Richard STRAUSS (1864-1949)
Der Rosenkavalier
(Le Chevalier
à la Rose)
Comédie en musique en trois
actes
Livret : Hugo von Hofmannsthal
Choeur du
Bayerische Staatsoper
Direction : Josef Beischer
Bayerisches Staatsorchester
Direction : Carlos Kleiber
Mise en scène et décors
: Otto Schenk
Costumes : Jürgen Rose
Réalisation : Karlheinz Hundorf
Gwyneth Jones (la Maréchale)
Manfred Jungwirth (Baron
Ochs)
Brigitte Fassbaender (Octavian)
Benno Kusche (Faninal)
Lucia Popp (Sophie)
Anneliese Waas (la duègne)
David Thaw (Valzacchi)
Gudrun Wewezow (Annina)
Albrecht Peter
(le commissaire de police)
Georg Paskuda
(l'intendant de la Maréchale)
Friedrich Lenz
(l'intendant de Faninal)
Hans Wilbrink (le notaire)
Norbert Orth (un aubergiste)
Francisco Araiza (un chanteur)
Dorothea Wirz, Maja Hake, Henela
Jungwirth (trois orphelines nobles)
Susanne Sonnenschein
(une modiste)
Osamu Kobayashi
(un marchand d'animaux)
Rudolf Schwab, Walter Brem,
Werner Liebl, Artur Horn
(quatre laquais de la Maréchale)
Elisabeth von Ihering
(une veuve noble)
Karl Schrader (un coiffeur)
Heinz Müller (un flûtiste)
Hans Mursch
(Leopold, valet du Baron)
Patrick Lepelt (Mohammed)
Enregistré au Bayerische Staatsoper
de Munich les 5 & 6 juin 1979.
2 DVD DG
00440 073 4072. 186'.
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Bühneorchester
der Österreichischen Bundestheater
Direction Talf Hossfeld
Choeur et orchestre du Wiener Staatsoper
Chef de choeur Dietrich D. Gerpheide
Direction : Carlos Kleiber
Mise en scène Rudolf Heinrich
d'après la production de
Otto Schenk
Costumes : Erni Kniepert
Réalisation : Horant H. Hohlfeld
Felicity Lott (la Maréchale)
Kurt Moll (Baron Ochs)
Anne Sofie von Otter (Octavian)
Gottfried Hornik (Faninal)
Barbara Bonney (Sophie)
Olivera Miljakovic (la duègne)
Heinz Zednik (Valzacchi)
Anna Gonda (Annina)
Peter Wimberger
(le commissaire de police)
Waldemar Kmentt
(l'intendant de la Maréchale)
Franz Kasemann
(l'intendant de Faninal)
Wolfgang Bankl (le notaire)
Peter Jelosits (un aubergiste)
Keith Ikaia-Purdy (un chanteur)
Felicitas Equiluz, Marianne Satmann,
Elisa Zurmann (trois orphelines nobles)
Lotte Leitner (une modiste)
Ulrich Grossrubatscher
(un marchand d'animaux)
Adolf Tomaschek, Johann Reinprecht,
Franz Wimmer, Gerhard Panzenböck
(quatre laquais de la Maréchale)
Ingeborg Piffl (une veuve noble)
Heinz Totzler (un coiffeur)
Lukas Gaudernak (un flûtiste)
Jorg Schneider
(Leopold, valet du Baron)
Christine Dirnberger (Mohammed)
Enregistré en mars 1994 à
Vienne
2 DVD DG
073 00-9. 192'.
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Quinze ans séparent ces deux captations d'un Chevalier à
la Rose que réunissent le chef, Carlos Kleiber, le scénographe,
Otto Schenk, et l'éditeur, Deutsche Grammophon. La tentation est
donc forte de les commenter conjointement.
Depuis 1968, avec quelques ajustements, règne imperturbablement
sur ce Chevalier la production d'Otto Schenk, qu'aucun autre avatar
n'a pu remplacer définitivement dans la mémoire du public.
A quoi tient cette permanence ? A voir tant de brocards, de satins, de
stucs et de perruques, on pourrait un peu rapidement se gausser d'un esprit
suranné ou provincial.
