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BIZET, Carmen – Orange (Chorégies)

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Spectacle
10 juillet 2023
Aussi surprenante que libre

Note ForumOpera.com

3

Infos sur l’œuvre

Opéra en 4 actes

Musique de Georges Bizet (1838-1875)

Livret de Henri Meilhac et Ludovic Halévy, d’après la nouvelle de Prosper Mérimée

Création à l’Opéra-Comique de Paris, 3 mars 1875

Détails

Mise en scène
Jean-Louis Grinda

Décors et costumes
Rudy Sabounghi
Costumes
Françoise Raybaud
Eclairages

Laurent Castaingt

Chorégraphie
Eugénie Andrin

Vidéos
Gabriel Grinda
Etudes musicales

Kira Parfeevets

Coordination chorale
Stefano Visconti

Carmen
Marie-Nicole Lemieux

Micaëla
Alexandra Marcellier

Frasquita
Charlotte Despaux

Mercédès
Eléonore Pancrazi

Don José
Jean-François Borras

Escamillo
Ildebrando D’Arcangelo

Zuniga
Luc Bertin-Hugault

Le Dancaïre
Lionel Lhote

Le Remendado
Jean Miannay

Moralès
Pierre Doyen

Lillas Pastia
Frank T’Hézan

Danseuse espagnole
Irene Olvera

Orchestre national de Lyon

Chœurs des Opéras Grand Avignon et de Monte-Carlo

Maîtrise de l’Opéra Grand Avignon

Direction musicale
Clelia Cafiero

Production de l’Opéra de Monte-Carlo,

de l’Opéra national du Capitole de Toulouse,

et de l’Opéra de Marseille

« Il est permis d’attendre, il est doux d’espérer ». Cet aphorisme de la célèbre cigarière a sans doute traversé l’esprit de ceux qui avaient pu entendre la Carmen de Marie-Nicole Lemieux au Capitole de Toulouse (dont nous étions) et qui souhaitaient la revoir dans le rôle sans oser croire que ce serait de si tôt. Mais c’était sans compter le coup de cœur de Jean-Louis Grinda pour l’incarnation habitée de la volcanique mezzo, longuement évoqué lors de la conférence de presse d’avril dernier. Pour réussir Carmen, il faut une Carmen charismatique. Et avec l’opulente générosité de la mezzo canadienne pas de crainte d’évanescence. C’est donc avec un vif intérêt que nous attendions cette Carmen.  Au final, il nous a été donner à voir une Carmen surprenante, car ayant essentiellement brillé par la direction d’orchestre de sa jeune cheffe. Nous attendions Marie-Nicole Lemieux, et nous avons eu Clelia Cafiero qui confirme  ici tout le talent dont elle a déjà fait la pleine démonstration à Marseille (voir l’entretien qu’elle nous a accordé)

La production présentée reprend la proposition inspirée de Jean-Louis Grinda déjà vue à Toulouse mais aussi à Marseille et Monte-Carlo. Le metteur en scène nous livre ici un regard en flash-back. Dans la pénombre de son cachot, Don José revit le début de l’histoire qui l’a conduit à l’irréparable. Il prend alors la pleine mesure de la marche inéluctable du destin. Sur le plan scénographique, un seul décor composé de deux blocs en mouvement qui évoquent les différents lieux de l’action, dont à merveille l’arène de mise à mort à la fois du taureau et de Carmen. Dans cette vision, on évacue les simagrées pseudo érotiques et les postures exagérément aguicheuses, trop vues par ailleurs pour se concentrer sur la vérité des personnages. Don José est un homme dangereux et violent, Carmen n’est pas une séductrice mais une amoureuse éperdue de la vie, et Michaëla qui est loin d’être une oie blanche cherche à comprendre ce qui lui échappe. A cet égard, est parfaitement bienvenue l’idée de la faire apparaître à la fin de l’acte premier, comme témoin impuissant d’une relation destructrice. Elle ne cessera d’ailleurs de ponctuer l’action de sa présence comme un enquêtrice de l’ombre. L’inspiration du spectacle est aussi flamenca, par la présence d’Irene Olvera, danseuse virtuose qui émerveille par la maitrise de son art à un si jeune âge. Lien vivant entre les actes, elle semble elle-même une projection de Carmen préfigurant avec brio le drame final dans un ballet subtil tenant à la fois de la symphonie et du requiem. Si la mise en scène est un écrin intéressant, elle n’est peut-être pas tout à fait adaptée à un théâtre de la taille de l’antique édifice d’Orange. Les quelques éléments de scène n’occupant pas tout l’espace, les chanteurs doivent alors savoir se mouvoir et projeter leur voix sur l’immense proscenium romain.

Et force est de constater qu’ils ne semblaient pas être tous à l’aise dans l’exercice. Heureusement, dans la fosse officiait Clelia Cafiero qui est un modèle de précision et d’attention donnée aux chanteurs. Véritable métronome de la soirée, elle a sans cesse veillé à maintenir la cohérence musicale et vocale. Ici, pas d’effets superfétatoires, pas de dramatisation à outrance de la partition, comme on l’entend trop souvent, surtout à l’acte final, mais une sobriété pétrie d’un magnifique travail sur les couleurs, avec un constant souci de l’équilibre fosse/plateau. Une étoile de la direction est née, dont il sera désormais d’autant plus facile de suivre la trajectoire que la France l’a adoptée, notamment l’Opéra de Tours qui en a fait sa cheffe principale invitée. L’Orchestre national de Lyon, sous sa conduite, confirme ici son affinité élective avec la musique française.

