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5 questions à Cyril Auvity

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Interview
16 juin 2003

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Le Retour d’Ulysse à Aix semble avoir lancé votre carrière. Comment s’est passée la rencontre avec William Christie ?

Il y a des choses dans la vie d’un chanteur qui tiennent de la bénédiction divine et je crois que ma rencontre avec William Christie en est un parfait exemple. En effet, à cette époque-là, je ne connaissais pas la musique baroque. Pour moi, Mozart c’était du baroque, et j’avais été engagé par le festival d’Aix pour jouer le rôle de Ramiro dans La Cenerentola. Seulement, William Christie cherchait toujours un Télémaque et Eva Wagner m’a demandé de chanter pour lui. Deux jours après, je lui présente ce que j’ai de plus baroque à mon répertoire de l’époque : le Messie de Haendel. La réponse de Bill ne se fait pas attendre : « votre voix est intéressante, mais votre anglais est effroyable… ». Voilà le premier contact. S’ensuivent alors pendant la création d’Ulysse de grandes discussions qui m’ouvrent les yeux. Je pose alors un regard tout neuf sur un répertoire immense et une nouvelle voix, la mienne, que je ne supposais apte qu’à chanter Mozart ou Rossini… Une vraie complicité s’est nouée depuis et tout au long des productions que nous avons faites ensemble, par après, il n’a cessé de me montrer le chemin. Que demander de plus…

Quelle est la part d’aisance naturelle et de technique dans une voix de haute-contre comme la vôtre ?

Sans vouloir entrer dans les détails, l’utilisation et la maîtrise de la voix mixte (mélange des registres de tête et de poitrine) est sûrement ce qu’il y a de plus difficile pour une voix de ténor. Il faut garder l’émission, soigner le timbre, garder la puissance et ce en changeant de registre tout le temps. Cela paraît donc très technique, mais entre aussi en compte la partie innée, la  » voix de tête  » qui fait toujours référence à notre voix d’enfant. Et une voix d’enfant travaillée permettra de retrouver plus facilement ce registre… Il s’agira donc dans le travail technique de soigner le passage (qu’il soit homogène, sans coup de glotte et sans changement de couleur), travailler l’agilité (pouvoir mixer progressivement sans perdre la flexibilité de la voix, lors de vocalises par exemple) et tenir une tessiture toujours aiguë même si le diapason est plus bas. Finalement, la part technique est bien plus grande que la part naturelle dans cette voix. Mais le choix que l’on fait de chanter en haute-contre est ce qu’il y a de plus naturel, car il existe, à la base, un amour inné pour cette musique et ce style…

Votre parcours témoigne d’un bel éclectisme, avez-vous néanmoins un répertoire de prédilection ?

Le répertoire avec lequel j’ai le plus d’affinités est la musique de scène française. Me séduisent : la langue, le style et la liberté d’interprétation. De plus, j’ai découvert la gestuelle baroque lors de la création de Médée de Charpentier à Toronto avec Hervé Niquet, et cela ajoute une dimension fantastique à l’interprétation. Pour ce qui est de se spécialiser, c’est l’air de cour qui me tend les bras. C’est la  » mélodie française  » de la musique baroque. J’affectionne particulièrement la mélodie française, donc c’est naturellement que je me tourne vers cette forme. Je viens de créer L’Yriade, un ensemble de chambre (violon, violoncelle, clavecin et voix) pour pouvoir jouer tout ce répertoire d’airs de cour qui est malheureusement trop peu fréquenté…

Vous avez pris part à la re-création mondiale d’I Strali d’amore de Cavalli, comment avez-vous vécu cette expérience ?

Le travail s’est fait en deux temps : un travail de découverte de la partition a eu lieu en amont et ensuite, nous avons eu la création proprement dite. Le premier travail fut un vrai casse-tête (partition incomplète, problèmes de distribution des rôles et de chiffrage…) et j’ai vraiment cru que tout cela n’en valait pas la peine. Puis nous nous sommes retrouvés pour la création et là, tout avait changé. La musique avait eu le temps de mûrir, chacun avait eu des axes de travail. Le  » stage  » avait porté ses fruits. C’est donc serein que l’on a présenté cette première, mais restera toujours en moi le cauchemar de l’exhumation de l’œuvre, tant le travail fut long, fastidieux et chaotique. Il faut saluer la prestation de Gabriel Garrido et d’Elyma, qui ont réalisé un travail sensationnel. Quant au travail personnel pour aborder une œuvre comme celle-là, c’est le même que pour une autre, sauf que l’on a aucune référence, alors il faut croire très fort en ses idées et en celles du chef et travailler dix fois plus…

Il y a un an, vous n’envisagiez pas d’enregistrer un disque comme soliste. Qu’en est-il aujourd’hui ?

Aujourd’hui, j’en suis toujours à dire  » il faut que je travaille, j’ai tout mon temps « . Je pense qu’avant d’avoir la maturité nécessaire pour le disque soliste, il faut que je fasse beaucoup de scène. En mettant de côté l’aspect purement esthétique, si je fais un disque soliste maintenant, il serait trop académique, pas libéré, pas ressenti. Et c’est exactement ce que je ne veux pas. Laissons le temps faire son travail et reposez moi la question dans cinq ou dix ans…

Discographie

M.-A. Charpentier, Leçons de Ténèbres, Cinq méditations pour le Carême. Le Concert Spirituel, Hervé Niquet. GLOSSA 2002 GCD 921604

J.-B. Lully, Les Divertissements de Versailles. Les Arts Florissants, William Christie. ERATO 2002 0927-44655-2

J.-B. Lully, Persée [Euryale et Corite]. Les talens lyriques, Christophe Rousset. Astrée 2001 E 8874

 

 

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