BIRGIT NILSSON / VERDI
Macbeth
Ambizioso spirto... Vieni
t'affretta!
La luce langue
Una macchia è qui tutt'ora
Nabucco
Ben io t'invenni... Anch'io
dischiuso
La Forza del Destino
Madre pietosa Vergine
Pace, pace moi Dio !
Don Carlo
O don fatale
Birgit Nilsson, soprano
Orchestra & Chorus of
the Royal Opera House,
Covent Garden
Argeo Quadri (Août 1962)
DECCA "Classic recitals", 475
6413
Est-elle vraiment justifiée cette
étiquette "classical recitals" accolée au présent
disque de Birgit Nilsson ? La dame est, certes, à elle toute seule
un pan de l'imaginaire musical collectif, l'Isolde rêvée du
demi-siècle... Mais justement, Decca en nous rendant aujourd'hui
Nilsson dans un album "tout Verdi", a choisi de la présenter sur
des terres musicales qu'elle a peu fréquentées, et avec des
bonheurs divers. En Turandot, en Minnie, avec sa rage froide et l'airain
de sa voix, Nilsson a longtemps impressionné. Mais son Amelia du
Ballo, son Aida, placide iceberg descendant le Nil, ont pu laisser
dubitatif.
Le programme n'est pas en cause ici, alignant les tubes du maître
de Bussetto, non plus que l'accompagnement plus que professionnel de Quadri
(de bien dramatiques décibels, même, ma foi, comme c'est le
cas de l'intrada du premier air de Macbeth avec ses crescendi
diaboliques). Osons le dire tout de suite, mettons les pieds dans le plat
et jetons le pavé dans la mare: Nilsson porte la responsabilité
de son propre échec. La présence est simplement réfrigérante
et la première italienne venue, avec un rien de morbidezza,
fait mieux que la Suédoise.
De la mécanique, de la mécanique royale même, voilà
ce que nous offre l'artiste. De fait, il y a là un bagage technique
et même simplement vocal qui méritent le détour. Voyez
la solidité, l'ardeur guerrière du récitatif de Nabucco,
la manière crane de jouer le jeu meurtrier des écarts de
registres, le legato et les piani éthérés
de la cavatine. Voyez la puissance incantatoire des airs de Macbeth. Dans
ce contexte, même les graves de mezzo que l'artiste s'invente pour
Don Carlo (c'est un peu dommage tout de même pour un rôle
d'exact Falcon), vaguement poitrinés, écrasés et sentant
leur roture vocale, impressionnent, statufient l'auditeur. Mais comment
ajouter foi à une Leonora de la Forza qui semble indifféremment
héler un taxi ou demander le sel à son voisin de table ?
Une poignée d'airs pourtant impose l'achat, et ce sont ceux de
Macbeth. L'intégrale existe, chez le même éditeur,
avec Taddei en époux turpide. Mais il y a là un degré
d'accomplissement plus poussé peut-être, une fièvre
qui réchauffe soudain le tempérament de Nilsson, qui réveille
les ardeurs de sa Salomé, les hallucinations de son Elektra. C'est
aussi que la voix, avec son acier froid, ses reflets blancs coupants, son
tranchant, est parfaitement en situation. Le premier air est magistral
avec, pour la cabalette, des vocalises en chutes assassines. Le
second laisse derrière lui un gouffre béant. La scène
du somnambulisme enfin mérite, elle, pour toujours, d'être
un "classic". Allégée, nette, rêvée, sans moiteur
mais parcourue d'un effroi palpable, elle offre en triple piano l'une des
plus belles montées au contre-ré qui soit.
Trois airs, c'est bien peu dira-t-on. Soit, mais le reste (au moins
Nabucco et Don Carlo) vaut aussi pour ceux qui voudront découvrir
un instrument herculéen capable d'exploits techniques vertigineux.
Les autres iront chercher du côté de Macbeth des sortilèges
que l'écoute ne diminue pas... "Classic recital" disait la pochette...
Va pour ce classique là !
Benoît BERGER
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