré. Ce n’est donc pas une coïncidence si le premier et le dernier trio de cette pièce seront re-utilisés dans la Missa sciolto havean dall’alte sponde, il est donc très intéressant de comparer les deux morceaux ; le très touchant trio « Amanti, che dite ? » devenant une section du Christe. Quant au Vanitas Vanitatum, oscillant entre motet et oratorio, il repose sur la puissance d’évocation des passages choraux répétitifs, martelant un inébranlable « Vanitas vanitatum et omnia vanitas » pour mettre un terme aux envolées des solistes.

Ces derniers sont d’ailleurs rompus à ce répertoire et leur interprétation dénote une grande maîtrise des ornements, en dépit de timbres assez uniformes et d’une excessive retenue dramatique. Hans-Jörg Mammel tire son épingle du jeu sans peur et sans reproche, mais également sans lauriers avec une prestation appliquée, parfois impliquée, souvent affectée.

Pour le reste, ce qui saute aux oreilles dès la première écoute reste l’extrême cohérence de la réalisation de la Fenice et du chœur. On y sent un travail de groupe d’une précision sans faille, d’une clarté remarquable. Le Chœur de Chambre de Namur confirme sa réputation d’excellence avec des pupitres très denses - sans toutefois paraître écrasés - qui conservent une grande souplesse d’articulation. La Fenice, en effectifs réduits, irradie littéralement l’enregistrement par ses sonorités magnifiques, bénéficiant en outre d’une prise de son enveloppante et chaude. Les cordes, en particulier, délivrent des notes grainées chatoyantes et intenses, très suggestives, d’une subtilité confondante : l’on découvre avec stupéfaction que la douceur d’une soierie écarlate, le drapé plus rugueux d’un manteau de laine écrue ou le bruissement d’une fontaine au coin d’une rue romaine peuvent soudain naître d’un simple coup d’archet. De même, un cornet à bouquin ne peut imaginer d’autre paradis que d’être placé entre les doigts agiles de Jean Tubery dont la sonorité naturelle, « humaine », et sans acidité aucune demeure incomparable. Enfin, le continuo est irréprochable et imaginatif, incluant pour notre plus grand plaisir une harpe à trois rangs et un lirone.

 
 
Viet-Linh NGUYEN

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