LE BARBIER
DE SEVILLE
Gioacchino Rossini (1792-1868)
Opéra bouffe en deux actes
Livret de Cesare Sterbini
D'après la pièce
de Beaumarchais
Männerchor des Bayerischen
Rundfunk
(chef de choeur : Michael Gläser)
Continuo : Christian Brembeck
Münchner Rundfunkorchester
Ralf Weikert
Rosina : Edita Gruberova
Berta : Rosa Laghezza
Conte Almaviva : Juan Diego Florez
Figaro : Vladimir Chernov
Don Bartolo : Enric Serra
Don Basilio : Francesco Ellero
d'Artegna
Fiorello, Ambrogio, un officier
: James Anderson
3 CD NIGHTINGALE NC004022
Enregistré en live les
21 & 23 novembre 1997
à la Philarmonie im Gasteig
-München
Publié en 2004
Malgré sa popularité,
Le
Barbier de Séville de Rossini ne compte pas tant d'enregistrements
parfaitement réussis ; à l'instar de
Carmen, La Flûte
enchantée ou
La Traviata, son extrême célébrité
a du mal à trouver sur disque des ensembles d'interprètes
homogènes et au meilleur de leur forme.
Dans le trio de tête, on peut citer sans doute la version de Galliera
avec Maria Callas (EMI), celle d'Abbado avec Teresa Berganza (DG) et celle
de Patané avec Bartoli (Decca) ; un peu en deçà, on
pourra évoquer celle de Marriner avec Baltsa (Philipps). Chacun
de ces enregistrements a ses avantages et ses défauts, celui de
Callas restant probablement le plus abouti en matière de théâtralité,
de style et d'homogénéité vocale.
Cette nouvelle version, si elle n'entrera cependant pas dans l'histoire,
est assez bonne. Principaux atouts : une direction d'orchestre bien tenue
sans être renversante, la qualité de certains chanteurs et
le frémissement apporté par le live.
Le fait que l'ouvrage regorge de mélodies célèbres
rend le public contemporain d'autant plus exigeant que bien des interprètes
ont chanté un jour l'air de Figaro, la cavatine de Rosine, l'air
de la calomnie ! Sans tomber dans les canons rigoristes actuels du bel
canto où l'on préfère parfois un bon musicien
avec une voix passable, à une belle voix pas toujours rigoureuse
avec le style, l'on peut regretter qu'Edita Gruberova (Nightingale est
sa maison de disque) n'ait pas renoncé à certaines coquetteries
parfois mal venues. Des sortes de fioritures appuyées ralentissent
le rythme, et ce dès l'entrée de la cavatine. Cela ne sert
à rien, n'apporte rien et déstructure l'aria.
Si l'on reste ébahi devant un suraigu somptueux (même si
elle ne se risque plus au contre-fa de la cavatine, qu'auparavant
elle osait), on regrette ces trilles dans le suraigus pour finir un air,
qui n'ont aucun sens. On attend quelque chose ensuite, qui ne vient pas.
C'est dommage, car son interprétation reste joyeuse, piquante, le
timbre est magnifique, la technique accomplie, l'aisance déconcertante.
Son acharnement dans le bel canto (jusqu'à l'absurde Robert
Devreux de Donizetti) est curieux. L'opéra romantique français
pourrait lui ouvrir de meilleures prestations.
L'autre divo de ce coffret est Juan Diego Florez - à l'époque
de l'enregistrement (1997) un inconnu - qui montre déjà un
timbre charmant, une technique très sûre et une qualité
tant vocale que stylistique assez rare. Certes, quelques aigus sont incertains
et l'on est loin du stupéfiant Rockwell Blake. Mais il a pour lui
une couleur méditerranéenne qui manquait à Blake pour
séduire. Sans être encore le raffiné Luigi Alva ou
le magnifique Francesco Araiza (le meilleur peut-être à l'époque),
Juan Diego Florez contribue pour beaucoup à tenir cette représentation
dans un niveau assez élevé. Le public ne s'y trompe d'ailleurs
pas !
Reste l'énigme du Figaro de Chernov... Comme pour son Germont
dans La Traviata à la Scala récemment, on ne peut
lui dénier un grand volume sonore, un timbre mordant, une couleur
de voix séduisante. Mais il semble, dans ce type d'ouvrages italiens,
incapable de caractérisation et de musicalité. Ce n'est pas
mal, mais ce n'est pas bien non plus. Il ne manquerait pas grand chose
pour qu'il soit un baryton à sa place partout ; mais qui l'entend
dans l'opéra russe, entend un autre chanteur, concerné, vivant.
Le reste de la distribution est assez moyen : Francesco Ellero d'Artagna
est un peu insignifiant en Basilio et Enric Serra simplement correct, avec
dans son air une tendance au "yaourt" comme disent les crooners.
Les seconds rôles, comme souvent sacrifiés, ne méritent
pas de mention particulière.
Reste une direction d'orchestre vaillante, avec un Ralf Weikert des
bons jours. Le rythme est bien maintenu tout du long, et sans livrer une
lecture très personnelle, une vraie bonne humeur musicale est sensible
jusqu'au final. Un enregistrement qui, sans révolutionner la discographie,
a de réelles qualités.
Jean VERNE
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