On ne présente plus l’Elisir d’amore dévoilé à Milan, non pas à la Scala, mais au Teatro della Canobbiana, par un Donizetti de 34 ans ce 12 mai 1832, sur un livret de l’incontournable Romani. C’est un miracle, musical d’abord grâce à l’inventivité, au sens du rythme et à l’intuition mélodique du compositeur, offrant notamment l’un des plus beaux airs du répertoire, la fameuse « furtiva lagrima ». Mais c’est aussi un miracle tout court : 1/ Donizetti sort alors d’un échec à la Scala avec le très sérieux Ugo di Parigi et voilà que l’autre institution lyrique milanaise d’alors lui demande de composer un « opera-comica » en quelques semaines, simplement parce qu’un autre compositeur l’avait laissé tomber dans l’intervalle. Et 2/selon Donizetti lui-même, un nouvel échec est à craindre puisque la distribution que lui propose la Canobbiana n’a rien de scaligère, sans être indigne, et il n’en veut pas. Il n’aime pas le ténor Genero (qui paraît-il bégayait), pas plus que le créateur du joli cœur Belcore, le Français Dabadie, pourtant fameux à l’époque et dont Donizetti juge qu’il ne vaut pas grand chose. Et pourtant, le triomphe est total et fera très vite le tour de monde pour ne jamais quitter l’affiche.
Il y a déjà presque 20 ans, une production fameuse de l’Opéra de Lyon, avec Franck Dunlop à la mise en scène et Evelino Pido à la baguette, consacrait le couple star Alagna-Gheorghiu dans cet Elixir plein de couleurs et d’inventivité. Ici la fin du premier acte, avec le très tendre « Adina credimi ». Et oui, il n’y a pas que la « furtiva lagrima » !