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Giovanni-Battista PERGOLESI (1710 – 1736)

STABAT MATER

Stabat Mater
En fa majeur, pour soprano, contralto et basse continue

Salve Regina
En fa mineur, pour contralto, cordes et basse continue

Salve Regina
En la mineur, pour soprano, cordes et basse continue

Dorothea Röschmann, soprano
David Daniels, contre-ténor

Europa Galante
Fabio Biondi, violon et direction

CD Virgin Classics N° 0946 3 63340 2 8
durée : 57 ‘ 13 (enregistré en 2005)




UN STABAT SANS GRANDE AFFLICTION…


Cette œuvre essentielle de Pergolese fut écrite au Monastère de Pozzuoli dans la Baie de Naples, où le compositeur allait mourir de la phtisie, peu de temps après, le 16 mars 1736.

Peut-être est-ce cette disparition précoce qui contribua à la renommée qui allait être la sienne à travers le monde et les siècles ; toujours est-il que, contrairement à bien d’autres œuvres baroques de la même qualité, elle possède une discographie riche et variée.

En effet, des chefs, formations, et artistes de tous bords l’ont enregistrée, aussi bien les « baroques de la  première heure », que les baroques confirmés et les « non baroques »… Citons pêle-mêle Michel Corboz, Claudio Scimone, Karl Richter, Ettore Gracis, Gérard Lesne et le Seminario Musicale, Vincent Dumestre et Le Poème Harmonique, René Jacobs, Christophe Rousset et les Talens Lyriques, Rinaldo Alessandrini et le Concerto Italiano, Antonio Florio et la Capella de Turchini, sans oublier, last but not least,…. Riccardo Muti.

En ce qui concerne les voix, on note la même diversité, le couple soprano / contre - ténor étant le plus fréquent, surtout parmi les enregistrements récents… Il n’empêche qu’une des versions de référence est celle d’Ettore Gracis, où Mirella Freni et Teresa Berganza font montre d’une musicalité, d’une beauté vocale et d’une justesse de ton qui semblent encore à ce jour inégalées…

Une telle variété dans les conceptions et les interprétations s’explique sans doute par le fait que, par sa grande modernité, ce Stabat Mater marquait le rejet du stilo antico au profit d’un genre nouveau, plus expressif, plus lyrique, qui allait d’ailleurs provoquer rapidement une vive polémique. Ses détracteurs lui reprochèrent principalement d’être trop marqué par le langage de l’opéra, et trop proche d’œuvres nettement plus profanes de Pergolese, comme la Serva Padrona, qui plus tard allait représenter le clan italien durant la fameuse Querelle des Bouffons. Le débat sur ce sujet du « théâtre sacré » se poursuivra jusqu’à la fin du XIXème siècle, principalement à travers les écrits de Joris-Karl Huysmans (« A rebours »).

Ce n’est donc pas un hasard si la version Freni / Berganza / Gracis nous touche encore tant, et si d’autres versions dites plus «orthodoxes » nous déçoivent souvent…

Et pour le coup, celle-ci n’échappe pas à la règle..

Pourtant, les voix sont indiscutablement belles et attachantes, et la lecture bien loin d’être sans intérêt. Oui, mais voilà, entre le contre-ténor-star au timbre charmeur et étrange, très « féminin » et la soprano montée en puissance et en intensité jusqu’à devenir une interprète de premier rang par sa conviction et sa véhémence, la « sauce » ne prend pas vraiment et les voix semblent pâlir de leur juxtaposition, d’autant plus qu’elles sont finalement très voisines.

Ce fait est encore plus patent quand on écoute les deux Salve Regina que chacun chante séparément, et où l’un et l’autre sont infiniment plus à l’aise…

Pour le Stabat, la voix si séduisante et si particulière de Daniels paraît mise sous le boisseau, comme étouffée, voire éteinte. Quant à Röschmann, si elle semble plus extravertie, on a quand même souvent l’impression qu’elle ne parvient pas vraiment à trouver ses marques.

Il faut dire que la direction de Fabio Biondi, trop sage, comme aseptisée, n’aide guère ses interprètes. Beaucoup trop rapide, elle ne « respire » pas assez et ne permet guère aux chanteurs de s’épanouir pleinement. De plus, le choix d’un effectif restreint pour l’orchestre, ne rend pas assez justice au profond dramatisme et au poignant lyrisme qui caractérisaient l’œuvre à sa création.

En conclusion, Biondi n’aura pas fait mieux que Rousset (qui dirigeait pourtant Andreas Scholl et Barbara Bonney), il aura même fait moins bien.

Quant à la version Gracis (1972, DG) avec les flamboyantes Berganza et Freni au sommet de leurs moyens, elle tient encore et toujours le haut du pavé.

Pour notre plus grand bonheur…



   Juliette BUCH

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