Les galas lyriques peuvent être la meilleure comme la pire des choses. Dans le premier cas, des cadors de la scène internationale viennent étaler leur virtuosité dans les passages les plus difficiles et les airs les plus émouvants du répertoire. Le Met s’est fait une spécialité de ce qui, pour les puristes, relève davantage du cirque que de l’art. On se rappelle en particulier le gala pour le départ de Sir Rudolf Bing, en 1972, disponible chez Deutsche Grammophon, le gala du centenaire de la scène new-yorkaise ou encore le 25e anniversaire de la présence de James Levine à la tête de ce théâtre. En 1991, renouant avec une lointaine tradition, le programme comprenait un acte de Rigoletto, un d’Otello et un autre de la Chauve-Souris.
Ces galas peuvent aussi marquer l’inauguration d’un nouveau théâtre et la vraie fausse ouverture de l’Opéra Bastille, le 13 juillet 1989, (dont la première saison n’a commencé qu’en mars 1990) reste dans les mémoires au moins autant pour l’assistance remplie de chefs d’Etat que pour le programme réglé par Bob Wilson avec une distribution internationale.
Deux ans plus tard, le 10 mai 1991, c’est le Teatro de la Maestranza de Séville qui était inauguré avec un plateau exclusivement espagnol – s’ils avaient pu, ils n’auraient sans doute programmé que des Andalous ! -, en smoking et robe de soirée. Le coffret proposé par Sony – déjà édité il y a vingt ans par RCA en CD et VHS -, bizarrement composé du DVD et d’un CD, fait défiler les gloires de la péninsule ibérique et personne ou presque ne manque à l’appel. Défilent sur la scène à peine décorée José Carreras, Plácido Domingo, Alfredo Kraus, Jaime Aragall et Pedro Lavirgen pour les ténors en surnombre ; Juan Pons, seul représentant des barytons ; et du côté des dames, les sopranos Montserrat Caballe et Pilar Lorengar, face à Teresa Berganza, seule mezzo.
On passera vite sur le résultat d’ensemble comme sur les détails. Bien sûr, on retrouve avec grand plaisir Kraus et sa technique ahurissante dans « La donna è mobile » (plus qu’en Tonio…), le grand Jaime Aragall en Cavaradossi ou la classe folle de Teresa Berganza (et quelles robes !). Pour le reste, on est dans la routine et surtout dans la fin de carrière plein de nostalgie. Les voix bougent beaucoup (Lorengar !) ou articulent encore moins que d’habitude (Caballe, sous la direction de Domingo). Les quelques extraits de zarzuelas (Carreras, après sa maladie…) maintiennent tant bien que mal l’intérêt jusqu’à la fin du DVD qui paraît bien long. Sony a décidément eu une bien drôle d’idée en ressortant ces bandes de ses placards. A réserver aux aficionados exclusivement, et si possible après pas mal de sangria bien fraîche.