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Gioacchino ROSSINI (1792-1868)

L’ITALIANA IN ALGERI

Mustafa, Paolo Montarsolo
Elvira, Myra Merritt
Zulma, Diane Kesling
Haly, Spiro Malas
Lindoro, Douglas Ahlsted
Isabella, Marylin Horne
Taddeo, Allan Monk

Metropolitan Opera Orchestra & Chorus
James Levine

Mise en scène, décors & costumes, Jean-Pierre Ponnelle
Lumières, Gil Wechsler
Réalisation, Brian Large

2 DVD Deutsche Grammophon, 00440 073 4261




C’est bon l’écoeurement


Où l’on retrouve Jean-Pierre Ponnelle dans ses oeuvres ! Un Ponnelle égal à lui-même. Un peu grand-guignolesque ; pas très subtil ; d’un « décoratisme » boursoufflé. Oh ! Le joli vaudeville ! La drôle de pâtisserie !

Devant laquelle nous ferons la fine-bouche ? Que non ! Pourquoi se priver d’un spectacle tout simple ? D’un petit plaisir facile ? D’une représentation où, manifestement, tout le monde (avec ses moyens) a bien voulu jouer le jeu du premier-degré du metteur en scène ? Pas de sollicitations intellectuelles ici. Un peu de facilité, de superficialité dans ce monde d’ardents penseurs…

De la superficialité oui ! Mais de la superficialité raisonnée, nourrie, érudite. Voyez les arches du final du I : ce sont celles de la grande mosquée de Cordoue. Pour être simple on n’en est pas moins connaisseur de belles choses qui « font » crédible.

De la superficialité mais dans le bon sens du terme. Un jeu presque trivial (les petits gimmiks de la machine qui s’emballe à la fin du I) ; mais un jeu tout de même. Je vous dis : c’est délicieux de sombrer dans l’écœurement.

D’autant plus délicieux que le plateau reste bien solide. D’une solidité un peu proverbiale peut-être (Malas et Monk) mais qui emporte l’adhésion. D’ailleurs le public ne s’y trompe pas qui rit à gorge déployée (c’est très très audible et pas forcément très très distingué, mais ça « délimite » le débat).

Solide, James Levine l’est indubitablement. Solide et un peu plus. Bon, très bon chef de théâtre, comme toujours dans ce que DG nous rend de lui. Sans arrière-pensées ; léger, coloré, plus ou moins feutré quand il le faut et bruyant quand Rossini le demande. De la belle ouvrage en somme. Fidèle, au moins.

Solide , Douglas Ahlsted l’est aussi. Un peu bellâtre ; un peu léger. Loin de Florez et Blake. Un peu aigre ; un peu serré. Dépoitraillé juste ce qu’il faut et sans vrai panache. Mais musical.  Solide, je vous dis.

Solide, le couple des voix graves l’est indubitablement. Seulement solide ? Montarsolo frôle (il ne fait d’ailleurs pas toujours que la frôler) la caricature ; présence énooooooorme. La voix affiche plus que des problèmes, comme la ligne aussi. Hachée, elle lui échappe souvent ; l’aigu et le reste avec. Mais comme Horne, il institue un vrai dialogue avec le public, par-delà même la scène et l’œuvre ; une vraie complicité. Ca ne compte pas ça ?

Horne, justement, joue l’insolence. L’insolence de la petite femme meneuse de jeu (ici ça relève même de la revue ! ) ; l’insolence, aussi, des moyens. La voix n’est plus tout à fait ce qu’elle a été ; plus tout à fait identique à ce qu’elle était encore chez Scimone quatre ans plus tôt. Le lustre s’en est un peu allé ; le brillant aussi ; les passages fluctuent un peu (le premier air ; mais Marilyn y fait son tour de chauffe) et la virtuosité est, parfois, un peu éprouvée. Mais enfin, toute petite, rondelette, toute sanglée, presque boudinée dans son petit ensemble écossais puis, plus tard, avec son joli panache blanc sur le front, elle vous empoigne et le rôle et l’attention à bras le corps ! Elle vous fait lever l’oreille ; elle accroche le regard ; suscite le sourire ; fait même naître de tout petits frissons au creux des reins dans les assauts de Pensa alla patria ; vous amènerait presque la larme à l’œil dans Per lui che adoro, avec sa ligne chaude, enfin chauffée et moelleuse, et comme enivrée d’elle-même !

Je le redis, cette Italienne est facile, sur-décorée, sur-jouée et tout ce que l’on voudra. Mais avec sa mécanique précise, très bien huilée, sans à-coups (les deux finals sont un peu des modèles du genre) elle ne devrait pas trop peiner à trouver son public. Et puis, la facilité est une posture intellectuelle qui en vaut, parfois, une autre...


   Benoît BERGER

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