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Wolfgang Amadeus MOZART (1756-1791)
MOZART ARIAS
Le Nozze di Figaro
Giunse alfin il momento-Deh vieni, non tardar, o gioia bella
Voi che sapete che cosa è amor
Non so piu cosa son, cosa faccio
Giunse alfin il momento-Al desio di chi t’adora
Cosi fan tutte
In uomini, in soldati
Ei parte… Senti… Ah, no-Per pietà
E amore un ladroncello
La clemenza di Tito
Non piu di fiori
Idomeneo
Quando avran fine omai-Padre, germani
Chio mi scordi di te-Non temer amato bene, K. 505
Vado, ma dove ? K. 583
Alma grande, e nobil core ! K. 578
Magdalena Kozena, mezzo-soprano
Jos van Immerssel, pianoforte
Orchestra of the Age of Enlightment
Sir Simon Rattle
1 CD Deutsche Grammophon, 00289 477 5799
Le mieux est l’ennemi du bien
Alors… Comment commencer ? Drôle de tâche que
celle de devoir parler de cet album ! Sacrée gageure.
Mozart ; Kozena ; Immerseel ; Rattle. Il faut
reconnaître que l’affiche fait rêver. Elle, est une
mozartienne à l’humanité trouble ; un
Chérubin de velours incarnat ; un Idamante sculptural. Lui
(Rattle) fait le grand écart entre Rameau, Mozart et Mahler avec
une versatilité profondément intuitive. Elle sait
être friponne. Lui connaît la science de
l’allègement, de la ciselure des contre-chants comme peu.
Eux deux sont une somme de métier qui devrait faire merveille
dans ce programme-ci. Le métier ; le métier ;
le métier !
« Je crois que le petit air que j’ai fait pour la
Ferrarese plaira, si elle est capable de le chanter sans artifice, ce
dont je doute fort », écrit Mozart à sa femme
lors de la reprise des Nozze.
Artifice ! Aïe, le mot est dit. J’ai peur que ce beau,
ce très beau disque ne soit justement
« qu’un » feu d’artifices.
Brillant ; calibré ; millimétré ;
assurément impressionnant. Mais…
Mais il y a dans les têtes de nos musiciens trop de choses
qu’ils ne parviennent pas à oublier. Trop de
science ; trop de notes ; pas assez de naturel. Il y a un
soin du détail tellement fouillé, succulemment
apprêté que la vie s’y perd. Tant de son, tant de
nuances.
La démonstration est époustouflante. Rarement Fiordiligi aura connu un aussi beau rondo
du strict point de vue musical. La ligne en apesanteur susurrée
appuyée sur un souffle inépuisable est parée
d’étonnantes couleurs automnales, d’un sfumato
bruissant. La qualité du grave, à peine effleuré,
passe comme un songe. Le tableau est le même chez Susanne
simplement hors du temps. Et Vitellia connaîtra les mêmes
miracles, l’animation en plus. Fiordiligi, Susanne,
Vitellia ; je rajoute Ilia.
Vérification faite sur le coffret, Kozena est toujours bien
mezzo (même si le mot n’existait pas à
l’époque de Mozart et que la cantatrice a
déjà montré que Cléopâtre et autres
lui allaient comme un gant). Or Kozena, mezzo, ne varie rien, n’a
qu’une voix pour tout cela (cette voix fût-elle
exceptionnelle de moelleux, de colorations et de lumière
profuse) ; elle ne propose qu’un visage, qu’une pose
là où l’on aurait voulu des larmes, des pleurs, des
sourires. La musique est belle mais Mozart ne se contente pas de cela.
Mozart ne veut pas d’artifices.
A côté de cela, l’orchestre, excellent lui aussi,
doux et suave, confortable et presque épais ne nous dit pas
grand’ chose, ne nous raconte qu’une histoire convenue.
Beaux, très beaux instruments concertants. Mais pas
d’envols ; jamais. Une pondération
générale, un équilibre sensible, toujours, un
alpha et un omega très clairement énoncés. Le
début, la fin ; tout est dit. Rien, pourtant, de se qui se
cache entre les lignes de la partition, hélas ! De
là, Deh vieni est bien superficiel, Per pieta et Chio mi scordi di te frôlent l’enlisement.
Le Voi che sapete des Nozze
paraîtra bien emblématique. C’est la surprise
musicologique (ben oui ! On joue sur instruments anciens quand
même !). Un peu cheap
la surprise. C’est une version ornementée par
l’Italien Domenico Corri que l’on nous propose. Auteur
d’un Singers preceptor publié à Londres en 1810, le docte Corri a rajouté de-ci de-là quelques petites notes, quelques appogiature,
quelques détails dont on se fiche si ce n’est pour se dire
que ce Mozart-ci sent la savonnette… Un peu trop ! La
notice nous parle « d’améliorer le potentiel
expressif ». Voire ! Notes superfétatoires.
Trop d’intention hélas, tue le charme de cette musique qui
vaut parce qu’elle trace autant de portraits individuels,
saisissants, entêtants. Kozena a de la voix, de l’esprit et
du cœur ; Rattle aussi. Ils nous secouent, d’ailleurs,
avec un Chérubin fripon, alerte, garnement acnéique que
l’on voudrait prendre sous son aile ; ils nous
emmènent dans le sillage d’une Dorabella bouillonnante et
brouillonne. Le reste du temps, on reste un peu sur sa faim se disant
que, décidément, il manque quelque chose à cette
parfaite alchimie des timbres.
Beau marbre.
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