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GRETRY, Zémire et Azor – Paris

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Spectacle
24 juin 2023
La Belle et la Bestiole

Note ForumOpera.com

3

Infos sur l’œuvre

Comédie-ballet en quatre actes d’André-Ernest-Modeste Grétry

Livret de Jean-François Marmontel, d’après le conte La Belle et la Bête de Jeanne-Marie Leprince de Beaumont

Création devant la cour à Fontainebleau, le 9 novembre 1771

Détails

Mise en scène
Michel Fau

Décors
Hubert Barrère et Citronelle Dufay

Costumes
Hubert Barrère / Maison Lesage

Lumières
Joël Fabing

 

Zémire
Julie Roset

Azor
Philippe Talbot

Sander
Marc Mauillon

Ali
Sahy Ratia

Lisbé
Margot Genet

Fatmé
Séraphie Cotrez

La Fée
Michel Fau

Les Ambassadeurs – La Grande Ecurie

Direction musicale
Louis Langrée

Opéra-Comique, vendredi 24 juin 2023, 20h

2023 est décidément une belle année pour Grétry en France. Quelques semaines après La Caravane du Caire, c’est au tour du non moins fameux Zémire et Azor de retrouver les planches. Si La Caravane est un réjouissant assemblage de styles divers, Zémire est simplement un opéra-comique, mais un des plus délicieux du genre. Inspirée du conte La Belle et la Bête (remis au goût français du jour 15 ans plus tôt par Jeanne-Marie Leprince de Beaumont) et transposée en Orient, l’œuvre fut composée pour les fiançailles de Louis XVI et Marie-Antoinette. Occasion parfaite pour Grétry de marier son style populaire très mélodique à l’élégance raffinée de la Cour en une féerie au charme entêtant qui conquit vite l’Europe entière. Beaucoup de passages seraient à citer, aussi bien pour la richesse de leur orchestration, leurs rythme et mélodie irrésistibles, la finesse de leur écriture que pour le naturel de leur prosodie, qui fait presque oublier la distinction entre les passages parlés en alexandrins et ceux chantés. Vraiment cette œuvre mérite mieux que le long silence dans lequel elle est tombée depuis quarante ans.

Louis Langrée à la tête de la trentaine de musiciens des Ambassadeurs et de la Grande Ecurie font vibrer cette musique avec panache et minutie, à l’image de ces surgissements de l’orchestre pendant le premier air d’Ali ou de ce subtil et pénétrant passepied au triangle mutin. Si les vents sont parfois un peu approximatifs, saluons le cor très sûr et exposé dans le dernier air de Zémire. Quel dommage que l’on ait organisé les applaudissements sur la dernière danse.

Le plateau est aussi de grande qualité dans une mise en scène hélas peu inspirée. On a connu Michel Fau plus fantasque et original : passé son inévitable travestissement (bien terne, comme un copier-coller affadi de ce qu’il a déjà fait sur cette scène), le propos est moins qu’illustratif. Cela ne manque pas de soin dans les costumes qui sont très chatoyants et travaillés (notamment la très belle robe de Zémire par Hubert Barrère de la maison Lesage). C’est déjà plus léger dans les décors : en guise de palais, un schéma de jardin à la française peint sur des pans de bois qui rétrécissent la scène (tout en renvoyant très bien les voix), et pour la maison de famille, une miniature sur tréteau, agrémentés de maigres accessoires (2 chaises, une table de banquet, un petit trône) c’est vraiment minimaliste et les éclairages sont insuffisants pour traduire le simple changement de climat après l’orage du premier acte. Et c’est franchement bâclé sur la direction d’acteur : passe encore qu’on ait laissé les danseurs choisir leurs mouvements pour le ballet (heureusement conservé) et que Fau se contente de jouer mollement une fée blasée et peu gracieuse ; on pardonnera moins que les chanteurs soient dirigés individuellement sans grande originalité ni humour, car leurs interactions sont simplement oubliées et manquent totalement de la verve qui anime la musique. Signalons tout de même que faire de la bête un insecte, plus répugnant qu’effrayant, n’est pas inintéressant et amène le monstre à bouger de façon inattendue. 

© Stefan Brion

Heureusement que tous les chanteurs réunis connaissent leur métier et comblent par leur engagement l’absence d’idées de la mise en scène. Séraphine Cotrez et Margot Genet sont deux sœurs bien différenciées qui savent donner vie au peu qu’elles ont à chanter. Sahy Ratia est un délicieux Ali : rôle bouffe qui peut sembler aisé alors qu’il est truffé de passages difficiles qui ne doivent jamais sentir l’effort sous peine d’en rompre le charme. Vivacité du jeu (quelles roulades !), clarté de la diction, ductilité du timbre et justesse de l’émission, tout suscite la sympathie autant que l’admiration. Marc Mauillon choisit d’incarner un Sander plus sonore, quitte parfois à durcir un peu trop son émission, on goûterait plus de délicatesse voire de fragilité pour un vieux père, tout en brillant de ses qualités habituelles : prononciation impeccable, solidité technique et puissance. Philippe Talbot déçoit un peu en Azor : pas tant pour les trous de mémoires en fin de spectacle (comblés par un très bruyant souffleur), que par son interprétation un peu superficielle du plaintif Azor. Ses airs au pathos certains mais léger peinent à émouvoir en raison d’une caractérisation trop monotone. Certes la voix est belle, bien placée, l’artiste appliqué, toutefois ces phrases répétées sans variation expressive nuisent à l’authenticité de l’émotion.

La reine du bocage, c’est sans conteste Julie Roset. Nous la quittions en ange kamikaze à Saint-Denis, on la retrouve idéale en royale fille de marchand. Ses aigus sont ronds et pleins d’harmoniques tendres, ses vocalises ont une agilité liquide, son medium une assise solide, et elle sait trouver un ton sincère pour incarner la fille aimante. Toutes ces qualités restent intactes dans le grand air italien de la partition « La Fauvette avec ses petits » : jamais la voix ne semble forcée, même dans les suraigus, cela coule de source, le canto di sbalzo est splendide (quels graves très proprement poitrinés) et les trilles ont la précision du battement d’ailes du colibri. Cela serait déjà remarquable, sans qu’en plus elle ne réussisse à teinter la première partie de l’air d’une certaine peur pour son auditeur, tandis que la seconde brille par sa mélancolie syllabique rendue avec une désarmante simplicité, et la reprise de la première éclate avec plus de courage, comme déjà certaine que cette parabole de l’esclavage a convaincu Azor de la laisser repartir. Toute proportion gardée à ce stade de sa carrière, Natalie Dessay réussissait le même exploit dans l’air des clochettes : rendre sensible la mélancolie d’un air pyrotechnique.

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Livret de Jean-François Marmontel, d’après le conte La Belle et la Bête de Jeanne-Marie Leprince de Beaumont

Création devant la cour à Fontainebleau, le 9 novembre 1771

Détails

Mise en scène
Michel Fau

Décors
Hubert Barrère et Citronelle Dufay

Costumes
Hubert Barrère / Maison Lesage

Lumières
Joël Fabing

 

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