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Giuseppe VERDI
RIGOLETTO
Leo Nucci (Rigoletto),
Inva Mula (Gilda),
Aquiles Machado (le Duc de Mantoue)
Mario Luperi (Sparafucile),
Sarah M'Punga (Maddalena),
Milena Josipovich (Giovanna),
Giuseppe Riva (Monterone),
Andrea Piccinni (Marullo),
Chœurs et Orchestre des Arènes de Vérone.
Direction : Marcello Viotti (conductor)
Mise en scène de Charles Roubaud
Enregistré le 21 juillet 2001
DVD TDK
CHANTEURS SANS COMPLEXES
Ouvrage éminemment populaire et dans lequel les plus grands chanteurs se sont illustrés, Rigoletto
est paradoxalement mal servi par le DVD : on n’en trouve
environ que 5 enregistrements sur le vif et deux films
post-synchronisés.
Autre bizarrerie, le hasard des captations nous vaut deux duc de
Marcello Alvarez (à Sienne et à Londres), deux Gilda
d’Inva Mula (Vérone et Sienne) et deux Rigoletto de Leo
Nucci (Parme (1) et Milan).
Même filmé sur le tard, Leo Nucci reste un immense
Rigoletto, pâtissant néanmoins des conditions de la
captation. En effet, les arènes de Vérone ne sont pas le
lieu idéal pour les interprétations introspectives, et le
chanteur est obligé de surjouer pour les derniers rangs des
derniers gradins, alors que les caméras le filment de
près : un décalage accentué par la haute
définition qui renforce le côté
« cinéma » (donc réalisme) de
l’enregistrement.
Vocalement, Leo Nucci est toujours remarquable et, parmi les
interprètes récents, il n’est guère
comparable qu’à lui-même. On notera au passage
quelques prudences dans les suraigus facultatifs, autrefois
dispensés avec libéralités, mais le legato et la
maîtrise du souffle restent admirables, le timbre
inchangé, exempt de ce vibrato qui affecte les chanteurs
vieillissants.
A ses côtés, Inva Mula est une Gilda touchante et
crédible, plus en adéquation avec la prise de vue
rapprochée. Vocalement, mis à part une paire
d’aigus piqués escamotés, on admirera, là
aussi, une belle maîtrise du souffle, une science belcantiste et
une générosité certaine dans l’aigu (2) qui compensent largement un timbre un peu impersonnel.
Ancien élève d’Alfredo Kraus, Achiles Machado
n’en a pas les moyens mais campe toutefois un Duc de belle allure
vocale. Il fait preuve lui aussi d’une bonne technique, mais on
aurait souhaiter davantage de nuances piani, d’autant que le
timbre, un peu ingrat, n’offre pas de séduction
immédiate. Visuellement, le chanteur est à la fois
empoté et empâté, peu crédible en bourreau
des cœurs.
Mario Luperi est un bon Sparafucile, sonore et bien chantant toutefois
on peut préférer des voix plus noires dans ce rôle.
Sarah M'Punga est en revanche bien dépassée par les
exigences de la partition. Les autres rôles sont plutôt
moyennement tenus : le Monterone de Giuseppe Riva est
fâché avec la justesse, quant au page de Loredana Bigi, il
est carrément fâché avec la musique !
Cet enregistrement permet également de retrouver le chef
Marcello Viotti, trop tôt disparu. Sa lecture est plutôt
classique, théâtralement efficace, mais sans grande
variété dans la mise en perspective des pupitres.
La production de Charles Roubaud est conventionnelle, comme il se doit
à Vérone, mais sans grand luxe : des décors
mastocs, des costumes trop peu variés (et dans des tons proches
de ceux du décor), une mise en place élémentaire
(pour le quatuor du dernier acte, les deux paires
d’interprètes sont séparés d’une
cinquantaine de mètres). Rien de scandaleux, mais rien ne
particulièrement satisfaisant non plus.
Finalement, l’intérêt du DVD tient surtout au fait
de retrouver ici l’ambiance d’une soirée aux
arènes : des chanteurs survoltés, un public
enthousiaste qui réclame les bis (et les obtient !!!) (3)…
Et c’est avec bonheur qu’on réécoute en
boucle le duo de la vengeance ou tel autre passage électrisant.
Alors que la vague de l’intellectualisation systématique
semble gagner la plupart des grandes maisons d’opéra, cet
enregistrement est comme une bouffée de fraîcheur
spontanée et rafraîchissante.
Placido Carrerotti
Notes :
(1) En
ce qui concerne ce dernier, on ne peut que se féliciter de ce
nouvel enregistrement : vocalement inégalée, la
soirée parmesane tient plus du CD que du DVD tant la
qualité en est médiocre ; un DVD a connaître
absolument compte tenu d’une distribution exceptionnelle
captée à l’apogée de ses moyens :
Alfredo Kraus est le plus grand Duc de ces 50 dernières
années, Luciana Serra est idéale dans une tradition de
soprano léger et Nucci est le Rigoletto de sa
génération. Une soirée à regarder …
les yeux fermés !
(2) Pour
les amateurs de performances vocales, précisons qu’Inva
Mula donne l’ut dièse à l’unisson avec
Machado à la fin de la strette de leur duo mais que celui-ci
n’offre pas le ré à la fin de sa cabalette, ni
celle-ci le mi naturel dans « Caro nome » ;
Nucci et Mula concluent inévitablement le duo de la vengeance
par leurs aigus respectifs ; manquent ça et là
quelques autres aigus moins traditionnels comme celui sur
« un vindice avra » au démarrage du
« Si vendetta ».
(3) Le
duo « Si vendetta » et « La donna e
mobile » sont ainsi bissés, les interprètes
semblant y trouver autant de plaisir que les auditeurs.
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