Certes, pas un bouton ne manque, ni une dentelle, ni un toutou enrubanné.
Mais n'est-ce pas ce que voulaient justement Strauss et Hofmannsthal ?
Cette "comédie en musique" est inséparable du contexte, la
Vienne de Marie-Thérèse, ou plutôt la Vienne de Marie-Thérèse
telle que la rebâtissent librettiste et compositeur, ville qui en
est en fait le premier personnage, l'ordonnateur des sentiments et des
péripéties.
La cohérence de l'intrigue, de la psychologie des personnages,
ne résiste pas à une relecture ou à une transposition,
intimement liées comme elles le sont à la langue d'Hofmannsthal
et à l'écriture musicale, subtilement fidèle et décalée
à la fois. Ici, ni reconstitution historique, ni distanciation conceptuelle
ne sont de mise. Au poids des classes sociales, au heurt permanent des
comportements et des pensées, des conventions et des libertés
d'esprit ou de comportement, répond avec intelligence et souplesse
une musique qui est connivence perpétuelle avec l'auditeur.
Et si le décorateur de Vienne 1994, Rudolf Heinrich, adapte à
son idée le cadre dressé par Schenk en 68 (notamment au second
acte, où le palais de glaces de Faninal devient un intérieur
moins précieux mais tout aussi "parvenu" d'esprit) ; si le détail
des gestes et des mouvements de foule (troisième acte) semble mieux
maîtrisé à Munich qu'à Vienne, l'essentiel demeure,
cette fidélité pointilleuse à la dramaturgie et au
livret, qui semble aujourd'hui si fraîche, confrontée aux
bordels incontournables du troisième acte, aux acmés improbables
du lever de rideau du premier acte, ou au nunucheries agaçantes
d'une Sophie que l'on veut avant tout oie blanche, en dépit de la
réalité beaucoup plus subtile du personnage.
On a dit et redit la miraculeuse accointance de Carlos Kleiber avec
Richard Strauss. Et il sera bien difficile, sur le pur plan de la direction
musicale, de départager les deux documents. Kleiber heureux, rayonnant,
impérial, aux gestes amples et tendres, que la réalisation
de 1994 nous donne plus à contempler, délaissant quand elle
le peut le plateau pour un regard vers la baguette, où l'on vérifie
ce que l'on entend si bien, cette urgence, cette maîtrise pointilliste
qui n'oublie jamais la ligne, la cohérence, le devenir d'une phrase,
d'une dynamique ou d'un souffle. Et cette précision et cette indépendance
de geste, cette sobriété, main gauche enrobant l'orchestre
pour une valse retenue à l'extrême et enfin libérée.
Une lecture virtuose que l'orchestre de Vienne est peut-être plus
idiomatiquement enclin à épouser, dans le détail des
couleurs et des textures.
C'est sans doute sur la distribution vocale que le choix se fera, mais
il sera là encore difficile.
La Maréchale de Gwyneth Jones a la noblesse de celle de Felicity
Lott, la même splendeur vocale que l'on nous pardonnera de ne pas
départager - si ce n'est un vibrato plus présent chez Jones
- , et cette même compréhension aboutie du rôle que
leur a donné un long compagnonnage sur scène.
En Octavian, Brigitte Fassbaender est un vif-argent spontané
et splendide vocalement, plus crédible peut-être qu'un Anne
Sofie von Otter dont l'élégance innée sied particulièrement
à la présentation de la rose, mais moins à la rustique
Marianne. A son actif, quel chant, quelle aisance !
Ce sont alors les couples Octavian/Sophie qui emporteraient la décision
? Les deux séduisent... et c'est Sophie qui fait la différence,
beaucoup plus subtile et rayonnante avec Barbara Bonney qu'avec Lucia Popp,
tirant trop le personnage du côté ingénu. Et Ochs,
que la confrontation, malgré la valeur indéniable de Manfred
Jungwirth, attribue au vieux routier, Kurt Moll, au timbre plus somptueux.
Et bien quoi, on ne recommande pas un choix entre les deux ? Au-dessus
de nos forces, cher lecteur (trice). Quand on aime...
Sophie ROUGHOL
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