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Richard WAGNER (1813-1883)
Der Fliegende Holländer
(Le Vaisseau Fantôme)
Opéra romantique en 3 actes
Livret de Richard Wagner
Le Hollandais : Donald McIntyre
Senta : Catarina Ligendza
Daland : Bengt Rundgren
Erik : Hermann Winkler
Mary : Ruth Hesse
Bayerisches Staatsopernchor
Dir. Wolfgang Baugmart
Bayerisches Staatsorchester
Direction musicale : Wolfgang Sawallisch
Décors : Gerd Krauss et Herbert Strabel
Costumes : Gerd Krauss et Helga Pinnow-Stadelmann
Adaptation et réalisation : Václav Kašlík
1 DVD Deutsche Grammophon
Un Vaisseau d’ado
Tous ceux qui ont découvert Le Vaisseau Fantôme
adolescent ont sans doute rêvé de voir cet opéra
tel qu’il est dans le livret : avec navires voiles au vent,
tempête, brouillard etc.
Alors que tous ceux qui ont gardé une âme d’enfant
se réjouissent : DGG l’a fait... mais en 1974.
La mode était alors aux opéras filmés en studio et
en play back. La maison allemande nous ressort
régulièrement certains de ces
« films-opéra » plus ou moins
réussis.
Après Elektra ou Salomé de Götz Friedrich, les Pagliacci/Cavalliera Rusticana, Carmen ou encore Rheingold de Karajan (chef et metteur en scène), voici ce Fliegende Holländer
mis en scène par Vaclav Kaslik, l’
« extraordinaire tchèque aux talents
multiples » nous dit le livret. Metteur en scène
d’opéra, il collabora avec Böhm, Davis ou Boulez et
s’adjoint l’art de Joseph Svoboda pour certaines de ses
productions.
Le présent film a été intégralement
tourné en studio, et comme dirait Téléphone,
« ça se sent ».
De « grands réservoirs d’eau » ont
été utilisés, nous explique la notice, sur
lesquels flottent des maquettes, le tout souvent tourné au
ralenti. De gros seaux d’eaux sont envoyés sur les
choristes pour faire croire à de grosses vagues, des maquettes
de rochers parsèment le décor ici ou là, mais
après tout, l’ensemble n’est pas plus ridicule que
dans certains films de pirate.
Les scènes les plus convaincantes sont justement celles qui se
passent sur ou pas loin de l’eau, l’acte 1 notamment,
malgré quelques incongruités tel Daland se baladant sur
une barque en pleine tempête introductive ! Cet acte est
malgré tout filmé avec une caméra très
mobile, multipliant les plans et réussissant à camper une
ambiance convaincante.
En revanche, l’acte 2 accuse l’artifice et le décor
de carton-pâte pensé pour le théâtre.
Même la caméra se fait un peu moins imaginative.
Au 3° acte, cela tourne un peu à la catastrophe : la
« danse » des norvégiens, barbus et
bonnetés en bonne et due forme, fait penser au retour du boulot
des nains de Blanche-Neige tandis que les marins du vaisseau
fantôme, entre Hulk et Le Retour des morts-vivants, nous
exécutent pieds dans l’eau un mini-ballet des plus
savoureux...
Ca s’arrange pour les dernières scènes.
L’idée des filets de pêche séchant dans
lesquels semblent s’empêtrer (ou qui séparent)
Senta, Erik puis le Hollandais est intéressante. Le Hollandais
revenu sur son vaisseau a de l’allure et puis Senta saute
vraiment dans l’eau (mais rejoint le Hollandais avec qui
elle finit par couler...) et le Vaisseau Fantôme sombre vraiment
! Tout cela finit donc en « Hollandais
Coulant »...
La majorité des didascalies est ainsi respectée et on
cherchera en vain du second degré (pour un ouvrage qui s’y
prête tant, voir pour cela les différentes mises en
scènes qui ont été faites à Bayreuth par
exemple) dans cette vision très classique.
La prestation musicale est dominée par la direction enflammée de Wolfgang Sawallisch qui
nous gratifie de la version originale de l’ouvrage (les trois
actes sont enchaînés, pas de thème de
rédemption à la fin de l’ouverture ou à la
fin de l’opéra). Le dynamisme du chef, si ce n’est
sa violence parfois, font mouche. Il peut se reposer sur les superbes
troupes du Bayerisches Staatsoper, tant pour l’orchestre que pour
les chœurs.
La distribution n’est ni inoubliable ni indigne.
Le Hollandais de Donald McIntyre affiche un timbre d’airain, des graves somptueux et un bel investissement. Très bon également le Daland de Bengt Rundgren.
La Senta de Caterina Ligendza
n’expose pas un timbre très séduisant. La voix est
un peu mate et les aigus sont parfois durs et étriqués.
Pourtant, la Ballade a de l’allure. L’Erik d’Hermann
Winkler est assez frustre et, là encore, pas très
séduisant de timbre. Pourtant, ça passe. Le Pilote
d’Harald Ek est quant à lui sympathique.
Ce sont les chanteurs qui jouent dans le film, de manière
plutôt convaincante ma foi (malgré des costumes peu
seyants : le Hollandais tout en cuir, le col « pelle
à - grosse - tarte » d’Erik, les foulards sur
la tête de Senta...). On aurait cependant réclamé
un peu plus de subtilité, notamment de la part de Ligdenza, un
peu monolithique.
Evidemment, comme tout film de ce genre, le problème de la
synchronisation est parfois cruel tout comme le décalage entre
ce qu’on entend et ce qu’on voit (surtout pour Ligdenza ou
le Pilote qui semblent, à l’image, murmurer leur partie).
Un Vaisseau d’ado donc,
très premier degré. Pour la profondeur, on se
précipitera sur la mise en scène d’Harry Kupfer
à Bayreuth (1978-85) dont DGG nous a déjà offert
le DVD et dont nous avons loué la richesse et la
subtilité scénique ici-même.
Pierre-Emmanuel Lephay
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