Coup de tonnerre sur la Karajanplatz à Vienne. Le maestro suisse Philippe Jordan, Musikdirektor du Wiener Staatsoper depuis 2020, annonce dans une interview parue ce dimanche dans le quotidien autrichien Kurier, ne pas vouloir poursuivre sa mission au-delà de son contrat actuel, qui court jusqu’en 2025.
Plus encore que cette annonce, en soi retentissante, c’est sa justification qui la rend intéressante et qui va entretenir le débat sur les mises en scènes actuelles. « Ces deux dernières années m’ont confirmé que notre théâtre, en ce qui concerne la mise en scène, s’est engagé dans une voie funeste. Rarement dans ma carrière les mises en scène m’ont rendu heureux ».
A la question de savoir à quoi pourrait ressembler un renouveau du théâtre aujourd’hui, Jordan répond : « La solution ne peut pas être de poursuivre imperturbablement le chemin balisé du Regietheater allemand qui arrive à bout de souffle. Les chefs d’orchestre passent des mois, voire des années, pour certaines œuvres, à travailler la partition. Les meilleurs chanteurs se préparent pendant des années à un nouveau grand rôle. Mais chez beaucoup, pour ne pas dire la plupart des metteurs en scène actuels, je regrette un réel manque de préparation. Prendre un thème, inventer quelque chose autour ou l’actualiser de manière primitive, tout cela n’est pas de l’art au sens propre du terme ».
La patron du Wiener Staatsoper, Bogdan Roščić, arrivé en même temps que Jordan, et prolongé quant à lui jusqu’en 2030, donne toutefois une tout autre version ; pour lui, le chef d’orchestre suisse aurait bien aimé prolonger, « mais cela ne m’a pas été possible pour d’autres raisons. C’est pourquoi je ne souhaite pas commenter davantage ses déclarations, ce ne serait pas dans l’intérêt de l’Opéra d’État ni dans celui de Philippe Jordan ».
On aimerait en savoir davantage.