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Cette discographie comparée de nos mamelles se fera sur base des deux intégrales « studio » que nous connaissons à ce jour : la première, datant de 1953, est ce qu’il convient d’appeler « la version originale » car elle reprend les acteurs de la création. Autour du chef belge André Cluytens, on retrouve donc Denise Duval, Jean Giraudeau, Robert Jeantet et comparses. La seconde intégrale, placée sous la direction de Seiji Ozawa ne verra le jour que près de 50 ans plus tard et se compose d’une équipe pour le moins cosmopolite. Il est aussi intéressant d’examiner la performance de Nathalie Dessay qui dans son disque d’airs d’opéras français nous donne une autre vision moderne de l’air d’entrée de Thérèse/Tirésias « non monsieur mon mari ! » *
André Cluytens – 1953 – EMI 5655652 Chœur
et orchestre du théâtre nationale de l’opéra comique. Denise
Duval [Thérèse, Tirésias, La cartomancienne] ; marguerite Legouhy
[La marchande de journaux, Une grosse dame] ; Jean Giraudeau [Le
mari] ; Emile Rousseau [Le gendarme] ; Robert Jeantet [Le Directeur] ;
Julien Thirache [Presto] ; Frédéric Leprin [Lacouf] ; Serge
Rallier [Le journaliste] ; Jacques Hivert [Le fils] ; Gilbert
Jullia [Le monsieur barbu]. Nous
voilà donc à l’opéra comique. Le décor stylistique est assez rapidement
planté : Robert Jeantet, honnête baryton qui chanta Wagner dans Faust
(Gounod) en 53’ aux côtés de Cluytens, nous impressionne d’entrée de jeu
par la clarté de sa diction. La voix – en elle-même – n’est pas bien grande
mais elle donne à ce prologue – véritable morceau de bravoure de l’œuvre
– un panache indéniable. Intervient ensuite Denise Duval, la fameuse Denise
Duval… on la trouvera blanche, vocalement maigrelette, pourquoi pas « criarde »
mais –sacrebleu !- quel mordant, quel petit bout de femme frétillant.
Duval est Thérèse malgré toutes ses lacunes vocales (qui d’ailleurs sont
tout à fait discutables). Encore une fois, la diction est impeccable et
le style –délicieusement rétro- nous renvoie aux meilleurs moments de
l’opérette française, à tout moment on s’attend à voir apparaître Pauline
Carton ou Arletty nous susurrer des mots d’amours à l’oreille en rrrrrrrrroulant
les « r ». Délicieux, disais-je ! Evidemment, on trouvera
désuète la manière de « dire » le texte, la prosodie a subi
de réelles mutations depuis 1953, mais cela fait en quelque sorte partie
de l’œuvre. Notre mari, Jean Giraudeau, a une voix petite et laide, c’est
le Luigi Alva français et s’il n’avait pas tant d’humour on le conspuerait
volontiers. Seulement voilà, ce gringalet chevrotant n’est-il pas la personnification
du mari abusé, forcé d’enfanter tout seul, comme un(e) grand(e) ?
Le reste de l’équipe fait son travail honnêtement, « ça sent le métier »
nous dirait le Journaliste. Quant au chef, il suit sa distribution avec
talent et bonhomie. S’agit-il d’un enregistrement idéal, fichtre non !
mais il a au moins le mérite de nous faire (sou)rire plus d’une fois.
Ce doit être là la vocation principale de l’œuvre, n’est ce pas ? *
Seiji Ozawa – 1998 – Philips 456504-2 Saito
Kinen Orchestra, Tokyo Opera Singers. Barbara
Bonney [Thérèse, Tirésias, La cartomancienne]; Akemi Sakamoto [La marchande
de journaux, Une grosse dame] ; Jean-Paul Fouchécourt [Le mari] ;
Wolfgang Holzmaïr [Le gendarme] ; Jean-Philippe Lafont [Le directeur],
Mark Oswald [Presto] ; Graham Clark [Lacouf]. |