L’opéra et le bon goût : le sujet pourrait faire l’objet de milliers de pages. Les mélomanes, sur cette épineuse question, sont encore plus divisés que d’habitude. Certains trouvent absolument ignoble de crier comme ça, et retournent écouter Ian Bostridge en buvant une infusion tilleul. D’autres, plus modérés (l’opéra aussi a ses sociaux-démocrates), tolèrent que de grands artistes puisse étaler sans trop de vergogne des affects d’un goût douteux tant qu’ils en tirent de l’émotion, de la grandeur, de la magie, en somme la substantifique moelle de leur art. D’autres encore, complètement irrécupérables, aiment le mauvais goût sous toutes ses formes : les yeux injectés de sang qui roulent dans leurs orbites, les hurlements de chouette hulotte courroucée, les notes tenues évoquant moins un chant qu’un râle émis sous l’effet de l’insupportable pression qu’une porte bien lourde peut faire peser sur des doigts innocents,… ils en redemandent, même si cet assassinat musical n’apporte pas le moindre frisson de plaisir à un public tétanisé d’effroi. Cette vidéo est pour eux. Clément Taillia
—