Pour cette nouvelle soirée du festival de Rocamadour, le cadre hors-norme de la Basilique St-Sauveur accueille un concert au titre intrigant lorsque l’on n’est pas latiniste distingué, et qui trouve son explication dans la dernière œuvre de ce programme nourri d’ambitieuses découvertes : Gloria Sveciae, c’est la Gloire de la Suède.* Cap au nord donc, mais pour une soirée qui alterne principalement latin et allemand. En effet, comme nous l’apprend la feuille de salle, à l’époque où « Louis XIV cherche à construire un goût français monolithique, le roi Gustav de Suède, pour sa part, aspire à la variété, la singularité, le cosmopolitisme. »
L’Ensemble Correspondances donne ici pour la première fois ce programme construit autour de compositeurs peu connus mais aux indéniables qualités musicales, saluées par une salle debout en fin de concert. Un enregistrement devrait paraître prochainement.
Dès « Herr, wenn ich dich nur habe » de David Pohle, Lucile Richardot offre avec générosité son alto somptueux, tout de soleil sombre à l’émission naturelle enrichie d’une impeccable diction qui ne se démentiront jamais tout au long de la soirée. L’osmose avec les instrumentistes est totale, la conduite de la ligne musicale, les attaques sont d’une grande souplesse. L’expressivité est bâtie de manière très progressive jusqu’au « Trotzdem » – repris en bis – à la déclamation pleine d’autorité. La chanteuse est également une excellente vocaliste comme le démontre l’ « Amen » brillant.
Une certaine théâtralité prévaut dans, « Ach, daß ich Wassers gnug hätte » de Johann Christoph Bach. Par contraste, il rend d’autant plus touchant l’intériorité de l’air en suédois dû à Franz Tunder « Ach Herre, lätt tina helga englar ».
Les deux morceaux bénéficient de passage instrumentaux merveilleusement interprétés tout comme « Ich will in Friede fahren » de Johann Krieger tout en retenue et élégance. La reprise aurait sans doute mérité plus de contraste mais les nuances, la limpidité du phrasé, régalent l’oreille.
« Klag gedicht » de Johann Fischer tisse la même veine délicate et intérieure où les entrées successives des instruments soutiennent le sentiments de mélismes bien conduits.
Ces airs soli alternent avec des morceaux rassemblant un effectif vocal plus conséquent : les sopranos Caroline Weynants et Marie Frédérique Girod au jolis timbres fruités entrelacent leurs voix en un jeu de réponse du trio à l’orchestre dans « O Jesu mi dulcissime » de Giuseppe Peranda.
Davy Cornillot et Sebastian Myrus les rejoignent pour un « Cogita, O homo » de Vincenzo Albrici au texte bien intelligible et surtout l’éclatant« Jubilate, Exultate » de Franz Tunder où éclate la joie de chanter.
*Cette pièce annoncée est finalement supprimée pour cette représentation.