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Hector BERLIOZ (1803 - 1869)

LA DAMNATION DE FAUST


Légende dramatique en quatre parties
Livret original de Hector Belioz et Almire Gandonnière
d’après la traduction du Faust
de Johann Wolfgang von Goethe par Gérard de Nerval

Marguerite, Marie-Ange Todorovitch
Faust, Michael Myers
Mephistopheles, Alain Vernhes
Brander, René Schirrer

Slovak Philharmonic Choir
Orchestre National de Lille / Région Nord-Pas de Calais
Jean-Claude Casadesus

Enregistré en public les 4 et 5 novembre 2003
à l’Auditorium du Nouveau Siècle à Lille.

2 Compacts Discs NAXOS 8.660116-17
CD 1 : 58’22 – CD 2 : 65’23



Le juste prix


Inclassable, voire dérangeante, La damnation de Faust d’Hector Berlioz se situe en marge des œuvres lyriques de son époque. Intitulée d’ailleurs « légende dramatique », elle s’apparente souvent plus à un oratorio qu’à un véritable opéra. Au disque, privé de l’appui d’une mise en scène, il appartient au chef d’orchestre de faire pencher la balance d’un côté ou de l’autre. Ou encore de rechercher un difficile équilibre. C’est le pari tenu par Jean-Claude Casadesus. Pari tenu et gagné !

Tout au long de l’enregistrement, le chef adopte en effet un ton épique sans céder pour autant à un excès de théâtralité. Pas de brillant mais de l’énergie et de la clarté, au détriment d’un certain romantisme. La toile symphonique s’habille de couleurs nettes et franches ; les teintes les plus sombres s’estompent ; le son s’écoule, limpide. Le Slovak Philharmonic Choir participe à l’impression en privilégiant les pupitres les moins graves. Ténor plutôt que basse, la proposition est originale dans cette partition où les chœurs martiaux abondent. L’orchestre finit même, lors du Pandœmonium, par prendre le pas sur les voix. Le chant des damnés gagne alors en raffinement ce qu’il perd en sauvagerie.

Cette sensation de clarté se retrouve aussi dans la prononciation des solistes : exemplaire. Des bouts entiers de phases dont on n’avait jamais réussi à comprendre le sens deviennent pour la première fois intelligibles. C’est la principale qualité de Marie-Ange Todorovich dont la Marguerite parait sinon trop compassée. La tessiture hybride du rôle, mezzo-soprano et soprano à la fois, gêne la cantatrice. Le timbre manque de sensualité, l’aigu semble tendu.

Les notes les plus hautes ne posent en revanche aucun problème à Michael Myers. Plus de dix ans après la version Gardiner, il ne possède toujours pas le format vocal de Faust mais la justesse et la franchise l’emportent encore et le ténor triomphe sans ambages des nombreux pièges qui lui sont tendus : l’ut-dièse du duo d’amour évidemment - l’aigu, on l’a vu, n’est pas un obstacle – mais aussi le cri désespéré de l’invocation à la nature ou celui vertigineux de la course à l’abîme.

La palme revient pourtant à Alain Vernhes dont le Méphisto pourrait, à lui seul, faire la valeur de l’enregistrement. Il faut mentionner de nouveau la science de l’articulation, tant elle éblouit ; il faut aussi souligner l’intelligence de l’interprétation, le mordant, l’ironie, la puissance qui la composent tour au tour pour qu’au final se dresse un portrait comme rarement accompli. Ce diable là ne fait qu’une bouchée du Wagner, un rien cabotin, de René Schirrer.

Enfin dernier atout non négligeable, le prix. Proposée par Naxos à un tarif plus qu’économique, cette Damnation de Faust peut prétendre en toute légitimité sinon à la référence absolue (mais en existe-t-il ? Colin Davis en 1973, souvent cité en raison de son affinité avec Berlioz, pâtit d’un Jules Bastin bien pâlichon et d’un Nicolaï Gedda trop maniéré), du moins à faire partie des quatre ou cinq versions qui restent en lice.



   Christophe RIZOUD

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