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L’Opéra de Paris
Gouverner une grande institution culturelle

de Philippe Agid et Jean-Claude Tarondeau

Vuibert, février 2006





Les comptes d'Hoffmann



Ancien élève de l’ENA, Philippe Agid a été directeur adjoint de l’Opéra de Paris de 1995 à 2001. Jean-Claude Tarondeau est docteur en sciences de gestion de l’université du Texas et de celle de Paris-Dauphine.

On l’aura compris à la lecture de ce rapide pedigree, l’ouvrage dont il est ici question fait partie des trop rares livres factuels consacrés au fonctionnement de l’Opéra de Paris. Pas question ici d’anecdotes croustillantes, de billets d’humeur, de souvenirs ou autres considérations subjectives, mais enfin des éléments et des chiffres concrets.

Les auteurs nous proposent d’abord un rappel des modes de fonctionnement de l’Opéra depuis sa fondation en tant qu’Académie Royale de Musique en 1669. Un aperçu historique indispensable pour comprendre des habitudes de « gestion » profondément ancrées dans la culture de l’établissement et qui nous permet de mieux appréhender l’authentique révolution apportée par Hugues Gall : celle d’une gestion maîtrisée des dépenses face à une pratique centenaire selon laquelle on ne saurait exister si on ne dépense pas plus que ce que l’on gagne !

La plus grande partie de l’ouvrage est en effet consacrée à cette révolution et à l’incontestable réussite d’Hugues Gall dans la conduite de ses deux maisons malgré des marges de manœuvres extrêmement limitées comme en témoignent les nombreux tableaux détaillant subventions, billetterie, coûts fixes et variables des productions, et les résultats économiques de chacun des spectacles proposés sous l’ère Gall (à ce détail près que la répartition des dépenses entre ballet et lyrique n’est que partielle, faute d’une gestion analytique !). Le tempérament de l’homme, décrit sans complaisance mais avec une admiration certaine, n’est pas non plus étranger à cette réussite.

Certains aspects sont néanmoins passés sous silence : on aurait notamment aimé que les auteurs approfondissent le malaise syndical endémique de l’établissement et sa destructrice culture de grève. De même, la politique de diffusion (CD, DVD, …) est à peine évoquée : après la récente Tétralogie du Châtelet, on est en droit de se demander pourquoi l’orchestre de l’Opéra de Paris n’enregistre pas davantage que l’Orchestre de Paris !

L’ouvrage finit par un certain nombre de propositions originales. On notera en particulier l’ouverture du Palais Garnier durant une partie de l’été afin de satisfaire les attentes de milliers de touristes : une innovation dont les auteurs assurent qu’elle est financièrement équilibrée.

Seul bémol : quelques informations erronées sur les salles étrangères qui décrédibilisent certaines conclusions. Ainsi, la jauge du Metropolitan est de 3995 places (dont 195 debout) et non 3700, les tarifs ne varient pas en fonction des distributions mais le week-end, et les distributions des reprises ne sont pas nécessairement inférieures à celles des créations.

A ces quelques réserves près, un ouvrage indispensable pour qui souhaite comprendre en profondeur le fonctionnement de l’Opéra de Paris.


 
                                 Placido CARREROTTI


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