L’homogénéité de la distribution, composée pourtant d’excellents et talentueux chanteurs, est apparue quelque peu contrastée, ce qui est sans doute dû à une fin de saison intense pour certaines des têtes d’affiche. Comme à Toulouse, Marie-Nicole Lemieux assume pleinement toutes les composantes de l’incandescente gitane. Elle nous propose plus qu’une interprétation, une mise en abyme. Cette Carmen est gouailleuse, pulpeuse, troublante, touchante, mais jamais impudique, démontrant ainsi que le personnage n’est pas affaire de physique mais bien d’interprétation. Grâce à une palette sonore impressionnante, elle fait évoluer son personnage tout au long de l’œuvre. Le premier acte a pourtant été assez délicat à négocier, Habanera comprise, la chanteuse ayant peiné ici à montrer ce dont elle est pourtant habituellement capable, à savoir une voix sombre et brillante à la fois, une formidable puissance, et un savant contrôle de tous les registres de la voix. Il a fallu attendre le quintet du second acte et le trio des cartes du troisième, pour qu’enfin Marie-Nicole Lemieux se libère et fasse entendre de magnifiques sons de poitrine, et une belle intensité vocale et émotionnelle dans le duo final.

En Michaëla, Alexandra Marcellier a également connu une entrée en matière quelque peu délicate par un duo du premier acte en demie teinte. Elle s’est toutefois ensuite fort bien ressaisie, en délivrant un beau moment de chant dans « Je dis que rien ne m’épouvante » tout en subtilité et nuances, avec le timbre et les couleurs qu’on lui connait,  lui valant d’ailleurs des applaudissements chaleureux du public, amplement mérités. En Don José, Jean-François Borras possède un beau timbre mais présente parfois une émission tendue qui a pu affecter l’homogénéité de la ligne de chant dans « La Fleur que tu m’avais jetée ». Le si bémol aigu n’est en outre pas tenu. L’incarnation est toutefois pleinement crédible dans la violence du personnage. Le baryton Ildebrando d’Arcangelo est passé hier soir à côté de son sujet en Escamillo. Le registre grave manque d’assise et les notes tendent à se perdre. En outre, le baryton italien n’évite pas les écueils de la forfanterie virile habituelle.

Les seconds rôles sont en revanche magnifiques et méritent d’être cités :  en premier lieu, l’excellent Pierre Doyen en Morales, à la voix claire et bien projetée, dotée d’un beau timbre. Le baryton belge avait d’ailleurs superbement incarné en 2018 Escamillo dans une production de Carmen pour Opéra en plein air. Il a donc parfaitement l’étoffe du personnage et peut constituer une option pertinente pour une distribution future. Charlotte Despaux porte une superbe Fransquita. La voix est riche, soutenue, l’aigu solaire. Eléonore Pancrazi, pétillante Mercédès, n’est pas en reste. Cette voix qui avait attiré l’attention en Urbain dans Les Huguenots à Marseille, confirme ici toute ses qualités : un timbre séduisant, une délicatesse du chant où elle déploie sa voix avec charme et sensibilité. Une artiste à suivre. Luc Bertin-Hugault livre un Zuniga plein d’autorité. Quant aux Dancaïre de Lionel Lhote et Remendado de Jean Miannay, ils complètent avec brio la distribution en donnant une belle présence vocale et scénique au duo de contrebandiers. Citons également la savoureuse interprétation d’acteur de Franck T’Hézan en Lillas Pastia.

La Maîtrise de l’Opéra Grand Avignon, parfaitement préparée, a livré une interprétation de « La Garde montante » d’une belle homogénéité, unie comme un seul homme autour de la jeune danseuse Irene Olvera à peine plus âgée qu’eux. Les chœurs des Opéras Grand Avignon et de Monte Carlo se sont distingués par l’amplitude et la passion de chacune de leurs interventions. Une Carmen au visage inattendu (huée à tort par des esprits chagrins au rideau final), qui n’a pas été tout à fait celle que l’on attendait…mais qu’il a été doux d’espérer.

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Musique de Georges Bizet (1838-1875)

Livret de Henri Meilhac et Ludovic Halévy, d’après la nouvelle de Prosper Mérimée

Création à l’Opéra-Comique de Paris, 3 mars 1875

Détails

Mise en scène
Jean-Louis Grinda

Décors et costumes
Rudy Sabounghi
Costumes
Françoise Raybaud
Eclairages

Laurent Castaingt

Chorégraphie
Eugénie Andrin

Vidéos
Gabriel Grinda
Etudes musicales

Kira Parfeevets

Coordination chorale
Stefano Visconti

Carmen
Marie-Nicole Lemieux

Micaëla
Alexandra Marcellier

Frasquita
Charlotte Despaux

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Don José
Jean-François Borras

Escamillo
Ildebrando D’Arcangelo

Zuniga
Luc Bertin-Hugault

Le Dancaïre
Lionel Lhote

Le Remendado
Jean Miannay

Moralès
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de l’Opéra national du Capitole de Toulouse,

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