André CAMPRA -
François COUPERIN
Petits motets
LES ARTS FLORISSANTS
William Christie orgue positif,
direction
Paul Agnew haute-contre
Anne-Marie Lasla viole de
gambe
Catherine Girard, Maia Silberstein
violons
Charles Zebley, Ruth Unger flûtes
traversières
Campra
Salve Regina
Couperin
Audite omnes et expavescite
Respice in me
Salve Regina
Usquequo, Domine
Campra
Insere Domine
Couperin
Quid retribuam tibi Domine
Campra
Quemadmodum desiderat cervus
Florete prata (9:10)
Virgin Classics 7243 5 45720 2
9, enr. 2004, 72:52
Cher William Christie,
Il est inutile de rappeler votre passion et votre talent pour la musique
baroque française. Votre Atys de Lully a acquis la stature d'une
réalisation mythique, vos Grands Motets de Delalande nous ont fait
apprécier la délicatesse d'un compositeur trop souvent réduit
à ses fanfares tonitruantes et dînatoires. Passons sur vos
concerts et votre discographie prolixe : cette feuille n'y suffira pas.
Pourtant, après une Idoménée de Campra aux récitatifs
poignants, vous nous aviez déçu avec la parution récente
de ses Grands Motets (Virgin). La cohérence habituelle, le sens
de l'articulation et du détail semblaient évanouis, oubliés,
délaissés. Le grand Christie devenait impersonnel, mathématique.
Vous voilà revenu auprès du compositeur aixois, pour des
petits motets intimistes et italianisants. Couperin, Couperin le Grand,
est également là. Et je vous dis merci. Merci pour avoir
choisi ces oeuvres trop peu jouées, et merci pour nous avoir offert
un grand enregistrement, non par l'effectif mais par le coeur (sans h).
Vous tenez vous-même l'orgue de chambre avec brio et discrétion,
et la gambiste Anne-Marie Lasla manie son archet avec une grâce mélancolique.
Les oeuvres choisies sont, à l'exception du Florete prata, des plus
tristes, d'une grave sobriété. Vous avez étiré
les mesures, suspendu le temps, joué sur les respirations, les silences
et la réverbération de l'église où l'on imagine
aisément les Arts Flo, groupés dans la pénombre d'un
bas-côté. Paul Agnew est parfait. Techniquement, on ne trouvera
rien à redire, si ce n'est quelques ports de voix superflus. Mais
surtout, quelle émotion, quelle douloureuse mélancolie, quelle
fidélité au texte ! Certains de ces petits motets de Couperin
avaient déjà été magnifiquement interprétés
par Henri Ledroit (STIL). Il est impossible de comparer les deux lectures,
qui sont toutes deux très personnelles et très touchantes.
La prise de son est meilleure chez vous néanmoins.
Que dire d'autre ? Décortiquer les pièces, critiquer ici
un changement de tempo trop brutal, là un violon trop aigre, relèverait
du crime, car ce serait écouter sans entendre, au sens du Grand
Siècle de comprendre. Si la musique est langage, vous nous le prouvez
avec ce cri empreint de douceur accablée, de résignation
fervente, d'espoir timide. Après les Petits Motets de Lully (Harmonia
Mundi) que vous aviez enregistrés il y a bien longtemps et où
l'on sentait la lumière d'une Italie que le Florentin avait quittée,
vous nous offrez une obscure clarté qui nous tombe non des étoiles,
mais des Arts Florissants.
Je suis et reste votre très humble et très dévoué
admirateur.
Viet-Linh NGUYEN
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