La Bretagne est fertile terre de festivals. Si les musiques actuelles en sont la floraison la plus connue, la région abrite également un large maillage de festivals de musiques classiques de qualité, qui sont d’ailleurs les premiers à s’être structurés en fédération au sein de la FFMCB. Le festival de Musique Sacrée de Saint Malo en fait partie depuis l’origine et propose au cœur de l’été un mois de concerts de qualité dont ce Deutsches Requiem vibrant sous la voûte de la cathédrale malouine.
La proposition accueillie est celle du Chœur de chambre Melisme(s), institution régionale incontournable en résidence à l’Opéra de Rennes, qui accueillera d’ailleurs ce programme début octobre – avec d’autres solistes. Là, c’est la version pour deux pianos qui se donnera à entendre, tandis que dans la cité corsaire, l’organiste Guillaume Le Dréau en propose une adaptation pour orgue de chœur.
Un choix compréhensible mais pas toujours heureux car, si l’interprétation toute en finesse n’est pas en cause, par exemple dans le second numéro, en revanche certaines harmonies, certains choix de jeux parasitent régulièrement l’écoute et desservent le propos.
Les deux solistes, pour leur part, assument fort bien leurs quelques interventions. Nicholas Crawley, en dépit de vocalises manquant de netteté apporte à sa partie son beau timbre rayonnant et bien projeté tandis qu’Elsa Benoit n’a qu’un air pour nous faire profiter de l’articulation au laser de son soprano épicé. La voix est bien conduite, le focus excellent.
C’est naturellement l’Ensemble qui assume l’essentiel de la partition. Il connaît bien le compositeur allemand dont il vient de presser au disque un programme Brahms le Tzigane de belle facture. Il régale l’oreille d’un magnifique travail des nuances, des lignes mélodiques, comme dans le très beau « Denn alles fleisch, es ist wie Gras ». Si la diction se perd dans la nef, les entrées sont moelleuses, les finales impeccablement précises. Intentions, émotions sont, pour leur part, bien présentes sous la direction de Gildas Pungier, tour à tour dansante ou à peine esquissée, toujours expressive et parfaitement suivie par un chœur constitué de longue date, très à l’écoute:
Recueillement dès le « Selig sind, die da Leid tragen », tendresse indicible dans « Wie lieblich sind deine Wohnungen ». « Denn wir haben hie keine bleibende Statt » pourrait se teinter de plus de désespoir au départ et demande encore quelques réglages tant l’exubérance sonore risque de brouiller le son mais apporte bien le puissant déferlement attendu dans cette page sublime. Avec « Selig sind die Toten » le travail des timbres enrobe d’une grande douceur cet ultime morceau, appellant paix et lumière dans les cœurs affligés par la perte.